La pandémie qui secoue la planète a soulevé de multiples défis dans tous les secteurs d’activité. Pour sa part, le domaine des technologies de l’information a été atteint du syndrome « du beurre ou de l’argent du beurre » : d’une part, les hauts dirigeants sont à juste titre devenus prudents dans la gestion de leur budget, adoptant une approche réfléchie dans un contexte économique particulièrement incertain ; d’autre part, ils souhaitent continuer à innover, avec en ligne de mire une « transformation numérique » aussi insaisissable que convoitée.
À titre d’illustration, 80 % des personnes interrogées dans le cadre d’une enquête récemment publiée par IDG estiment que la pandémie a accéléré les attentes en matière d’innovation. Dans le même temps, nombre d’entre elles ont dû répondre à cette exigence avec les moyens du bord : plus de la moitié (52 %) indiquent que la pandémie a entraîné, du moins dans une certaine mesure, une baisse des budgets informatiques.
Cette situation a de quoi rendre perplexes nombre de DSI. Il est en effet difficile de gagner sur les deux tableaux. Quoi que…
C’est ce défi de taille que les DSI doivent à présent relever : comment innover en dépit des contraintes imposées par la pandémie ? J’ai travaillé avec de nombreuses entreprises de toutes dimensions, dont l’excellente feuille de route informatique a été réduite à néant par une catastrophe nommée COVID-19 qui a amené les DSI à TOUT évaluer et à TOUT prioriser. Par exemple, des projets de grande ampleur tels que la refonte ou le remplacement d’un ERP sont mis en standby— parfois abandonnés — en ballotage défavorable avec d’autres initiatives plus importantes pour l’entreprise et qui requièrent les mêmes ressources (main-d’œuvre, temps, budget). Les DSI s’interrogent à propos des initiatives les plus significatives en cette période de crise, et faute d’un retour sur investissement irréfutable, nombre d’entre elles sont reportées sine die.
Le travail d’un DSI consiste en partie à gérer les attentes « métier » de son entreprise. J’ai récemment discuté avec le responsable d’une grande enseigne qui souhaitait migrer vers la version cloud de l’ERP d’un éditeur de renom, mais dont le dossier ne tenait pas vraiment la route. Le DSI doit aider son entreprise à comprendre qu’un projet d’une telle envergure n’est en rien comparable au redémarrage d’un smartphone après la mise à jour du système d’exploitation. Une migration de cet ordre peut prendre de deux à cinq ans et se chiffrer en millions de dollars. En d’autres termes, le jeu doit vraiment en valoir la chandelle.
Face à ces circonstances a priori contradictoires, comment les DSI peuvent-ils reprendre le contrôle de la feuille de route IT de leur entreprise ? Pour commencer, voici trois pistes que je leur suggère de suivre :
1. Collaborer étroitement avec la partie métier des opérations. Par le passé, les DSI et leurs équipes informatiques étaient responsables des décisions technologiques et les prenaient sans en référer à qui que ce soit. Ce n’est plus le cas. Pour résoudre un problème avec la partie métier de l’entreprise, il ne suffit plus de fournir une application. Il est impératif que les DSI communiquent étroitement avec les décideurs métier pour comprendre leurs besoins et l’issue attendue.
Parmi les nombreux projets technologiques auxquels j’ai pris part au fil des années, les plus aboutis demeurent sans conteste ceux où les équipes IT et métier ont collaboré pour obtenir les résultats visés. Une société de télécommunications pour laquelle je travaillais au Canada a démontré que la recette du succès reposait sur l’optimisation de sa chaîne d’approvisionnement et la disponibilité des produits dans ses boutiques. Les équipes IT et métier ont travaillé main dans la main pour concevoir les processus et la technologie sous-jacente nécessaires pour atteindre cet objectif. Il semble fort heureusement que de nombreuses entreprises l’aient compris et qu’elles nouent de solides relations entre les responsables métier, les directeurs financiers (CFO) et les DSI.
2.Concentrez-vous en priorité sur les gains immédiats (mais à fort impact) qui favorisent l’innovation. Selon une habitude par trop fréquente, les acteurs métier qui n’apprécient pas un système ou un processus ont tendance à s’en débarrasser sans autre forme de procès. « Ça ne fonctionne pas » est une réponse que de nombreux DSI entendent trop souvent. Pour couronner le tout, certains éditeurs de logiciels excellent à faire croire aux hauts dirigeants qu’ils ont besoin de la technologie la plus récente et la plus performante. Dans le pire des cas, le DSI devient la victime collatérale d’une décision venue d’en haut. Certes, les acteurs métier aiment les pièces montées, mais par les temps qui courent, ils devraient se contenter de chouquettes !
De leur côté, les DSI doivent se concentrer sur les projets à fort impact qui contribuent à la progression de leur entreprise. À l’heure actuelle, les grands projets de refonte d’ERP ne courent pas rues, les entreprises privilégiant les gains à court terme. Je collabore en ce moment avec un grand opérateur de télécommunications qui a toujours eu un temps d’avance sur le plan de la transformation numérique. Cette société a récemment réussi à mettre en place un processus spécifique qui lui a permis de préserver son agilité et d’augmenter le nombre de ses abonnés dans un environnement de marché pour le moins imprévisible. Il ne faut pas oublier que les effets d’un « gain immédiat » peuvent varier d’un secteur à l’autre. Dans le commerce de détail, il s’agira par exemple d’améliorer l’expérience des acheteurs en ligne dans une période où la plupart des boutiques ont baissé leur rideau.
3. N’oubliez jamais que les utilisateurs et les clients sont les véritables moteurs de vos recettes. Je conseille souvent aux entreprises en quête de gains immédiats de se concentrer sur l’expérience client. En consacrant une partie de votre budget informatique à des décisions qui contribueront à optimiser l’expérience vécue par les utilisateurs et les clients, vous augmenterez le niveau de satisfaction, sans parler de votre résultat net.
J’ai collaboré par le passé avec un distributeur de produits chimiques qui voulait faciliter l’achat de ses produits. Tout le monde considère qu’Amazon représente l’étalon or en la matière, et l’entreprise en question a investi dans la plateforme du géant de Seattle pour créer une expérience d’achat optimale. Parmi ses nombreux clients figuraient des agriculteurs et des fabricants de pesticides. L’entreprise a alors déployé un système permettant de chercher un insecte sur son site Web, puisde cliquer sur le lien correspondant pour afficher la combinaison de produits chimiques nécessaire à leur élimination. Cette approche innovante s’est avérée très utile pour les clients, les incitant même à revenir sur le site.En effet, les agriculteurs achetaient les produits dont ils avaient besoin pour la saison de croissance et, plus tard, commandaient les produits chimiques nécessaires pour protéger leur récolte.
En fin de compte, deux choses sont aujourd’hui sûres et certaines :les retombées de la pandémie ne cesseront pas de sitôt, pas plus que notre volonté d’innover. Dans cet environnement, il importe plus que jamais que les DSI agissent avec clairvoyance. De manière générale, l’établissement de relations solides avec les décideurs et la quête de solutions aussi rapides qu’efficaces —sans jamais perdre de vue la satisfaction des clients—forment une combinaison gagnante qui vous aidera à atteindre vos objectifs.
Par Jennifer Perry, vice-présidente, Déploiement des services SAP à l’international chez Rimini Street