Aujourd’hui, les missions spatiales doivent répondre à des attentes de plus en plus grandes tant en volume qu’en qualité de données collectées et utilisées pour les études climatiques, les prévisions météorologiques, la cartographie géospatiale ou la réduction des risques de catastrophes.

D'une manière générale, les engins spatiaux d'aujourd'hui transportent des systèmes plus performants, comme les satellites de télédétection qui capturent des images et des vidéos à une résolution toujours plus élevée, ou des caméras multispectrales et hyperspectrales. Toutefois, la largeur de bande des liaisons descendantes n’a pas suivi le même rythme de développement que ces technologies. Ces paquets de données plus volumineux impliquent des échanges plus longs avec les stations de contrôle au sol. Et parfois, ce temps manque quand des décisions doivent être prises rapidement, voire en temps réel.

Pour palier la lenteur de la bande passante, les calculs de données sont exécutés à bord même des engins stapiaux. Cependant, cela exige une informatique embarquée beaucoup plus puissante, ce qui augmente la demande en énergie et en puissance, ainsi que le poids de la charge utile.

Moteurs d'IA embarqués

Les moteurs de calcul d'IA embarqués dans des puces spatiales peuvent offrir une solution en permettant une inférence locale efficace en termes de calcul et de consommation d'énergie pour filtrer les données des capteurs.

La capacité à prendre des décisions de manière autonome dans l'espace permet d'améliorer les missions et, dans certains cas, de les rendre possibles. Par exemple, les satellites d'observation de la terre commencent à utiliser l'IA pour détecter la présence de nuages dans les images prises. Si les détails de la surface sont masqués par les nuages rendant l'image inutile, celle-ci peut être rejetée : elle ne consomme pas de mémoire de stockage ni de bande passante.

Mais l’IA sucite un intérêt dans d’autres champs d’application, par exemple :
  • Dans les applications de sécurité où les objets à la surface de la terre doivent être identifiés en temps réel, l'IA peut rapidement faire la différence entre, par exemple, les navires commerciaux et les navires militaires, réduisant ainsi le temps de réponse et éliminant les longs cycles d'analyse humaine.

  • Dans les engins spatiaux conçus pour atterrir sur des planètes ou des astéroïdes, l'IA embarquée permettrait au véhicule de détecter des sites d'atterrissage viables de manière autonome et en temps réel. Cela résoudrait le temps de latence des communications qui empêche le contrôle à distance de l'opération d'atterrissage depuis la terre.

  • Pour surveiller l'état général des systèmes à bord des satellites et des engins spatiaux, l’IA pourrait détecter les anomalies dans les paramètres mesurés, tels que les courants, les tensions, la température, les contraintes mécaniques et les vibrations. Un satellite moderne complexe peut comporter plusieurs milliers de canaux de télémétrie, l'IA pourrait les analyser tous en temps réel, alors que seul un sous-ensemble de canaux de télémétrie peut être disponible pour l'analyse humaine au sol. Cela peut permettre de détecter les défaillances en temps réel et de lancer des alertes précoces.

La vie dans l'espace

À mesure que l'"IA spatiale" se développe, l'industrie a besoin de solutions rentables pour héberger les charges de travail d'inférence. Il existe plusieurs façons de mettre en œuvre l'inférence de l'IA dans les systèmes embarqués. Une approche courante consiste à utiliser des ressources DSP dédiées qui sont souvent intégrées dans des dispositifs de calcul tels que des FPGA, des GPU, des TPU et des ASIC spécialisés.

Cependant, il y a plusieurs contraintes liés à la préparation des dispositifs embarqués dans les engins spatiaux dont il faut tenir compte.

Les engins spatiaux sont coûteux et, une fois lancés, ne peuvent être réparés. Les rayonnements propres à l’environnement spatial peuvent avoir des effets destructeurs pour la microélectronique et les pièces (effets de verrouillage à événement unique) et entrainer une détérioration progressive des performances et du courant de fuite (effets de la dose ionisante totale).

Il est primordial que la microélectronique réponde aux normes en vigueur, telle que la spécification MIL-PRF-38535 Class B du ministère américain de la défense, car cela garantit la continuité de service des engins spatiaux utilisant ces dispositifs et permet aux organisations qui les déploient de reprogrammer le matériel après le lancement et d'effectuer les mises à jour nécessaires par voie hertzienne (OTA).

Enfin, la longévité est aussi un pré-requis. Les fabricants de satellites ont besoin d'une assistance pour leurs produits parfois des années après le déploiement. Là encore il est crucial de choisir des composants et des enterprises reconnues et fiables qui assurent le suivi pour ces équipements hautement stratégiques.

L'IA est un moyen viable de réduire la demande de bande passante en liaison descendante tout en permettant une prise de décision beaucoup plus rapide - dans certains cas en temps réel - à partir des données acquises par les capteurs du satellite. Elle peut être mise en œuvre efficacement dans des solutions qui existent déjà sur le marché, pour exploiter pleinement tout le potentiel de l’espace.

Par Ken O’Neill, Space Systems Architect chez AMD