J’ai eu l’opportunité de mettre en place la priorisation et le management d’un portefeuille de projets informatiques il y a déjà quelques années. Je souhaite partager ici les temps forts de cette expérience car je pense qu’ils peuvent être utiles si vous vous engagez dans une aventure un tant soit peu similaire.
Quels étaient les objectifs ?
Nous avions 4 objectifs principaux à l’établissement d’un processus de management de Portefeuille de Projets Informatiques. Les voici accompagnés de leurs problématiques spécifiques :
- Maximiser le retour sur investissement des projets : Comment comparer des projets différents ?
- Aligner ses projets sur la stratégie de l’entreprise : Éviter les querelles de chapelles, intégrer le client à la prise de décision, assurer la transparence des décisions
- Limiter le nombre de projets : Quels Critères et Objectifs? Comment identifier et tuer rapidement les « loosers »
- Cohérence du portefeuille de projets : Architecture informatique, balance des investissements (dans le temps et sur la chaîne de la valeur), en prenant en compte les dépendances inter-projets
Quelques définitions pertinentes :
- Portfolio: Tous les projets et programmes entrepris par la division informatique
- Programme: Un groupe de projets liés et managés de manière coordonnée pour un objectif business commun
- Projet Nouveau : Un projet entrepris pour créer un nouveau produit ou service.
- Projet « Baseline » : Série de taches de support ou de maintenance nécessaires au fonctionnement d’une application existante.
Quels étaient les Rôles et Responsabilités des principaux acteurs ?
- Clients : à Exprimer ses besoins et priorités
- Équipes Projets : à Analyser, réaliser
- Portfolio Management : à Préparer, challenger, manager
- Projects Committee : à Établir les critères, prioriser
- Investment Review Board : à Décider
Quel a été le processus ?
A la base du travail, il faut bien sûr réaliser un inventaire de l’existant :
- Projets et programmes démarrés et en cours d’instruction,
- Budgets existants,
- Plan stratégique IT (quand il existe),
- Etablissement d’un référentiel de projets
Puis établir les critères d’évaluation des projets. Ce point est particulièrement crucial car on veut avant tout passer d’un modèle subjectif à un modèle de décision basé sur des faits et sur des informations pertinentes.
De cette expérience personnelle, je retiens que les critères doivent être :
- Simples : Faciles à comprendre et à calculer
- Factuels : Basés sur des éléments mesurables, indiscutables, connus et/ou mis en visibilité de tous
- Uniques : Il faut éviter de multiplier les métriques et donc s’efforcer de réutiliser ceux qui sont déjà en place
- Indicateurs : Il ne faut pas perdre de vue que ces métriques vont seulement permettre aux décideurs de prendre une décision informée, basée sur des faits, et qu’ils vont combiner avec leur compréhension des enjeux business et techniques.
- Systématiquement calculés et préalables à toute revue de projet
Quels critères ont été utilisés ?
- Montant total de l’investissement : Machines, Logiciels, Coûts de support, Services externes (consultants), Ressources (Permanents and sous-traitants), Déplacements
- Alignement Stratégique : Impact sur le Revenu, impact sur les coûts, Efficacité Opérationnelle, Satisfaction Client
- Retour sur Investissement : « Payback Period » = Le temps nécessaire pour recouvrer totalement son investissement grâce aux bénéfices apportés par le projet.
- Probabilité de succès : Besoins bien définis et stables ; Capacité à absorber le changement et besoins de reengineering, de redéfinition des processus; Taille du projet ; Risque de dérapage budget ou délais ; Risques liés à la sécurité
- Alignement Technique : Alignement sur l’architecture technique ; Pas de conflits avec les plans de convergence ; Simplicité et modularité ; Dépendances des autres projets sur celui-ci; Disponibilité de ressources adéquates ; Disponibilité et stabilité de la technologie
Puis nous avons conçu des grilles de priorités simples qui permettent de croiser les critères deux à deux. Dans mon cas, le budget global d’investissement étant imposé, nous avons croisé tous les autres critères avec celui-ci pour positionner chaque projet dans ces grilles.
Attention cependant à ne pas se laisser leurrer par ces codes couleurs. En particulier, il faut noter qu’un portefeuille dont tous les projets seraient dans le vert ne serait pas nécessairement optimal. Un tel portefeuille favoriserait seulement les projets dont les retours sur investissement sont à court terme et de moindre risque. Hors cette stratégie est rarement payante dans le moyen ou long terme.
Un autre tableau qui nous a été utile est le tableau croisé des risques et bénéfices par rapport au niveau d’investissement requis.
Ce graphe positionne les projets les uns par rapport aux autres en fonction de leurs bénéfices et de leurs chances de succès tout en montrant visuellement (grâce à la taille des bulles) les investissements requis pour les entreprendre.
Que retenir de cette expérience ?
Tout d’abord, la nécessité de fournir énormément d’efforts au départ de la part du portfolio manager et de la direction pour initier le mouvement, collecter toutes les données, créer le bon niveau d’attention en particulier chez le management exécutif de l’entreprise et donner du momentum à l’initiative de mise en place du portefeuille de projet.
De plus, le Portfolio Manager devra également se retrousser les manches pour :
- Se plonger dans chaque dossier de projet,
- utiliser son réseau personnel au sein de l’entreprise afin de vendre le concept et l’approche aux plus hautes instances décisionnelles de l’entreprise et aux récalcitrants,
- communiquer sans relâche.
Les points positifs :
- Tous les membres des directions métier sont réunis autour de la table pour discuter du portefeuille de projets informatiques dans son ensemble
- Cela nécessite un bon travail de groupe pour établir les critères
- Il est impératif d’intégrer le processus IT Portfolio Management dans celui de revue des investissements de l’entreprise
- Grâce à cet exercice nous avons réussi à éliminer ou repousser quelques projets éliminés assez tôt pour concentrer nos ressources sur ceux qui étaient les plus prometteurs
Les risques rencontrés :
- La pression financière en cours d’année peut limiter les résultats en forçant certains partenaires dans leur ancien mode opératoire (celui qui crie le plus fort a raison),
- Les réorganisations forcent à réexpliquer, à revendre, les principes et éventuellement à les ajuster
- La résistance au changement reste forte dans les premiers tours de table de priorisation
- Rien n’est définitivement acquis car un changement de direction peut tout remettre en question.
Pour toute information complémentaire, n’hésitez pas à contacter