Les dix-huit derniers mois ont été marqués par des changements soudains et de multiples implications pour le monde des hautes technologies. À titre d’exemple, les services IT ont dû s’adapter au télétravail, ce qui, au-delà de l’emplacement géographique proprement dit, a modifié en profondeur la manière dont les équipes travaillent et collaborent. Dans le même temps, certaines entreprises sont confrontées à d’autres pressions, telles que les restructurations organisationnelles avec réduction d’effectifs, la refonte de l’infrastructure informatique avec de nouveaux partenaires pour le support logiciels et la gestion des applications (AMS), ou la transformation numérique — le tout dans un contexte marqué par un fort sentiment d’anxiété bien compréhensible face à l’ampleur de la crise sanitaire que nous traversons.
Pour certains observateurs, la gestion du changement n’a jamais été aussi importante. En effet, l’une des principales composantes d’une gestion efficace du changement réside dans la capacité à être attentif à des évolutions qui ont une incidence sur les individus tout en minimisant leur niveau d’anxiété et d’incertitude pour faire en sorte qu’ils accueillent favorablement les nouvelles méthodes de travail et continuent d’accomplir leur tâche sans à-coups. Si le « mode d’emploi » varie en fonction de paramètres tels que la taille de l’entreprise ou les systèmes et processus en cours de transformation, plusieurs bonnes pratiques sont applicables de manière générique.
Pour commencer : identifier les acteurs du changement
Il est essentiel pour pouvoir s’appuyer sur un « sponsor exécutif » qui défendra le changement au plus haut niveau. Ce relais doit posséder les qualités de visionnaire et de leadership nécessaires pour promouvoir le changement au sein de l’entreprise, qu’il s’agisse de refondre la stratégie informatique, de choisir un nouveau partenaire pour la gestion des applications (AMS), de transférer des systèmes métier essentiels vers un environnement de cloud public, ou de promouvoir une stratégie numérique. Dès qu’un changement survient au sein de l’organisation informatique, vous devez vous appuyer sur un leader qui allie la clairvoyance et l’empathie nécessaires pour en mesurer l’impact sur les équipes, et qui saura rester actif et accessible pour faire en sorte que les collaborateurs suivent la nouvelle orientation en toute confiance. Ces acteurs du changement possèdent la vista indispensable pour comprendre les besoins de l’entreprise, identifier les prochaines innovations technologiques, flairer les opportunités d’investissement, et amener les équipes à adhérer au projet.
Outre cette aptitude à cerner les meilleurs investissements dans les domaines de la technologie numérique, de la migration vers le cloud et de la sécurité au cours des cinq années à venir, un responsable de la gestion du changement doit également disposer d’une présence au niveau exécutif et afficher une personnalité accessible. Il doit être en mesure d’influencer l’ensemble des personnes concernées, à savoir ses homologues exécutifs, les dirigeants et les professionnels des systèmes d’information — en deux mots, il doit réunir les qualités qui caractérisent les grands leaders. Un leadership efficace en matière de changement doit inciter les équipes à adhérer à la vision qui leur est proposée et à la suivre en toute confiance.
En ce qui concerne les changements qui touchent le domaine des hautes technologies, je considère généralement que le DSI (CIO) — et parfois le directeur technique (CTO) —incarne le sponsor exécutif idéal. Il est également utile de compter le directeur financier (CFO) à ses côtés, car l’entreprise repose sur ses épaules et il doit être en phase avec les changements proposés. Les collaborateurs côté « métier » ont pour mission d’atteindre certains objectifs, de répondre aux exigences des clients et d’assurer la bonne marche de l’entreprise. Ils ne peuvent en aucun cas être affectés par des changements technologiques qui touchent la stabilité et les performances des systèmes.
Trois bonnes pratiques à adopter
Certes, la façon dont la gestion du changement se manifeste varie d’une entreprise à l’autre, mais voici trois bonnes pratiques que je trouve intéressantes dans la plupart des situations :
- Montrer la voie avec transparence. Lorsqu’un service IT procède à un changement majeur, un haut responsable doit communiquer non seulement avec les autres dirigeants en charge du projet, mais également avec les professionnels de la technologie et les utilisateurs métier concernés. Il doit expliquer les facteurs clés qui ont conduit à la décision de procéder au dit changement, notamment sur le plan métier et financier. Il est également important de donner aux collaborateurs le maximum d’informations ; en effet, le niveau d’anxiété diminue lorsque les utilisateurs disposent d’informations détaillées, sont conscients des risques et savent comment la décision a été prise. Faute d’expliquer en toute transparence le pourquoi du comment, les dirigeants risquent de donner l’impression de ne pas savoir ce qui se passe réellement sur le terrain et en quoi ce changement affecte le travail des utilisateurs. Or, les équipes seront parfois surprises de découvrir à quel point leurs responsables savent effectivement ce qui se passe sur le terrain et mesurent les implications du changement sur le plan technique. Une transparence totale entre les personnes affectées par un changement donné confère à l’initiative de bien meilleures chances de succès.
- Organiser une réunion d’information. Il ne suffit pas d’expliquer par le menu pourquoi le changement est judicieux pour l’entreprise : les dirigeants doivent également prendre les devants et organiser une réunion de chantier où les parties prenantes pourront discuter les détails du projet. Il est essentiel de présenter en détail les implications techniques du changement en permettant aux collaborateurs de poser toutes sortes de questions. Ce qui ne signifie pas qu’il n’y aura pas de controverse : il m’est arrivé à plusieurs reprises de participer à des réunions où les ingénieurs posaient des questions complexes et faisaient preuve d’un scepticisme naturel à l’égard d’un changement, tout en s’inquiétant de ne pas en avoir été informés en amont. Mais d’autres ingénieurs ont alors pris le temps d’expliquer les tenants et les aboutissants de l’initiative sous un angle technique, et la situation s’est apaisée. Ce type d’interaction contribue à instaurer la confiance et recueillir l’adhésion des principaux acteurs du changement, c’est-à-dire les membres de l’équipe technique et les utilisateurs finaux. Un dialogue ouvert avec les collaborateurs concernés permet de mieux comprendre les principales préoccupations des collaborateurs au cours de la période de transition et de les atténuer pour garantir le succès du projet.
- C’est un projet professionnel, mais faites-en une affaire personnelle. J’ai la conviction qu’une interaction personnelle constitue une importance vitale, notamment lorsqu’une entreprise se trouve dans la phase « transition » du processus de changement. Lorsque les équipes commencent à travailler sur le changement — a fortiori les équipes techniques —, il est parfois plus pratique de se cacher derrière l’écran de son ordinateur et de faire davantage partie du problème que de la solution. Je suis convaincue qu’il est très utile d’inciter les collaborateurs à communiquer avec les intervenants impliqués dans le changement. Je fais en sorte de favoriser ces connexions à l’occasion de réunions hebdomadaires ou bihebdomadaires. Dans le contexte actuel, cette pratique a bien évidemment été remplacée par des sessions Zoom ou d’autres modes de communication. Toutefois, ces interactions régulières s’avèrent très efficaces, car elles permettent à vos équipes de nouer des relations plus étroites qui ne peuvent que contribuer au succès du projet. À terme, l’essentiel est de créer des liens personnels et d’instaurer un climat de confiance entre les équipes et des dirigeants désireux d’apporter le soutien nécessaire pour valider l’adoption de leur nouvelle vision et des changements mis en œuvre.
Lorsqu’une entreprise entreprend un changement d’ordre organisationnel ou technologique qui modifie ses processus, son support ou son infrastructure en profondeur, il est fort possible que des sentiments proches de l’incompréhension, de l’inquiétude et de l’anxiété apparaissent. Aujourd’hui plus que jamais, il incombe aux dirigeants de créer un système de soutien globalisé pour aider les collaborateurs à réagir au changement. En ce moment, nous faisons tous preuve d’une grande sensibilité en raison de la pandémie et de ses effets continus ; à titre personnel, nous sommes davantage réticents à prendre des risques parce que nous sommes pour la plupart confrontés à des bouleversements et des incertitudes. Ces bonnes pratiques sont d’autant plus importantes que nombre de collaborateurs doivent affronter des perturbations dans leur sphère personnelle en même temps que des nouvelles orientations dans le domaine technologique et à titre professionnel — une situation dont les dirigeants doivent absolument prendre la mesure.
Par Nancy Lyskawa, Vice-présidente exécutive chez Rimini Street, Prise en charge et réussite du client