Même si la transformation numérique des organisations, portée par l’explosion du cloud, du Big Data, de l’IoT et de l’IA, reste d’actualité, il est probablement une expression que nous allons devoir intégrer dans notre langage courant : « décélération ».

Plusieurs actualités récentes ont remis au goût du jour une expression somme toute courante, mais qui revient dans les discours liés aux entreprises IT avec une certaine acuité, plutôt d’ailleurs de l’autre côté de l’Atlantique : la décélération.

Prenons quelques exemples qui nous viennent des Etats-Unis :

  • La décélération d’Amazon Prime

Avec 95 millions de clients Amazon Prime sur le sol américain à la mi-2018, le service ‘client privilégié’ du géant de l’e-commerce affiche une « décélération » dans sa progression annuelle. Elle était de 35 % entre 2016 et 2017, elle n’est plus que de 12 %, soit une chute du rythme des adhésions de l’ordre de 50 % au cours des deux dernières années.

C’est une mauvaise nouvelle pour Amazon – nous ne l’en plaindrons pas, il lui reste 95 et prochainement 100 millions de clients captifs, et les Prime Days ! – car en moyenne un client Prime américain dépense environ 900 $ la première année, et plus de 1.500 $ au bout de 3 ans. Des chiffres à rapprocher des 600 $ l’an dépensés par un client non membre…

  • La décélération chez Netflix

Même constat chez le service de vidéo à la demande Netflix, qui au second trimestre a constaté un ralentissement sensible de ses nouveaux abonnés. 6 millions étaient attendus ; ils ne sont que 5,2 millions à l’avoir rejoint. Une décélération qui s’est traduite par une sanction sévère à Wall Street, car la Bourse comme les actionnaires n’apprécient pas ces mouvements de ralentissement et encore moins de recul...

  • La décélération des banques mobiles

Autre phénomène de décélération, les résultats au second trimestre 2018 de JPMorgan et Wells Fargo montrent un recul de la croissance des usages des banques sur les mobiles. En janvier, leurs compteurs affichaient 30,1 millions de clients actifs sur le mobile pour JPMorgan, et 21,2 millions pour Wells Fargo. Mais déjà, même si la progression reste solide, la courbe commençait à s’infléchir, d’environ 3 %.

La définition de la décélération

Si l’on évoque la décélération sur Wikipedia, l’encyclopédie libre nous place automatiquement sur « accélération ». La décélération n’aurait dont pas droit de cité ? Tout juste a-t-on droit au milieu des équations à l’évocation de la « chute libre », sous la forme d’un « arc de parabole ».

Sur le Larousse, décélération fait référence à une « accélération négative » ou à la réduction de la vitesse. Nous préfèrerons la définition qui suit : « Abaissement d’un rythme de croissance, passage à un taux de croissance moins élevé, ou ralentissement d’une évolution ». Nous noterons avec satisfaction que nous restons dans un domaine de croissance, simplement celle-ci se fait moins rapide.

Comment interpréter la décélération ?

Peu importe les définitions, ce qui nous intéresse ici c’est l’interprétation que nous pouvons faire de l’expression « décélération » dans notre quotidien IT, ceci d’autant plus que si le climat économique, sous l’impulsion en particulier du Président Trump, continue de se dégrader (lire : « Apocalypse Dow : allons-nous vers un effondrement boursier ? » ), l’expression pourrait bien prendre une tournure négative.

Nous voyons deux interprétations à ‘décélération’ :

  • Maturité : dans le cycle de vie d’un produit ou service – se référer au Hype Cycle du Gartner (lire : « Qu’est-ce que le Gartner Hype Cycle ? Les 3 meilleurs articles sur le Hype Cycle » ) - la maturité vient après plusieurs stades d’évolution : l’innovation, le pic d’inflation et la phase de désillusion. La décélération doit donc être comprise comme le passage à maturité, et c’est plutôt positif. Amazon est dans cette phase.
  • Saturation : voilà qui est plus inquiétant, et qui fait entrer dans la boucle des éléments extérieurs qui viennent peser sur le marché d’une entreprise. Dans les exemples cités ci-dessus, la décélération constatée chez Netflix ou la banque mobile se prêtent plutôt à la saturation liée à la concurrence, et donc à une pointe d’inquiétude. D’ailleurs, les marchés boursiers ne s’y trompent pas et les sanctions peuvent être sévères…

Conclusion

Ce que nous retiendrons en priorité ici, c’est que lorsque l’expression « décélération » rejoint le langage associé à une entreprise, la notre ou celle d’un fournisseur ou partenaire, probablement rien ne justifie de s’alarmer, mais il est toujours bienvenu de faire preuve d’attention…

Quant aux pratiques à retardement de nos entreprises - le retard que nous accumulons régulièrement face aux marchés anglo-saxons en particulier - et bien elles tendent à nous faire adopter ou basculer sur une technologie non pas au moment où elle est porteuse d'un fort potentiel, mais à celui ou elle devient mature. Ce qui revient à l'adopter lorsqu'elle entre en 'décélération', ce qui explique en partie pourquoi nos retards peuvent se traduire de manière plus négative !

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