De l’ordinateur au smartphone, les innovations technologiques majeures suivent en général un chemin en trois étapes. Au commencement, la technologie est Nice to have : il est agréable de l’adopter, pour des raisons de représentation comme d’usage. Vient ensuite le temps du Must have, c’est-à-dire celui où la technologie crée de la valeur. Enfin, il y a le Only to have, le temps où l’objet est un prérequis.
L’IA Générative : encore quelques limites
L’Intelligence artificielle générative (IA Gen) s’inscrit à l’évidence dans cette dynamique. L’observation du marché de la veille stratégique montre que de nombreuses entreprises oscillent actuellement entre le Nice to have et le Must have. Cet entre-deux procède d’une vision fluctuant entre limites et avancées de l’IA générative. Commençons par les premières. Les quantités d’informations ingérées et traitées par l’IA embarquée dans les outils de veille demeurent circonscrites. La technologie déployée interroge également dans la mesure où elle n’est ni française, ni européenne. Quid des données collectées ? Voilà un sujet que les Codir prennent au sérieux lorsque l’IA est utilisée avec une API et est non intégrée aux architectures internes. Un dernier bémol est enfin visible, lié aux étapes de vérification déployées actuellement par les organisations : confrontées à l’IA Gen, les entreprises mettent en place des process afin de valider les résultats obtenus. Ici, l’être humain manifeste encore le besoin d’être rassuré, ce qui au passage peut parfois se révéler très chronophage.Des atouts majeurs, à commencer par le gain de temps
Pour autant, l’IA générative séduit la communauté des veilleurs, qui a vite compris combien celle-ci générait de la valeur et constituait ainsi un Must have : une technologie à utiliser. Les gains observés sont pluriels. L’IA Gen répond tout d’abord à des questions précises, sur des sujets pointus. Elle permet d’effectuer des résumés et des rapports de synthèse de manière automatisée, et aussi de réaliser des traductions fiables et de haut niveau.Mais c’est surtout sur le gain de temps que les professionnels de la veille insistent. La technologie permet par exemple d’effectuer la synthèse d’un texte A4 en quelques secondes, alors qu’il faut au veilleur entre 15 et 20 minutes pour effectuer cette tâche… Des heures précieuses se trouvent ainsi libérées, que les professionnels de la veille peuvent capitaliser en se consacrant à des actions de réflexion stratégiques.
Nous avons tous été surpris –parfois désarçonnés – par l’émergence de l’IA Gen. Des veilleurs aux éditeurs de logiciels, il a fallu prendre la mesure de la rupture technologique qui se présente. Dans la phase où nous sommes actuellement (du Nice to have au Must have), la prise de connaissance et la pédagogie sont des actions nécessaires. Il convient de s’éduquer et de s’acculturer collectivement, que ce soit par rapport aux risques que l’IA Gen nous fait courir ou aux gains qu’elle propose.
Dans cette réflexion, une dimension est acquise, qui ne l’était pas, il y a de cela encore quelques mois : nous ne sommes pas face à une problématique de remplacement de l’homme par la machine, mais face à une avancée qui est en passe d’être adoptée par une grande partie de la communauté professionnelle des veilleurs. Pour les organisations, le temps de l’adaptation est bel et bien engagé. Il sera passionnant, dans les mois à venir, de continuer d’observer de quelle manière l’ère du « must have » se déploie.
Par Arnaud Marquant, Directeur des opérations chez KB Crawl SAS