Les DSI affrontent les nouveaux défis de la main-d’œuvre IT. En réponse, ils vont devoir procéder à une approche du recrutement des talents qui fera la part belle à l’uberisation des emplois IT.
Que distingue-t-on lorsque l’on fait appel un service Uber ? La première chose, c’est bien évidemment une nouvelle approche du transport par le partage. Mais se pose également une autre question autrement polémique, celle de la restructuration de la relation entre l’employeur et l’employé.
Le DSI a mis le pied dedans...
Ce phénomène n’est pas nouveau, et le DSI y est confronté depuis longtemps. La diversification des compétences liées à celle des projets informatiques entraîne bien souvent la nécessité de faire appel à des ressources extérieures. Cela se traduit généralement par des contrats passés avec des prestataires externes, agences, éditeurs ou intégrateurs, et indépendants. Mais également, et de plus en plus, par l’appel à des employés occasionnels assimilés à des indépendants, sur le modèle Uber.
Dans le même temps, les DSI sont confrontés à une nouvelle priorité, le recrutement de talents hautement qualifiés. 71 % des entreprises en 2016 cherchent à étoffer leurs équipes technologiques, avec dans les entreprises américaines une progression attendue pour ces équipes de l’ordre de 11 % et plus (source Edelman Berlind). Or, la majorité des entreprises affirment rencontrer des difficultés à recruter les talents d’aujourd’hui et de demain.
L’uberisation des talents IT
C’est là qu’intervient le modèle de l’uberisation, que nos amis américains nomment la ‘GiG economy.’ Pour faire face à leurs besoins en termes d’employés et de compétences, de plus en plus d’entreprises ont recours à ces travailleurs occasionnels, sans lien avec l'interim (un service externe). Aux États-Unis de nouveau, 95 % des entreprises les perçoivent d’ailleurs comme un élément clé de l’avenir de leur business, qui dès 2017 devrait représenter environ 25 % de leur main-d’œuvre IT (source Ardent Partners).
Aux États-Unis, toujours, le phénomène est beaucoup plus engagé qu’on ne l’imagine en Europe. 53,7 millions d’individus, soit 40 % de l’ensemble des salariés américains, dépendraient potentiellement de ce modèle (source US Department of Labor). Au point que l’administration fédérale envisagerait de créer une qualification spécifique pour cette nouvelle main-d’œuvre, reposant sur le modèle de l’artisanat.
Les nouveaux défis pour le DSI
L’uberisation de l’emploi représente également de nouveaux défis pour le DSI. Tout d’abord, elle semble incontournable dans certains domaines, comme les architectes d’entreprise, les architectes de données, le Big Data, les ingénieurs réseau sans fil, les développeurs d’applications mobiles, ou encore la cyber sécurité.
Cette nouvelle main-d’œuvre est également porteuse de plusieurs préoccupations, que le DSI doit prendre en compte lorsqu’il recrute ce type de travailleur :
- Le manque de visibilité et de réflexion autour des ramifications de l’uberisation
- La difficulté d’évaluer et de vérifier les compétences d’un travailleur occasionnel
- Le besoin d’élaborer des prévisions budgétaires réalistes
- L’écrasant poids des règles et des usages
Un autre domaine d’inquiétude, plus inattendu pour les DSI qui pratiquent cette approche, porte sur la contribution des employés occasionnels, mais à forte compétence, à la création de la propriété intellectuelle. Qui détient la propriété des travaux au profit de l’entreprise ? Lorsqu’il s’agit d’un salarié avec un lien de dépendance, la question ne se pose pas. Par contre, lorsque la compétence est externe et reconnue, quelles règles de protection de la propriété intellectuelle et de la confidentialité appliquer ? Si la réponse est plus simple à trouver dans le droit français, elle est également à rechercher dans la contractualisation.
L’erreur de la réduction des coûts
L’uberisation des talents IT devrait souvent être assimilée par les DSI à une solution pour réduire les coûts. Même en sortie de crise — ce qui reste à démontrer… – la réduction des coûts est encore le principal moteur de nombreuses entreprises, et de leurs directions générales.
Mais dans le cadre des projets IT, l’accès aux meilleurs talents se marie mal avec l’économie de quelques euros. Surtout que le recours à des travailleurs occasionnels s’accompagne de coûts annexes, comme l’allongement du contrat pour prendre en compte une période d’adaptation, le coût de préparation du projet, la conception de la documentation. Au mieux, ces surcoûts seront compensés par des économies potentielles.
En conclusion
Les DSI doivent prendre en compte dès aujourd’hui le phénomène de l’uberisation des talents IT. Les travailleurs occasionnels représentent en moyenne aux États-Unis 20 % du personnel informatique. Un chiffre qui devrait atteindre 25 % en 2017. Mais si l’on fait une projection des expertises de l’industrie sur le temps plein, il devrait atteindre les 50-50 avant la fin de la décennie.
Sans oublier un phénomène inattendu, 90 % des professionnels de l’informatique qui ont accepté un contrat de travailleur occasionnel ne pourront ou ne souhaiteront jamais retourner travailler pour un seul employeur. La ‘Gig economy’ serait donc un parcours sans retour !
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