« L’adoption de l’IA relève d’une démarche systémique, car elle touche toutes les dimensions de l’entreprise (éthique, métier, économique, technique, organisation, management, emplois et compétences…) », estime une étude du Cercle Humania. C’est pourquoi la DRH doit intervenir dans toutes les étapes clés de l’adoption de l’IA.

L’intégration de l’IA dans les processus des organisations, notamment à la DRH, a été posée et largement traitée dans nos colonnes, par les études ainsi que par nos confrères. Mais la question du rôle de la DRH dans la définition de la stratégie IA et du cadre éthique de son intégration dans l’entreprise semble avoir été égarée dans la précipitation. C’est oublier le rôle majeur de la DRH dans la transformation numérique et la sauvegarde du capital humain dans ce processus. L’oubli est désormais réparé, grâce à une étude réalisée pour le compte du Cercle Humania par le cabinet de conseil Wavestone, et intitulée Intelligence artificielle et RH : du cadre éthique à l’action.

L’originalité de cette étude repose sur l’analyse d’ouvrages et de rapports sur l’IA, de synthèses de débats entre les représentants de grandes entreprises et des startups, et d’une enquête qualitative réalisée auprès d’une quinzaine de DRH, de directeurs opérationnels et de membres de startups. Son ambition est d’articuler une réflexion au confluent des enjeux de l’IA et des ressources humaines.

En effet, « les cas d’usages de l’IA ont pu être développés sans qu’une définition et une priorisation soient assurées au regard notamment de la valeur ajoutée apportée au métier. C’est ainsi que de nombreux proof of concept ont été initiés, sans pour autant déboucher sur une industrialisation », explique le rapport. Sur ce sujet, nous vous invitons à lire notre article.

Une réflexion systémique pour intégrer toutes les dimensions de l’entreprise

« Nous avons choisi d’inscrire l’étude dans un cadre systémique de façon à articuler l’IA avec toutes les dimensions de l’entreprise, expliquent les rédacteurs de l’étude. La vision systémique amène à réfléchir en même temps aux enjeux stratégiques, éthiques, métiers, technologiques et humains pour ensuite définir une feuille de route cohérente ».

Cette étude n’est donc pas un vade-mecum opérationnel sur l’intégration de l’IA, mais une réflexion pluridisciplinaire sur la problématique de l’IA et des ressources humaines, afin de dégager « des éléments de fond sur le cadre éthique, la conciliation des intelligences humaines et de l’intelligence artificielle, la transformation des emplois, les stratégies d’entreprise, les politiques et processus RH, les technologies et l’accompagnement des acteurs dans le cadre de l’adoption de l’IA », précisent les auteurs.

Il en ressort cinq thèmes destinés à « aider le lecteur à se poser les questions clés relatives à l’adoption de l’IA » :

1Comment repenser les données et l’IA dans un cadre éthique ?

La confiance étant l’enjeu principal d’une bonne intégration de l’IA, celle-ci doit reposer sur une solide fondation éthique. Elle est le liant qui équilibre les impératifs de performance et de responsabilisation des hommes. « Le développement de la confiance vis-à-vis de la gestion des données et des solutions dotées d’IA nécessite de disposer de données fiables et éthiques combinées à une IA éthique, transparente et responsable », explique le rapport. « Seule une approche pluridisciplinaire, respectueuse des droits des personnes, avec une production de modèles performants et explicables permet l’atteinte de cet objectif », affirme le rapport.

2Peut-on concilier intelligence artificielle et intelligences humaines ?

L’intelligence artificielle n’est pas un outil comme les autres. Elle challenge les êtres humains sur ce qui fait leur singularité : l’intelligence, ou l’intelligence créatrice pour être plus complet. « Les intelligences humaines (relationnelle, technique, émotionnelle, empathique...), sont-elles compatibles avec les nouveaux outils utilisant l’IA ?  Dans quelle mesure l’IA rend-elle les hommes plus collaboratifs, créatifs et productifs ? », questionne le rapport. Les réponses se trouvent à la fois « dans la façon de penser les IA de demain, afin d’éviter les effets de boîte noire, mais aussi dans la faculté des hommes à développer de nouvelles compétences, ce en quoi la DRH va jouer un rôle majeur ».

3Dans quelles mesures l’IA transforme-t-elle les emplois ?

Avec des conséquences concrètes sur la transformation du travail, l’IA va-t-elle détruire des emplois ou en créer ? Les théories divergent. « Quoi qu’il en soit, l’IA aura un impact significatif sur les métiers et la façon de les exercer », répond le rapport. À partir du moment où il y a transformation des métiers, les deux effets, destructeur et créatif, sont concomitants selon la théorie Shumpeterienne de destruction créatrice. Des métiers émergent et d’autres tirent leur révérence, il en a été ainsi depuis la nuit des temps.

4Comment la fonction RH est-elle amenée à évoluer avec l’IA ?

« La DRH a un rôle majeur à jouer dans l’adoption de l’IA au sein de sa fonction et à l’échelle de l’entreprise », explique d’emblée le rapport. Il s’agit non seulement de repenser les politiques RH (en anticipant les ressources nécessaires au développement de l’IA en termes d’emplois, de compétences, de formations), mais aussi d’intégrer les technologies de l’IA en redéfinissant les processus RH (recrutement, formation, mobilité…). Là aussi, la transformation des métiers de la DRH est à l’œuvre : « les RH seront amenées à acquérir des compétences techniques liées à l’IA et aux données en complément des savoir-faire RH et des compétences comportementales ».

5Quelles sont les actions clés à mener pour accompagner les acteurs dans l’adoption de l’IA ?

Une réflexion pluridisciplinaire est par essence un travail de collaboration entre des acteurs dont les approches diffèrent. De fait, « l’accompagnement des acteurs de l’organisation s’inscrit dans la continuité des plans de transformation numérique », affirme le rapport. La DRH doit ainsi jouer à plein son rôle en intervenant « dans toutes les phases clés de l’adoption de l’IA depuis la définition de l’ambition IA, le choix des cas d’usages, l’accompagnement des profils IA et des autres profils de l’entreprise, le pilotage des cas d’usages, le choix entre le make or buy, les POCs, l’industrialisation des cas d’usages jusqu’au déploiement de l’IA à l’échelle de l’entreprise ».

Sources : Wavestone