Pour capitaliser sur le succès de l’IA générative, les acteurs de la chaîne d’approvisionnement cherchent les moyens de monétiser ces services par la collaboration au sein d’écosystèmes allant du conseil à la gestion des opérations et l’optimisation.

L’IA générative restera dans les annales du numérique comme la révolution de l’année 2023. L’utilisation de l’intelligence artificielle générative, sur le marché des consommateurs grand public de surcroît, a grimpé en flèche, principalement alimentée par l’essor des puissantes API publiques comme ChatGPT. L’effet d’entraînement provoqué par cette soudaine popularité a débordé sur des segments de marché qui sont des candidats naturels à l’adoption de l’IA. C’est le cas de la chaîne d’approvisionnement, dont les acteurs « sont dans une effervescence inhabituelle pour exploiter les promesses de l’IA et accéder aux opportunités commerciales dans le segment de l’entreprise ». Ceci à tous les niveaux : de la recherche fondamentale au développement de nouveaux produits et d’offres, jusqu’aux considérations réglementaires.

Un rapport récemment publié par ABI Research estime que le taux de croissance annuel composé du marché de l’IA devrait atteindre 162 % d’ici à 2030, conduisant à un potentiel de revenus proche de 60 milliards de dollars pour les acteurs de la chaîne d’approvisionnement. Mais un défi subsiste selon Reece Hayden, analyste principal chez ABI Research. Il estime que « bien que nous observions une demande et une utilisation croissantes d’applications comme ChatGPT, il est important de noter que leurs coûts opérationnels, qui s’élèvent actuellement à environ 500 000 dollars par jour, sont élevés et devraient augmenter avec l’utilisation croissante ». En somme, les coûts d’un moteur d’IA générative nécessitent des financements de fonctionnement qui sont hors de portée pour la plupart des acteurs de la chaîne d’approvisionnement.  

Comment monétiser les LLM

Certains acteurs ont amorti ces coûts grâce à des injections de capital-risque et d’autres financements d’origine externe. Cependant, comme le souligne Hayden, « ce n’est pas un modèle durable à long terme. Il est impératif de trouver des stratégies efficaces de génération de revenus, à la fois dans les secteurs des consommateurs et des entreprises ».

Toutefois, malgré l’attractivité des modèles gratuits, leur rentabilité dans la durée, en particulier dans le segment entreprise, reste discutable, estime ABI Research. Ces modèles ne sont pas non plus adaptés au marché des entreprises, souligne Reece Hayden. Même s’il sera difficile d’abandonner ce modèle, la bonne nouvelle est que de nombreuses possibilités de monétisation peuvent s’appliquer à l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. Les parties prenantes peuvent chercher à mettre en œuvre des modèles basés sur la publicité tels que ceux utilisés par les moteurs de recherche, des modèles de partage des revenus qui ont fait leurs preuves dans des domaines adjacents tels que les places de marché dans le cloud, ou même chercher à produire des LLM à code source ouvert avec des fonctions d’entreprise à code source fermé. « Mais il est essentiel que les parties prenantes alignent soigneusement leurs capacités sur un modèle de revenus, car certaines d’entre elles pourraient ne pas être adaptées à l’objectif », préviennent les rédacteurs du rapport.  

Faciliter l’adoption par les entreprises

Hayden souligne l’importance d’orienter ces stratégies vers la facilitation de l’adoption par les entreprises. Il observe que de nombreuses entreprises sont actuellement mal équipées en termes d’outils et d’expertise en apprentissage automatique, et une stratégie holistique pour les aider dans le déploiement de l’IA serait essentielle. C’est pourquoi M. Hayden recommande que « les acteurs de la chaîne d’approvisionnement cherchent à fournir des services de conseil ou à créer des plateformes low ou no-code qui prennent en charge le développement, le déploiement, la mise au point, l’optimisation, la gestion des changements opérationnels et les opérations du deuxième jour ».

C’est ce qui explique les écosystèmes qui se mettent en place actuellement. Des entreprises de conseil, comme Bain, McKinsey et BCG, ont rejoint les intégrateurs de systèmes par le biais de partenariats avec des propriétaires de modèles de base comme OpenAI. À l’avenir, la partie de la chaîne d’approvisionnement consacrée aux services d’entreprise pourrait valoir plus de 15 milliards de dollars américains d’ici 2030. « Il y a ici une riche opportunité pour les acteurs de proposer des services de conseil ou de concevoir des plateformes faciles à utiliser qui répondent aux besoins des entreprises », note-t-il.  

Un paysage également façonné par la sécurité

Bien entendu, les préoccupations sécuritaires et de confidentialité liées aux données façonnent également ce paysage en évolution. Hayden souligne le fort intérêt pour les entreprises compétentes dans le traitement de données d’entreprise ou la génération de bases de données synthétiques. Les activités récentes de collecte de fonds, comme les
25 millions de dollars levés par Mostly AI ou les impressionnants 85 millions de dollars récoltés par Snorkel AI avec une valorisation stupéfiante d'un milliard de dollars, en témoignent.

Pour conclure, Hayden estime qu’il « ne s’agit pas simplement d’identifier de nouveaux modèles de revenus. Construire des partenariats solides, créer des produits qui privilégient le déploiement B2B et défendre un développement responsable de l’IA sont tout aussi essentiels ».