La GenAI ne se résume pas à un changement d’outillage. Elle appelle une réinvention du travail, de la collaboration et de la gestion des talents. C’est une opportunité historique de concilier performance, innovation et humanité, à condition de savoir la saisir avec méthode et vision.

L’intelligence artificielle générative marque un tournant décisif dans la manière dont les organisations abordent la création de valeur. Loin de n’être qu’un outil technique, elle redéfinit en profondeur les rôles humains, les logiques métiers et les modes de collaboration. Dans ce contexte, Neobrain et Sopra Steria Next ont combiné leurs expertises pour livrer une analyse des transformations en cours, à travers une étude appliquée au secteur de l’assurance, emblématique de ces recompositions.

Le constat est sans ambiguïté : la GenAI s’impose dans l’univers professionnel avec une vitesse et une ampleur inégalées. Selon les estimations de Sopra Steria, le marché de l’IA générative atteindra 100 milliards de dollars d’ici 2028, dont 20 à 25 % seront captés par les services financiers. En France, 60 % des entreprises ont déjà intégré ou sont en train d’adopter ces technologies. Dans le secteur de l’assurance, ce mouvement est encore plus perceptible : environ 34 % des activités sont déjà impactées par l’IA, et près de la moitié des tâches liées aux sinistres pourraient être automatisées d’ici 2030.

Transformer les modèles de gestion des compétences

Face à cette dynamique, l’enjeu n’est pas seulement d’intégrer l’IA dans les outils, mais de transformer en profondeur les modèles d’organisation et de gestion des compétences. L’approche proposée repose sur trois étapes clés, qui constituent une véritable feuille de route pour les décideurs.

La première étape est celle du diagnostic. Elle consiste à analyser les activités existantes pour les répartir en quatre catégories : celles protégées (fortement humaines, peu automatisables), celles à optimiser (complexes, mais digitalisables), celles exposées (tâches répétitives et automatisables), et celles enrichies (qui bénéficient d’une collaboration humain-machine). Cette classification permet d’identifier les leviers d’action et de prioriser les chantiers de transformation.

La deuxième étape est centrée sur l’analyse des compétences. En cartographiant les compétences disponibles dans l’organisation, celles qui sont à risque d’obsolescence, résilientes ou stables, les entreprises peuvent mieux anticiper leurs besoins futurs. Par exemple, dans le secteur de l’assurance, les compétences liées à la saisie de données ou à la gestion administrative sont fortement menacées, tandis que celles qui mobilisent le jugement, l’analyse stratégique ou la relation client sont valorisées par l’IA. D’ailleurs, les compétences exposées évoluent 25 % plus vite que la moyenne, ce qui impose une adaptation continue et structurée.

Transiter vers une organisation orientée compétences

Enfin, la dernière étape consiste à amorcer une transition vers une organisation orientée compétences, connue sous le nom de Skills-Based Organization (SBO). Ce modèle, qui met les aptitudes au centre des logiques RH, permet de casser les silos métiers, de fluidifier les mobilités internes et de construire des parcours de reskilling intelligents.

Il s’agit d’un véritable changement de paradigme : on ne raisonne plus en termes de postes à pourvoir, mais en termes de compétences à mobiliser. Les résultats sont au rendez-vous : selon les données issues du rapport, les entreprises ayant adopté ce modèle ont enregistré une hausse de 147 % de leurs bénéfices par action entre 2020 et 2024, contre seulement 24,7 % pour les modèles traditionnels.

L’instabilité, donc l’imprévisibilité, est devenue les marqueurs dominants de l’environnement économique et social contemporain. Les organisations évoluent dans un paysage mouvant, où les certitudes d’hier ne garantissent plus la stabilité de demain. Dans ce contexte, nombre d’entreprises se trouvent dépourvues des outils, des méthodes ou de la lisibilité nécessaires pour anticiper les ruptures à venir et y répondre de manière cohérente.

Combiner la puissance technologique et intelligence humaine

C’est précisément dans ce cadre incertain que l’intelligence artificielle, et plus particulièrement l’IA générative, peut jouer un rôle structurant. Non pas en tant que remède universel, mais comme accélérateur de transformation, catalyseur de résilience et levier de performance. Encore faut-il que son intégration s’inscrive dans une stratégie organisationnelle claire, pensée autour de l’humain et des compétences. Ce qui ne peut se faire sans une implication forte de la fonction RH, qui se retrouve au carrefour des enjeux technologiques, humains et culturels.

C’est le sens de l’approche défendue dans le rapport : adosser l’adoption de l’IA à un modèle Skills-Based Organization (SBO) permet non seulement de renforcer l’agilité des structures, mais aussi d’offrir un cap dans l’incertitude. En plaçant les compétences au cœur de la stratégie, les entreprises disposent d’une boussole pour s’adapter, redistribuer les rôles, activer les bons leviers de formation ou de mobilité, et anticiper les besoins plutôt que les subir.

Les rédacteurs de l’étude le soulignent : c’est la combinaison entre puissance technologique et intelligence humaine, organisée de manière fluide et évolutive, qui permettra aux entreprises de faire face à l’imprévisible. L’IA seule ne suffit pas ; c’est sa mise en œuvre éclairée, dans un cadre structurel qui valorise le potentiel humain, qui fait toute la différence.