Cela s’illustre déjà avec le retrait-gonflement des argiles (RGA) à cause de la sécheresse : la nature des sols et le type de construction impactent drastiquement la nature du risque à couvrir pour les biens situés en zone argileuse. L’indemnisation de ces dommages par le fonds catastrophes naturelles fait débat, prédisant une évolution à venir des normes de construction et des plans de prévention des risques. L’érosion littorale, autre conséquence du dérèglement climatique, ne suscite pour l’instant qu’une prise en compte limitée, avec une simple liste des communes impactées par le recul du trait de côte fixée par décret, en concertation avec les communes, sans que cela reflète de façon concrète l’ampleur des risques de submersion à venir.
Face à ces évolutions, la façon de fixer les tarifications doit s’adapter elle aussi, et s’appuyer sur les nouvelles données géospatiales plutôt que sur les données territoriales traditionnelles.
La tarification par territoire a ses limites
Traditionnellement, ce sont les codes territoriaux (comme les codes postaux par exemple) qui déterminent l’évaluation des risques, et ce malgré le fait qu’ils ne reflètent pas la réalité ni la variété du terrain. L’érosion des littoraux ou la fissuration des sols ne s’arrêtent pas à une délimitation administrative, comme la frontière d’une commune ou d’un département. Pourtant, la tarification des assureurs est encore souvent indexée sur des zoniers dont la granularité par codes territoriaux s’aligne sur des subdivisions administratives françaises plutôt que sur une analyse statistique et actuarielle, ou à des paramètres réellement corrélés aux risques.Le succès des codes territoriaux s’explique par leur simplicité de leur usage. Sans autre alternative, la mutualisation assurantielle a choisi une base administrative pour subdiviser le territoire, même si cela s’est fait de façon arbitraire.
Progrès en matière de cartographie géospatiale des risques
Utiliser la technologie satellitaire ou des systèmes d’information géographiques (SIG) apporte plus de précision dans les données relatives à un lieu, avec notamment des scores de risque, calculés à l’aide de l'intelligence artificielle géospatiale (GeoAI) et fournis en temps réel par des interfaces APIs. Ces technologies ont progressé de façon significative récemment, permettant d’utiliser une évaluation géospatiale des risques plus adaptée que la tarification territoriale, grâce à un accès plus larges aux données de risque géolocalisées.Considérer les risques d’une nouvelle façon
Choisir une tarification géospatiale des risques implique de regrouper, pour chaque adresse individuelle, les données et l’historique d’un risque donné dans un rayon géographique spécifique. Les assureurs peuvent donc sélectionner de façon précise et immédiate les risques, d’évaluer le niveau d’assurabilité des zones les plus risquées, ainsi que le tarif le plus juste, puis d’ajuster la tarification à la souscription ou au renouvellement, sans donner lieu à des hausses de tarifs, de construire des modèles de tarification plus intelligents, et enfin de réduire la sinistralité et d'améliorer les ratios combinés. En tant que données structurées, fiables et collectées à grande échelle, les données géospatiales apportent aux assureurs de nouvelles capacités de tarification territoriale traditionnelle.L'analyse géospatiale des risques permet aux assureurs d’avoir un rôle proactif, aussi bien dans la souscription que dans la prévention. Les données géospatiales pourraient également leur permettre d’interagir avec les pouvoirs publics sur la base des risques afin d’anticiper sur leur prise en charge : passer d’un alignement sur des données administratives, à un éclairage sur l’impact potentiel – y compris à l’échelle d’un territoire, où des mesures de prévention pourraient être mises en œuvre.
Par Patrick Soulignac, Principal Solution Consultant chez Guidewire