Le second semestre 2020 annonce déjà la tourmente pour bon nombre d’entreprises. Evoluera-t-elle vers une reprise économique ? Dans le meilleur des cas, elle ne sera ni rapide, ni facile. Le secteur informatique ne fait pas exception. Gartner a récemment publié une nouvelle version de ses prévisions mondiales pour le secteur concernant la deuxième moitié de l'année. En janvier, le cabinet annonçait que les dépenses informatiques à l'échelle mondiale passeraient de 3,8 billions de dollars en 2019 à 3,9 billions en 2020. Désormais, il prévoit que les anciens indicateurs de croissance (notamment en matière de vente d'appareils et de technologie cloud) ne parviendront pas à contrebalancer une baisse de 8 % des dépenses globales par rapport à 2019.
Certes, la France et l’Europe commencent à ressentir les effets du déconfinement, les entreprises veulent aller de l’avant, tout en devant faire face à une situation dont on ne sait dire quand elle sera définitivement derrière nous. Qu’en est-il pour le secteur IT ?
Des budgets informatiques gelés
On constate actuellement une augmentation des ventes dans le secteur informatique, en grande partie en raison de la hausse des ventes d'infrastructures et d'appareils pour travailler à distance. Il s'agit d'une bulle temporaire sur laquelle nous ne devons pas fonder nos prévisions pour le reste de l'année. En réalité, les directeurs financiers vont probablement geler les budgets IT et ne réaliser que les achats essentiels. Les projets ne seront approuvés que s'ils permettent de faire des économies à grande échelle et de manière immédiate, comme les consolidations d'infrastructure.
Une étude Apec révèle également que les emplois des cadres – et notamment les services informatiques, l'ingénierie R&D et les activités de conseil – connaissent une baisse de 34 % de leurs recrutements par rapport à il y a un an. Sans la possibilité de recruter, les équipes auront besoin de compter encore plus sur une infrastructure efficace pour continuer à mener à bien leurs projets. Les services externalisés étant les plus touchés, c’est aussi une baisse dans la cadence des projets qui se profile alors même que les leviers de développement de l’activité pourront faire la différence sur le marché.
En infrastructure, un retour aux « îlots » technologiques ?
En ce qui concerne l'infrastructure, il faut s'attendre à voir de nombreuses organisations mettre en place une approche à plusieurs niveaux. Les applications essentielles bénéficieront d'une infrastructure de stockage à coût élevé, afin de garantir leur disponibilité et leurs performances, tandis que les applications d'importance moindre devront se contenter d'une infrastructure moins aboutie et à moindre coût. Durant les périodes les plus difficiles, les directeurs financiers ressentiront sans doute le besoin d'établir des priorités, de consacrer leurs dépenses aux ressources vitales et de faire des compromis, lorsque c'est possible, afin d'essayer de faire des économies.
Une conjoncture économique incertaine, ainsi que la volonté de réduire les dépenses pour se concentrer sur les projets fondamentaux, peuvent provoquer l'apparition d'une stratégie d'achats d'infrastructure problématique et même financièrement dangereuse à long terme. En ces temps incertains, de nombreuses entreprises peuvent décider d'acquérir une infrastructure ad hoc au lieu de planifier leurs besoins sur les années à venir. L'approche « à plusieurs niveaux » mentionnée plus tôt pourrait nous ramener des années en arrière, à l'ère des « îlots » technologiques, avec la mise en place d'une multitude de systèmes et d'outils de gestion. Cette situation entraînera une perte de temps, un gaspillage de la main d'œuvre et des ressources, ainsi que l'allongement du délai de traitement de chaque projet. En essayant de faire des économies en matière d'infrastructure, les entreprises fonctionneront plus lentement et risqueront en réalité de perdre leur avantage compétitif.
Un besoin accru de flexibilité, pour se préparer à l’éventualité d’une deuxième vague de l’épidémie
Nous pourrions bien faire face à une deuxième vague de COVID-19 à tout moment. Bien que les entreprises sachent que leur infrastructure doit être prête pour la deuxième vague, les budgets ne permettent pas véritablement de les évaluer et de les optimiser, ce qui les expose à nouveau à des risques.
Pour assurer leur réussite au second semestre 2020 tout en se préparant à une éventuelle deuxième vague de l'épidémie, les entreprises doivent réfléchir à leur stratégie d'acquisition en matière d'infrastructure de stockage.
Même si le cloud permet un accès immédiat à l'infrastructure sans passer par une phase d'acquisition complexe, cette technologie constitue une dépense d'exploitation (OpEx) plus élevée. La plupart des entreprises préfèrent tout de même investir dans les dépenses en capital (CapEx) qui leur permettent d’optimiser l’utilisation des assets et d’améliorer leur compétitivité. Selon les DSI, leurs analyses présentent les dépenses dans le cloud comme étant de 2 à 6 fois plus onéreuses que les dépenses dans leurs datacenters on-premise (en fonction de ce qui est comparé), tendance qui se reflète également dans les prévisions révisées de Gartner.
Les entreprises se retrouvent confrontées à un dilemme en ces temps difficiles. Elles veulent tirer parti des avantages du cloud, augmenter leurs ressources informatiques lorsque la demande est là et les diminuer dans le cas contraire. Toutefois, sur le plan financier, elles préfèrent tout de même faire davantage d'investissements en mode CapEx.
Le cloud hybride encore plus sollicité
La solution pourrait venir de la combinaison des deux modèles d'acquisition d'infrastructure. En effet, de nombreuses entreprises ont des systèmes hybrides composés de clouds public et privé. Comme le cloud privé est moins cher et permet l'intégration de dépenses CapEx ou OpEx en fonction des préférences de chaque société, il est largement possible de réaliser des économies et de gagner en efficacité si (et seulement si) l'organisation parvient également à utiliser le cloud public de manière flexible. Les systèmes de stockage entièrement flexibles, qui associent les capacités du cloud public (augmentation instantanée, paiement à l'utilisation) aux avantages du cloud privé (choix entre dépenses CapEx, OpEx ou une combinaison des deux à coût moindre), seront au cœur de la demande des entreprises dans un avenir proche.
L’agilité opérationnelle, en plus de la flexibilité commerciale, est un objectif que les fournisseurs devront atteindre dans l'année à venir. Les entreprises vont avoir de plus en plus besoin d'acquérir une infrastructure de court terme et d'en modifier leur utilisation à n'importe quel moment, et non au bout de quelques années, comme lorsqu'elles achetaient d'énormes infrastructures de stockage pour plusieurs millions d’euros. En ces temps incertains, les entreprises seront obligées de rendre leurs systèmes de stockage plus flexibles pour ne pas se retrouver limitées à un seul choix.
Par Jean-Philippe Pouquet, Enterprise Sales Manager France, Infinidat