Les choses changent, les technologies clés de l’Internet des Objets s’éloignent de l’informatique.
Si l’on observe l’entreprise traditionnelle telle qu’elle s’affiche devant nous depuis des décennies, le pouvoir technologique appartient au département informatique. Ce qui peut se traduire très simplement : c’est l’informatique qui décide des achats d’équipements et logiciels, qui centralise la donnée et pilote les datacenters, qui assure les connexions, et aujourd’hui le cloud.
Le monde change, l’informatique aussi
Mais voilà que ce monde établi est en train de changer. Les métiers prennent plus d’indépendance, ils décident et s’équipent d’outils IT sans en référer à la DSI, ce qui génère le phénomène du Shadow IT. Pour autant, la DSI demeure référente et conserve le pouvoir, quand ce n’est pas la nécessité d’intervenir dans les processus ou de se les réapproprier.
Seulement, dans un monde où quasi tout se connecte à l’IT, qui devient le terreau incontournable de l’outillage, des échanges et de l’innovation, la technologie commence clairement à échapper à la DSI, qui devra bien finir par reconnaître son incapacité à piloter l’ensemble, moins par une définition de la périphérie de l’informatique que par la présence de compétences qui lui échappent.
L’IoT en vecteur du changement
C’est dans le monde de l’Internet des Objets, l’IoT, que le phénomène est certainement le plus engagé. Dramatiquement engagé pour la DSI, devrions-nous dire, car si les objets se connectent via l’Internet et ses supports, et si les processus qui l’opèrent appartiennent aux technologies, ils n’appartiennent plus aujourd’hui, pour la plupart d’entre eux, au jardin clos de l’IT, mais s’épanouissent en dehors de la DSI !
Une étude américaine de Technalysis Research, réalisée en mars dernier auprès d’entreprises moyennes à grandes, vient confirmer ce mouvement. Elle demandait simplement quel service est responsable de l’IoT dans l’entreprise ? Et le résultat est doublement sans appel pour la DSI, qui dans les réponses affiche la perte de son leadership :
- 42,4 % - Equipement /Opérations, fabrication (manufacturing)
- 33,0 % - DSI
- 25,6 % - Métiers et stratégie business
Une remarque est importante ici, le plus grand nombre de participants à l’enquête, 44% des 620 professionnels interrogés, appartient à la DSI ! En d’autres termes, interrogés sur l’IoT, les membres de la DSI reconnaissent que ce domaine leur échappe, tout comme la gestion des projets et initiatives d’une technologie importante pour l’avenir des entreprises.
IoT Driven : changement aux implications profondes
Si la segmentation est logique, les implications de l’IoT sont multiples et concernent profondément l’exercice des métiers de l’entreprise. L’intelligence et le contrôle pilotés par l’IoT tombent dans l’escarcelle des métiers, et plus de la DSI.
Le phénomène de l’« IoT Driven » n’en est qu’à ses prémices, mais déjà il implique des changements profonds ! Avec pour certains observateurs un impact au caractère 'sismique' sur beaucoup d’organisations. Surtout, il est la confirmation que la technologie est désormais transverse, et à ce titre appartient à tous les départements de l’entreprise.
La DSI, entre perte de pouvoir et dérive
C’est pourquoi, avec le contrôle et la gestion des IT qui se diffusent largement dans l’entreprise, le statu quo maintenu depuis des décennies va éclater au profit des directions stratégiques et métiers, ce qui pourrait sonner le glas de la puissance de l’informatique. De quoi en revanche mener à une foule de luttes internes au sein de certaines entreprises…
L’autorité de l’informatique et de la DSI, déjà mise à mal par des pratiques qui lui échappent, va également se traduire par la nécessité de développer des architectures et des processus qui prennent en compte la dispersion des sources de données qu’elle ne contrôle plus, ce qui ne pourra que complexifier sa mission. De quoi imposer une réflexion d’urgence sur son devenir et sur l’intégration des technologies de dernière génération qui lui échappent en partie…
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