À l’occasion d’un échange avec IT Social, George Kurian, PDG de NetApp, revient sur la transformation stratégique de l’entreprise, sa vision de l’infrastructure IA, le rôle central de la donnée, et les enjeux à venir autour de la durabilité et de la souveraineté numérique.

Depuis plusieurs trimestres, NetApp transforme son positionnement pour s’imposer comme un acteur transversal de l’économie de la donnée. Au cœur de cette mutation, la convergence des infrastructures hybrides, les exigences d’agilité induites par l’IA générative, et l’intégration de services intelligents directement dans la couche de données. Pour George Kurian, l’ambition est claire : NetApp veut devenir la plateforme de référence dans un monde piloté par la donnée, en combinant performance, sécurité et gouvernance à l’échelle. De fournisseur de stockage à acteur central de l’économie de la donnée
en somme.

IT Social — Vous dites que NetApp n’est plus une entreprise de stockage. Que signifie ce repositionnement stratégique ?

George Kurian — Le stockage reste fondamental, mais nous avons élargi notre mission. NetApp est aujourd’hui une entreprise d’infrastructure intelligente de données. Cela signifie que nous combinons un socle de stockage unifié, sur site, dans le cloud public ou souverain, avec une série de services intégrés : cybersécurité, orchestration de pipelines hybrides, traçabilité des données pour l’IA, gouvernance automatisée, etc. Nous embarquons cette intelligence directement dans nos systèmes, là où d’autres dépendent d’outils tiers.

Comment se structure votre feuille de route autour de l’IA ?

Nous avons trois priorités avec l’IA : aider nos clients à l’exploiter efficacement, en simplifiant l’unification, la vectorisation, la traçabilité des données ; renforcer nos produits, avec des modèles de détection d’anomalies, des fonctions anti-rançongiciels embarquées, et une automatisation intelligente ; et transformer notre organisation interne, en utilisant l’IA pour accélérer le développement logiciel, optimiser le support client ou automatiser
les processus.

NetApp travaille aussi sur des agents IA. Quel est votre objectif avec cette approche agentique ?

Nous développons ce que nous appelons des data agents, capables de comprendre profondément le contenu, le contexte et les relations entre les données sur nos systèmes. Ils sont conçus pour interagir avec les agents planificateurs d’applications via des protocoles comme MCP ou A2A. L’objectif n’est pas d’orchestrer des processus métiers, mais de fournir une intelligence contextuelle sur la donnée, intégrée à nos infrastructures, et interopérable avec des outils MLOps ou des copilotes existants.

Vos produits évoluent : que représente ASA dans cette dynamique ?

ASA (All-Flash SAN Array) est notre réponse à la modernisation du stockage en mode bloc. Il s’agit de baies full flash conçues pour les charges transactionnelles critiques, comme les bases de données ou les ERP. ASA nous permet de cibler des environnements SAN traditionnels avec une solution moderne, optimisée, et totalement intégrée à notre écosystème Ontap et BlueXP.

Comment abordez-vous les enjeux de souveraineté et de conformité en Europe ?

Nous travaillons avec les hyperscalers et les fournisseurs de cloud souverain pour fournir des environnements conformes aux exigences européennes. Notre rôle est d’aider les clients à classifier leurs données sensibles, à prévenir les mouvements non autorisés (vers des clouds publics, par exemple), et à tracer les accès ou les transformations de ces données. Nous combinons le marquage de métadonnées et l’analyse de contenu pour détecter, par exemple, des données personnelles ou de santé.

Et sur le plan environnemental, comment rendre l’IA soutenable ?

Il faut repenser l’infrastructure. Centraliser toute l’IA dans des mégadatacenters n’est ni viable économiquement, ni durable. Nous militons pour une IA plus frugale, où l’on réduit les copies, on vectorise les données à l’écriture, on optimise les graphes de connaissances, et on limite les cycles redondants. L’efficience des pipelines de données est la clé
d’une IA durable.

Quels sont vos trois axes prioritaires pour les deux prochaines années ?

D’abord, accélérer la croissance de nos activités cœur, notamment le flash et le cloud, où nous avons des croissances à deux chiffres. Ensuite, consolider notre leadership dans l’infrastructure de données pour l’IA, en fournissant des solutions intégrées et différenciantes. Enfin, cultiver une organisation apprenante et inclusive, capable d’attirer et de faire grandir les talents dans un contexte technologique en profonde mutation.