"L’avenir de notre industrie des technologies propres doit se construire en Europe." C’est par ces mots qu’Ursula von der Leyen a défendu le Green Deal européen lors de son récent discours sur l’état de l’Union.

Pour mettre en place les objectifs ambitieux signés par les 27, l’Union européenne doit urgemment accélérer sa transition vers les énergies renouvelables. Panneaux solaires, parcs éoliens, turbines hydrauliques… La France prend sa part et accélère pour envisager atteindre ses objectifs en matière d’énergie verte. La construction d’un panneau solaire nécessite une dizaine de matériaux. Parmi eux, le silicium, le lithium ou encore le tellure. Tous ces métaux ont en commun leur rareté et leur importance stratégique. Pour le simple tellure, le cabinet McKinsey estime que sa production devrait augmenter de 850 % d’ici 2030 pour répondre à la demande. Bémol, la principale mine de tellure se trouve en Chine. La Chine, qui représente 90 % de la production mondiale en terres rares. Et qui a récemment décidé de restreindre son exportation de plusieurs minerais rares.

C’est donc pour réduire sa dépendance aux puissances étrangères que la Commission européenne a décidé de signer le Critical Raw Material Act. Listant 34 matériaux critiques, ce plan prévoit que 10 % de l’approvisionnement européen doit venir de l’extraction sur le continent d’ici à 2030. Les membres de l’UE ne devront pas dépendre à plus de 65 % d’un seul pays à l’extérieur de l’Union.  

Les mines, nouvel enjeu stratégique de souveraineté

Les chiffres peuvent sembler humbles. Ils sont en réalité extrêmement ambitieux. Une éolienne de 3 mégawatts nécessite, entre autres, 350 tonnes d’acier, 4,7 tonnes de cuivre et trois tonnes d’aluminium. La Banque mondiale estime que la demande pour ces matériaux devrait augmenter de 500 % d’ici 2050. Toute pénurie dans ces matériaux pourrait avoir un impact désastreux sur la transformation écologique du territoire.

Il y a quelques jours, Emmanuel Macron lançait un “grand inventaire des ressources minières” lors de l’annonce de son plan de planification écologique. La dernière opération de cette envergure avait été effectuée entre 1975 et 1995. A l’époque, celle-ci ne concernait que 20 % du territoire français. Désormais, il s’agit à la fois de connaître les ressources minières de la France, et de prévoir des installations de futures exploitations. La première du genre est déjà en développement dans l’Allier et vise à entrer en production en 2028 pour des ressources en lithium, suivie d’autres gisements en Bretagne ou dans l’Est.  

S’inspirer des secteurs stratégiques pour renforcer son indépendance

Mais la mise en place d’une stratégie minière ne se fera pas en un jour. Elle nécessite non seulement un état des lieux des ressources existantes, mais également une réflexion sur la capacité de résistance de cet ensemble minier à toute crise.

A cet égard, le secteur bancaire peut servir de référence. La supervision bancaire européenne utilise des tests de résistance, permettant d’évaluer la capacité de rebond des institutions bancaires face à de potentiels futurs chocs financiers. Les banques ont dû se doter de technologies à même de supporter ces stress tests et de créer des scénarios hypothétiques sans jamais impacter le fonctionnement quotidien de l’institution. Parmi celles-ci, citons le jumeau numérique. Appliqué aux chaînes d’approvisionnement, le jumeau numérique offre une représentation virtuelle de l'ensemble du réseau de la chaîne d'approvisionnement des matières premières critiques - l'extraction, les importations, les fournisseurs, les stocks de l'UE et les applications du produit final. À l'aide d'analyses avancées, de l'IA à l'apprentissage automatique en passant par la simulation, l'économétrie et l'analyse visuelle, ce modèle peut simuler les résultats des décisions en matière de politique, de conception et d'investissement.

Si la transition vers une dynamique minière est en cours, celle-ci prendra du temps. Un temps indispensable pour identifier les ressources existantes, créer des structures minières résilientes et construire les infrastructures nécessaires. Un temps nécessaire surtout, pour faire de l’Europe un continent plus souverain et modèle sur la question environnementale. Mais un temps que la technologie pourra contribuer à accélérer.

Par Walid Farhat, Head of Pre-Sales France chez SAS