À deux ans de l’entrée en vigueur de la réforme fiscale 2024-2026, le chantier de la dématérialisation des factures est au point mort dans les entreprises. Environ un quart d’entre elles ne connaît ni la date ni les modalités de l’entrée en vigueur de la nouvelle règlementation.

Les changements réglementaires et technologiques de ces dernières années posent de sérieux défis aux départements financiers et comptables. Il faut dire que les évolutions se bousculent au portillon à l’ère de l’entreprise dématérialisée et « Data driven ». Le marché est tiré par la multiplication des obligations réglementaires, la nécessité des retours sur investissement rapides, la présence de solutions de plus en plus matures et l’urgence de rendre les processus plus résilients face aux crises et aux incertitudes.

De tous ces facteurs, la pression réglementaire est la plus prégnante, car elle fixe les échéances. En adoptant la loi de finances rectificative pour 2022, le législateur vient d’établir le calendrier et les modalités de mise en œuvre de la réforme fiscale 2024-2026.De fait, aux défis quotidiens inhérents à leur charge (contrôle des budgets, gestion des flux financiers…),les services financiers doivent intégrer de nouveaux outils qui les obligent à composer avec de nouveaux enjeux, qui sont amplifiés par l’accélération de la transformation numérique.

La réforme fiscale et son calendrier de déploiement restent mal connus

Appliqué à la dématérialisation des factures, le constat de l’impréparation des entreprises est indubitable, d’après une étude de Best Practices, la plateforme de bonnes pratiques et d’expertises IT, et de Generix Group, l’éditeur de solutions SaaS collaboratives. Selon les chiffres recueillis, la réforme fiscale 2024-2026 et son calendrier de déploiement restent mal connus par les entreprises : 22,5 % des entreprises interrogées n’ont pas connaissance que cette réforme impose, entre autres, la facturation sous format électronique.

Pire encore, au-delà de la méconnaissance de la réforme, les entreprises n’ont pas une vision claire des différentes étapes du déploiement de cette dernière. En effet, 40 % des entreprises ne savent pas quand elles auront l’obligation d’émettre des factures électroniques, tandis que 41,3 % ne savent pas quand elles devront déployer les outils pour recevoir des factures sous format électronique. Et plus de la moitié des entreprises interrogées (58,2 %) n’a pas connaissance de la date à laquelle elles devront respecter leurs nouvelles obligations en matière de transmission des données complémentaires. Le constat est accablant, car, au-delà de la méconnaissance des modalités et du calendrier, c’est la proportion de ceux qui « ne savent pas » qui est inquiétante.

« L’ensemble des indicateurs de déploiement est à l’arrêt »

En comparant les chiffres d’adoption des solutions d’Account Payable Automation de la précédente édition de l’étude, datant de deux ans, les experts de Generix notent que « l’ensemble des indicateurs de déploiement est à l’arrêt ». « Nous faisons face à une réelle antinomie dans l’approche de la facturation électronique, commente Christophe Viry, directeur marketing produit chez Generix Group. Bien que les avantages et gains associés à celles-ci soient irréfutables, son adoption stagne. Cette stagnation rappelle la nécessité de la mise en place d’une contrainte réglementaire pour une digitalisation complète de la facturation en France. Ses bénéfices sont d’ailleurs d’ores et déjà perçus par les entreprises : elles sont notamment largement favorables au préremplissage de la déclaration de TVA, voire au prélèvement à la source ».

Il est vrai que la transformation numérique accélérée, les impératifs de cybersécurité, l’intégration des bonnes pratiques RSE, en bref tous les changements qui affectent l’informatique d’entreprise, ses processus et ses méthodes, laissent peu de place aux autres solutions. De plus, l’inflation fonctionnelle des applications ajoute à la confusion et multiplie les couches applicatives. Par exemple, les logiciels de facturation gèrent de plus en plus de périmètres adjacents comme l’AP Automation ou le paiement. Aussi, il est difficile de délimiter le contour des solutions et de les comparer. Les éditeurs de solutions y incorporent des fonctions de provenances connexes comme l’OCR, la gestion des fraudes, les approvisionnements, la gestion de la trésorerie… ce qui entraine de la confusion pour les entreprises.