Interdit d’accès aux technologies américaines, Huawei développe son propre OS multiplateforme, destiné aussi bien aux smartphones qu’aux montres connectées et aux télévisions. Délivré de sa dépendance aux Américains, Huawei veut lancer son propre écosystème concurrent.

Dans presque toutes les sagesses anciennes, il existe un enseignement énonçant « qu’à toute chose malheur est bon » ou bien « ce qui ne tue pas rend plus fort ». Ainsi après avoir vu les portes se fermer de toute part, Huawei, empêché d’acheter les technologies américaines, principalement l’OS de Google pour smartphones, mais pas seulement, a fait siennes les antiennes citées plus haut. Obligé de se débrouiller seul, le fabricant chinois développe les compétences qui lui permettront de mettre en place son propre écosystème, alors qu’il utilisait jusqu’à présent l’écosystème de Google. Il se place ainsi en concurrent redoutable et très bien positionné, surtout sur les marchés émergents, des géants américains.

Lors de sa conférence développeurs baptisée Huawei Developer Conference 2020 (Together), Huawei a levé le voile sur la version 2.0 de son système d’exploitation, HarmonyOS. N’ayant pas donné de détails sur le noyau open source utilisé ni les surcouches réseau et applicatives, la principale caractéristique du nouvel OS est son caractère multiplateforme.

Voici l’intitulé d’une des sessions du HDC Together, animée par le français Mathieu Plauchut, Head of European Software Ecosystem chez Huawei, et qui résume bien la vision derrière HarmonyOS : « Grâce à la technologie distribuée, nous pouvons créer des super appareils plus performants en faisant tomber les barrières entre les différents systèmes matériels et logiciels. Lorsque tous les appareils de l’utilisateur sont connectés de cette manière, ils peuvent coordonner et allouer les ressources plus efficacement. Huawei se réjouit de travailler avec les développeurs pour créer des appareils plus intelligents à l’ère de la 5G et de l’IoT ».

Plus qu’un OS, un véritable écosystème

La version bêta mobile d’HarmonyOS sera disponible pour les développeurs d’ici la fin de l’année annonce le fabricant. Huawei avait annoncé la mise en chantier de son système d’exploitation en août 2019. Multiplateforme, il facilite la découverte rapide des appareils, la connexion instantanée, la collaboration matérielle et le partage des ressources entre plusieurs appareils. HarmonyOS 2.0 est annoncé aujourd’hui, apportant une mise à jour complète de ses capacités distribuées existantes, y compris le bus logiciel, la gestion des données et la sécurité. Huawei a également introduit une interface adaptative qui permet aux développeurs de toucher rapidement des dizaines de millions de nouveaux appareils et utilisateurs.

Avec la dernière mise à jour, les développeurs pourront avoir accès aux émulateurs, aux SDK et aux outils IDE. Le projet open source, qui est donné à la Fondation OpenAtom, sera lancé par étapes avec une version bêta mobile d’HarmonyOS prévue d’abord pour les développeurs chinois à la fin de 2020. Richard Yu, PDG de Huawei Consumer Business Group, a annoncé la feuille de route pour HarmonyOS dans son discours d’ouverture. « À partir du 10 septembre, HarmonyOS est ouvert aux appareils IoT de 128Ko-128Mo, tels que les téléviseurs intelligents, les wearables, les voitures et plus encore. En avril 2021, nous l’ouvrirons aux appareils de 128Mo-4Go et en octobre 2021, HarmonyOS sera ouvert aux appareils de plus de 4G0 », a-t-il déclaré.

Une alternative aux géants américains voit le jour

Nous ne rentrerons pas ici dans le débat sur les accusations de transfert de données sensibles vers la chine, d’espionnage industriel et autres abus, qui ne sont pas l’apanage exclusif des Chinois. D’ailleurs, c’est le gouvernement chinois qui ont les premiers interdits un certain nombre de services et de réseaux sociaux sur leur territoire, donc la balle est au centre sur le terrain des interdictions. Cependant, les décisions de l’administration Trump concernant les fabricants et fournisseurs de services chinois en général et de Huawei en particulier sont le fruit d’une méconnaissance, délibérée ou ingénue, des capacités de ce peuple.

Couper le fabricant chinois des sources technologiques nécessaires à son développement en pensant que cela l’affaiblirait est une vision court-termiste et qui fait preuve de méconnaissance de ce que l’Histoire enseigne. Une myopie qui fait fi du fait que le peuple chinois est l’héritier de millénaires d’histoire et dont l’ingéniosité a été à l’origine de développements technologiques qui ont influencé l’évolution de la civilisation occidentale, comme la poudre, le papier et le compas.

C’est faire fi aussi du fait que le peuple chinois dispose d’assez de ressources de toutes sortes, humaines et matérielles, pour tracer sa propre voie envers et contre tout. Que l’OS de Huawei soit une réussite technologique et commerciale dans, seul l’avenir le dira. Mais la constante est qu’une alternative à l’hégémonie des géants américains est en train de voir le jour.