Le mouvement vers l’élimination des cookies tiers est principalement motivé par la préoccupation croissante en matière de confidentialité des données. Les cookies tiers, qui sont créés par des sites web tiers (autres que celui visité directement), ont été largement utilisés pour le suivi du comportement des utilisateurs sur différents sites. Cette pratique a soulevé des inquiétudes quant à la surveillance invasive et à l’utilisation non consentie des données personnelles.

En France, la CNIL a adopté en janvier 2022 une recommandation sur la fin des cookies tiers. Celle-ci prévoit que les acteurs du secteur de la publicité en ligne doivent cesser d’utiliser les cookies tiers d’ici le 31 juillet 2024. Le calendrier de la transition varie selon les acteurs du marché. En août 2022, Google a introduit Privacy Sandbox, une nouvelle approche de la protection de la vie privée en ligne, et dont le but est de proposer une solution médiane : protéger la vie privée des utilisateurs tout en permettant aux annonceurs de cibler leurs publicités. D’autres navigateurs, comme Safari d’Apple et Firefox de Mozilla, ont déjà mis en œuvre des mesures pour bloquer ou restreindre l’utilisation des cookies tiers.  

Le suivi des internautes n’a pas complètement disparu

Le 4 janvier, Google entamera donc une nouvelle ère dans la navigation Internet après celle des cookies traqueurs. L’éditeur de Chrome commencera à tester la protection contre le suivi, grâce à Privacy Sandbox. L’éditeur de Chrome a annoncé que cette fonction n’interdit pas le suivi des internautes, mais propose des moyens de continuer à leur proposer des publicités et un suivi des comportements, mais de manière anonymisée. En somme, le suivi des internautes n’a pas complètement disparu, mais est remplacé chez Google par un suivi intersite, qui restreint par défaut l’accès des sites web aux informations des utilisateurs. En fait, ce n’est pas véritablement la fin des cookies, mais la fin du suivi nominatif.

Google prévoit de déployer Privacy Sandbox progressivement dans Chrome, mais sans préciser par quelle population, groupe, ou par quel pays débutera ce déploiement. Ainsi, à partir du 4 janvier, Google proposera la mise à jour fonctionnelle de Chrome à 1 % des utilisateurs dans le monde, « ce qui constitue une étape clé de notre initiative Privacy Sandbox visant à supprimer progressivement les cookies tiers pour tout le monde au cours du second semestre 2024 », affirme-t-il.  

Trois types de suivi doivent être consentis par les utilisateurs

Privacy Sandbox est composé de plusieurs technologies (FloC, Topics, et Privacy Budget), conçues pour limiter la capacité des annonceurs à suivre les utilisateurs. Elles fonctionnent de différentes manières. FLoC est une technologie qui regroupe les utilisateurs par groupes d’intérêt. Les annonceurs peuvent ensuite les cibler sans avoir accès aux données individuelles des utilisateurs. Topics permet aux utilisateurs de contrôler les sujets sur lesquels ils souhaitent être suivis. Les annonceurs peuvent ensuite cibler leurs publicités sur ces sujets. Enfin, Privacy Budgets permet aux utilisateurs de contrôler la quantité de données qu’ils partagent avec les sites web. Les annonceurs peuvent ensuite utiliser ces données pour cibler leurs publicités de manière plus précise. Le déploiement débutera en 2023 et devrait être achevé en 2024.

Google propose une transition en douceur, afin de permettre aux professionnels de la publicité d’effectuer leur transition en douceur, tout en éprouvant l’efficacité de ces nouvelles modalités. Du côté des utilisateurs et des entreprises, cette métamorphose des cookies tiers signifie une meilleure protection de leur vie privée. Cela limite le suivi de leur activité en ligne et assure que leurs données ne sont pas utilisées sans leur consentement explicite.  

Peu d’utilisateurs changeront leurs paramètres

Toutefois, la question de l’efficacité des paramètres de confidentialité laissés à la discrétion de l’utilisateur, comme dans le cas de Privacy Sandbox de Google, est complexe et peut être vue sous différents angles. D’un côté, offrir aux utilisateurs la possibilité de régler leurs paramètres de confidentialité est une étape vers l’autonomie numérique et le respect de la vie privée. Cela permet à ceux qui sont préoccupés par la protection de leurs données de prendre des mesures proactives.

D’un autre côté, l’expérience montre que de nombreux utilisateurs ne modifient pas les paramètres par défaut, soit par manque de connaissance, soit par désintérêt. Dans ces cas, laisser la responsabilité de la confidentialité aux utilisateurs pourrait ne pas être efficace pour protéger la vie privée de la majorité. De plus, cela pourrait être perçu comme une manière pour les entreprises de se décharger de leur responsabilité en matière de protection des données.

Enfin, il y a un argument qui suggère que cette approche pourrait être considérée comme hypocrite si elle est perçue comme un moyen pour les entreprises de montrer qu’elles prennent des mesures en faveur de la vie privée, tout en sachant que peu d’utilisateurs changeront effectivement leurs paramètres. Ainsi, l’efficacité de telles mesures dépend en grande partie de la façon dont elles sont mises en œuvre et de la sensibilisation des utilisateurs à l’importance de la protection de la vie privée.