La science, et par conséquent le recours extensif aux technologies, est un trait caractéristique de la civilisation du savoir. Elle rassemble l’ensemble des moyens cognitifs pour conduire à son terme un projet technique, qu’il s’agisse de techniques reposant sur un savoir scientifique axiomatisé, d’art, d’artisanat ou de techniques heuristiques issues de l’expérience. Selon cette définition, et alors que jusqu’à l’arrivée de l’informatique, de l’IA en particulier, les moyens cognitifs étaient exclusivement humains, ils se partagent actuellement entre moyens humains et moyens synthétiques.
Bien qu’elle soit plébiscitée par certains pour ses capacités à traiter et synthétiser un grand nombre d’informations rapidement, donc à améliorer la productivité, l’IA reste entourée de craintes. La valse-hésitation observée entre bannissement puis acceptation, à l’échelle de l’entreprise ou d’un pays, en est une illustration flagrante. Les collaborateurs français sont plus mesurés (que leurs homologues d’autres pays) sur leur perception quant aux aspects positifs que peut apporter l’IA sur leur emploi, tel est l’un des principaux enseignements de l’étude Global Workforce Hopes and Fears de PwC, qui analyse les attitudes et comportements de près de 54 000 salariés, issus de 46 pays et territoires, dont plus de 2 100 Français.
À une époque où la crise de sens et la grande démission entraînent un accroissement des exigences des salariés, l’IA est perçue de différentes manières. Certains salariés, d’accord avec leurs dirigeants, la voient comme un outil puissant qui peut les aider à améliorer leur productivité et leur efficacité. Comme les machines du 19e siècle ont soulagé les ouvriers de travaux pénibles, elle peut prendre en charge des tâches routinières et répétitives, ce qui permet aux salariés de se concentrer sur des tâches plus stratégiques et enrichissantes. De plus, elle s’ajuste parfaitement au modèle productiviste grâce à l’automatisation.
C’est ce qui expliquerait la différence de perception entre les dirigeants et leurs employés. Bien que le développement technologique soit l’une des trois principales priorités des chefs d’entreprise français, selon l’étude CEO Survey de PwC, les employés français ne partagent pas entièrement cet enthousiasme. Ils sont particulièrement préoccupés par l’impact de l’intelligence artificielle sur leur travail. Seulement 27 % pensent qu’elle n’aura pas d’effet sur leur carrière dans les cinq prochaines années, un sentiment plus prononcé dans les secteurs de la santé (37 %) et le secteur public (36 %).
Les milléniaux et Gen Z anticipent un impact sur leur carrière
Il est important de noter que les jeunes générations sont généralement plus enclines à anticiper un impact de l’IA sur leur carrière, tant au niveau mondial qu’en France. Seulement 14 % des membres de la Génération Z et 17 % des Millenniaux pensent que l’IA n’aura pas d’incidence sur leur avenir professionnel.Selon l’étude, les travailleurs qualifiés sont plus confiants quant à leur avenir, avec plus de la moitié (51 %) prévoyant une évolution significative des compétences nécessaires à leur travail dans les cinq prochaines années. De plus, ils sont convaincus que leur employeur les aidera à développer les compétences numériques, analytiques et collaboratives dont ils auront besoin.
Conscients des enjeux, les employés français reconnaissent l’importance de développer leurs compétences non techniques, et font confiance à leur entreprise pour les soutenir dans cette démarche. Cependant, seuls 29 % pensent que les compétences en matière d’ESG seront importantes pour leur carrière au cours des cinq prochaines années.
Malheureusement, des méthodes de recrutement obsolètes peuvent entraver la mobilité des talents. Environ un tiers (35 %) des travailleurs qualifiés admettent avoir raté des opportunités d’emploi faute de connaître les bonnes personnes à contacter pour postuler. De plus, 35 % d’entre eux estiment avoir des compétences qui ne sont pas clairement mises en valeur sur leur CV ou dans leur parcours professionnel. Selon une étude récente du Forum économique mondial en collaboration avec PwC, la mise en place de marchés du travail axés sur les compétences pourrait créer 100 millions d’emplois à travers le monde.