Parmi les facteurs qui freinent l’exploitation des données, le multicloud représente un silotage à sa manière. Au lieu d’un environnement transparent où le transfert des données entre clouds est « sans dépendance, ni limites, ni frais de migration », il présente un paysage fragmenté de dépôts distincts. Désormais, en matière de cloud, la maturité des entreprises ne se mesure plus au nombre de fonctions transférées dans le « nuage », mais à leur capacité à maîtriser la chaîne de la donnée ainsi que les coûts liés à celles-ci, et à en tirer des bénéfices en termes d’innovation. Les nouveaux concepts d’entreprise data driven et de pipelines de données structurent l’évolution du SI des entreprises. La promesse est de pouvoir baser ses décisions sur des analyses extensives des données. Ainsi, les entreprises data driven repèrent les tendances plus tôt que leurs concurrents et peuvent faire des projections plus précises dans l’avenir. Cependant, malgré les efforts et les plans volontaristes, les retours du terrain montrent une difficulté récurrente à gérer et synchroniser toutes les sources de données, ceci sans s’appesantir sur l’impossibilité chronique de certaines entreprises à aligner tous les facteurs de réussite : désilotage, mise en place d’une infrastructure unifiée pour minimiser la prolifération des solutions, des agents et des interfaces d’administration, gestion du changement… Dans une étude qui dénote par rapport à celles qui se contentent d’enregistrer les nouveaux usages pour prédire l’avenir, Seagate met l’accent sur la complexité du cloud et son silotage qui empêchent les entreprises d’exploiter la donnée correctement.  

Le véritable multicloud « n’existe pas encore »

L’enquête mondiale a été réalisée en février 2022 par ESG (Enterprise Strategy Group) auprès de 500 personnes, dont 71 % occupaient un poste élevé dans le domaine informatique et 29 % dans le développement de logiciels ou l’analyse de données. Au moins une partie des données de leur entreprise était stockée dans un cloud public ; 24 %de ces entreprises étaient des PME comptant moins de 1 000 employés, les autres (76 %) étaient de grandes entreprises de plus de 1 000 employés, et toutes géraient au moins 1 Po de données non structurées. Avant de rentrer dans le vif du sujet, les rédacteurs de l’étude rappellent la nécessité du multicloud : « Que cela nous plaise ou non, il est souvent nécessaire d’adopter une stratégie multicloud pour dégager une valeur commerciale des données ». Mais de quel multicloud s’agit-il ? Pour Ravi Naik, DSI et directeur général adjoint des services de stockage chez Seagate, « Idéalement, le multicloud est un environnement dans lequel les charges de travail des données peuvent facilement être importées dans un cloud, exportées d’un cloud, ou transférées d’un cloud à l’autre, à la demande, sans dépendance, limites, ni frais de migration ». Cependant, explique-t-il, si nous nous conformons à cette définition, « cet environnement n’existe pas à l’heure actuelle ». Selon le rapport, la part des entreprises utilisant plus de quatre fournisseurs d’infrastructure cloud progresse rapidement, elle représente aujourd’hui une part de 30 %. L’enquête révèle qu’elle aura plus que doublé et représentera 63 % d’ici deux ans.  

L’environnement naturel des données est le multicloud transparent

En somme, l’un des écueils est structurel, car le pseudo multicloud actuel « crée une dépendance qui emprisonne les données, alors qu’elles sont, ironiquement, la raison d’être de tous ces clouds. Ces données perdent ainsi leur valeur commerciale ». Selon le rapport, le paysage actuel du cloud est formé de différents clouds qui co-existent. Ces divers « dépôts de l’écosystème multicloud sont délimités par de véritables murailles. Il est simple d’y importer des données, mais les extraire est une tout autre histoire. Les clouds ne communiquent pas bien entre eux. Dans ces conditions, les entreprisesont des difficultés à choisir une plateforme et à en changer quand elles en trouvent une meilleure », affirme le rapport. Dans l’idéal, le multicloud serait vu comme un seul cloud avec des transferts transparents, un cloud unifié en quelque sorte, mais ce n’est pas du tout la réalité à laquelle sont confrontées les entreprises. Sans surprise, 76 % des répondants estiment qu’il est compliqué de contrôler, mesurer et faire appliquer les contrats de niveau de service pour les applications qui dépendent des intégrations « intercloud ». De plus, les coûts liés aux données amplifient davantage la complexité de l’écosystème. « Ils contribuent au verrouillage de l’accès aux données et, au bout du compte, nuisent à l’innovation », affirme le rapport. En effet, 73 % des répondants expliquent que les coûts de conservation des données rebutent leur organisation et limitent sa capacité à optimiser la valeur des données. De plus, les données et les informations permettant de résoudre les problèmes les concernant se perdent dans le brouillard que forme le multicloud. La difficulté la plus citée est l’impossibilité d’identifier l’origine des problèmes quand ils sont détectés (pour 30 % des participants). Ils sont 64 % à indiquer que des échecs d’intégration des applications interclouds engendrent des problèmes bloquants au moins une fois par mois.