Face au succès d’Amazon, Uber, Airbnb ou encore Deliveroo, beaucoup d’entreprises souhaitent aujourd’hui créer leur propre marketplace dotée d’une plateforme de moyens de paiement. Un modèle séduisant mais coûteux, lourd à mettre en place et risqué.
En route vers le modèle marketplace
Les marketplaces sont issues de l’économie dites de plateforme. Il s’agit d’une nouvelle forme de commerce apparue il y a une bonne vingtaine d’années pour les plus anciennes, un peu après l’explosion d’Internet. Amazon, l’une des plus célèbres, a par exemple été créée en 1994. La marque a bâti un empire, tout comme AliBaba, née un peu après en 1999. Ces dernières années, certaines d’entre elles ont intégré une plateforme de paiement pour simplifier leur gestion des flux. Cela a été le cas d’AliBaba avec Alipay ou eBay avec la création en 1998 de PayPal. Leur objectif était de protéger chaque partie prenante de tout litige, qu’il s’agisse du vendeur qui doit être certain d’être payé, ou de l’acheteur qui doit être assuré que le produit qu’il achète est bien celui qu’il a choisi sur la plateforme. Enfin, les années 2010 ont vu déferler Airbnb, Uber et Deliveroo (notamment) dont le business model s’appuie désormais sur une plateforme entièrement dédiée à un secteur d’activité particulier.
En quoi les marketplaces créent-elles des opportunités ?
L’émergence des marketplaces est une tendance de fond stimulée par une demande croissante des acheteurs séduits par toujours plus de choix en un seul et même lieu et à des prix compétitifs. Leur modèle évolue également beaucoup, passant d’une relation BtoC à des échanges BtoB pour simplifier les tâches du service achat d’une entreprise. Dans ce contexte, créer sa propre marketplace permet de proposer davantage de produits ou de services tout en réduisant les coûts, les stocks et les flux. Rappelons qu’en 2024, 70% des transactions seront effectuées via une marketplace (en BtoC) d’après iBe TSE !
En matière d’opportunités, l’entreprise qui parvient à basculer vers un modèle de marketplace efficace peut espérer fidéliser un plus grand nombre d’acheteurs souhaitant maximiser la simplicité de leur parcours d’achat ; que ce soit en termes de recherche de produits, de transaction et de livraison. Le modèle marketplace permettant d’enrôler de nombreux marchands, conduisant à un élargissement des offres, cela entraine une plus grande satisfaction des clients, plus de transactions et donc plus d’encaissements. Enfin, le modèle marketplace permet à l’entreprise de prendre son envol à l’international. Oui mais attention à ne pas voir trop grand dès le départ !
Que faut-il avoir à l’esprit avant de se lancer dans la création de sa propre marketplace ?
Créer sa place de marché répond à plusieurs défis, et ils sont de taille ! Le premier porte sur la gestion du paiement ; celui-ci doit être le plus fiable possible. L’encaissement des transactions exige de se conformer à de nombreuses règles qui s’appuient sur l’obligation d’auditer les vendeurs. Quand on perçoit de l’argent, on doit s’assurer de respecter les règles en vigueur dans chaque pays. Or ce volet réglementaire est plus ou moins restrictif en fonction des zones géographiques. Par exemple, en Europe, il est obligatoire d’obtenir un agrément d’une banque centrale dans l’un des pays de l’union européenne. Ceci est complexe surtout quand on accueille de plus en plus de vendeurs sur sa plateforme. Parallèlement, la multiplication des acheteurs pose de nombreux problèmes comme la gestion des moyens de paiement – très différents selon les pays – et le risque de fraude.
Avoir conscience des risques lorsqu’il faut encaisser de l’argent…
Oui. Et bien souvent, celles-ci s’engouffrent dans le montage de solutions composites qui ne fonctionnent pas ou très mal. Outre le fait de sous-estimer les enjeux et impacts d’un tel projet, ces entreprises font appel à des prestataires de services de paiement qui, bien souvent, n’expliquent pas clairement tous les enjeux dans l’encaissement pour compte de tiers et la gestion du risque. C’est l’entreprise qui peut se retrouver à endosser la responsabilité financière vis à vis des moyens de paiement, voire même d’assumer les rapprochements comptables (nécessaires pour la viabilité du modèle) et les demandes d’exécution des paiements sortant vers les vendeurs. Ceci l’exposant à des risques juridiques et économiques. Il n’est ainsi pas rare d’en voir faire faillite à cause d’une mauvaise gestion des moyens de paiement.
Quelques préconisations
Avant tout, garder à l’esprit qu’une marketplace est un investissement stratégique. Nous recommandons de démarrer dans un contexte maitrisé avant de se projeter et voir grand. Il faut se fixer des objectifs atteignables et questionner en permanence son business model pour le rendre rentable sur un périmètre restreint avant de l’agrandir.
Ensuite, il est essentiel de bien « challenger » son prestataire en lui demandant : « Qui porte la responsabilité de l’encaissement du moyen de paiement ? », « Dois-je obligatoirement modifier mon ERP ? », « Qui se charge d’auditer les vendeurs ? » etc. Si le prestataire n’est pas en mesure de répondre, les coûts peuvent exploser. En somme, il ne faut faire confiance qu’à des sociétés maîtrisant parfaitement le sujet et travaillant depuis longtemps avec les acteurs de la chaîne du paiement, les établissements financiers et bancaires, membres des réseaux de paiement et les partenaires techniques : processeurs et/ou passerelles de paiement. Le prestataire doit connaître la réglementation sur le bout des doigts et la mise en conformité des opérations de paiements entrants (venant des acheteurs) et sortants (venant des vendeurs).
Il existe des solutions innovantes intégrant toutes les composantes de la chaine de valeur traditionnelle du paiement mais avec des services à valeur ajouté comme la tenue de compte, l’orchestration des paiements, la gestion des frais de la marketplace, ou l’ouverture rapide des comptes vendeurs. Le prestataire doit être en mesure de prendre en charge toutes les étapes du projet. L’entreprise doit pouvoir se focaliser sur le recrutement et la promotion de sa place de marché auprès des acheteurs et des vendeurs.
Par Jordan Graison, Head of global Sales, Limonetik