Face à des bénéfices qui n’arrivent toujours pas, les investisseurs s’impatientent. Gartner décrit les tendances du marché de l’IA et conseille de gérer les impacts sur le personnel avec la même rigueur que les résultats technologiques et commerciaux. Les coûts doivent être plus maitrisés.

David Cahn, analyste chez Sequoia Capital, la société californienne de capital risque historique de la Silicon Valley, explique froidement l’énorme décalage entre les promesses de l’IA et son retour sur investissement : « L'écart entre les dépenses d'investissement actuelles et les recettes nécessaires pour justifier ces investissements est passé d'un trou de 125 milliards de dollars à un écart surprenant de 500 milliards de dollars ». En fait, il faut distinguer l’IA classique, présente dans les métiers, de l’IA générative, vue comme un relais de croissance pour les entreprises. Pour l’heure, seul Nvidia dont les processeurs sont utilisés pour les solutions d’IA a tiré son épingle du jeu dans ce domaine en devenant la première capitalisation boursière mondiale.

L’enquête de Gartner menée auprès de 451 hauts responsables informatiques au deuxième trimestre 2024 montre que 57 % des DSI ont déclaré diriger une stratégie d'IA au sein de leur entreprise. Alors que les DSI ont l'impression de vivre un battage médiatique intense, la réalité des faits rappelle la difficulté à obtenir de la valeur ajoutée avec le sentiment d'être au creux de la vague.

L’IA générative (GenAI) suscite des doutes auprès du personnel, selon une étude de Slack indiquant qu’aux Etats-Unis, l’engouement vis-à-vis de l’IA par les salariés a chuté de 45 % à 36 %, avec une proportion similaire en France. Dans l’étude de Gartner, Hung LeHong, analyste vice-président du cabinet américain, explique que les gains dus à l’IA varient selon les salariés en fonction de multiples facteurs : intérêt personnel et niveau d'adoption, complexité du travail et niveau d'expérience.

Des avantages que les entreprises ne voient toujours pas venir

Dans l’enquête internationale de Gartner portant sur plus de 5 000 salariés aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Inde, en Australie et en Chine, le personnel déclare gagner en moyenne 3,6 heures par semaine grâce à l'utilisation de l'IA générative. C’est un des seuls indices tangibles de ses bénéfices. Selon l’étude, le coût de l'IA peut rapidement devenir incontrôlable. Un chiffre prête à réflexion, plus de 90 % des DSI affirment que la gestion des coûts limite leur capacité à tirer parti de l'IA pour leur entreprise. Concrètement, Gartner estime que le coût est un risque pour l'IA, aussi important que la sécurité
ou les hallucinations.

Si les DSI ne comprennent pas comment les coûts de la GenAI évoluent, Gartner estime qu'ils pourraient commettre de lourdes erreurs, de 5 à 10 fois, dans leurs calculs de coûts. Un indicateur préoccupant.

La prolifération des données crée de nouveaux défis et risques

L'IA et les données ne sont plus des actifs centralisés que les équipes de la DSI contrôlent directement. L'enquête révèle qu'en moyenne, seulement 35 % du potentiel d'IA sera construit par leurs équipes informatiques. Au vu de ces résultats, Gartner estime que de nouvelles approches seront nécessaires pour gérer et protéger l'accès aux données, gérer correctement les entrées et sorties de l'IA. D'autre part, pour permettre à l’IA de délivrer une véritable valeur ajoutée commerciale.

Le comportement du personnel avec les outils d’IA est un autre facteur essentiel, mais peu d'organisations s’en préoccupent. Ainsi, dans l'enquête Gartner de juin/juillet 2024, seuls 20 % des DSI ont déclaré se concentrer sur l'atténuation des impacts négatifs potentiels de la GenAI sur les salariés.