Ansys, désormais entité de Synopsys, vient de conclure un accord de licence, de commercialisation et de support autour de la plateforme Nvidia Omniverse. Cette intégration permet d’exploiter les bibliothèques et les technologies Omniverse directement depuis les interfaces Ansys, à commencer par les solutions de dynamique des fluides numérique (CFD) et les outils de simulation pour systèmes autonomes.
Omniverse est une plateforme de collaboration et de simulation en temps réel, développée par Nvidia, conçue pour permettre la création de mondes virtuels partagés et de jumeaux numériques industriels, en s’appuyant sur des technologies de rendu 3D, d’interopérabilité et d’intelligence artificielle. L’objectif est de faciliter la préparation des données, enrichir les workflows collaboratifs et accélérer les itérations de conception à travers une visualisation immersive et physiquement cohérente.
L’interopérabilité s’appuie sur le format Universal Scene Description (OpenUSD), socle technologique d’Omniverse, qui permet de fédérer différents outils de simulation et de conception dans un environnement homogène. Ce lien entre solveurs multiphysiques et scène 3D unifiée ouvre la voie à une ingénierie plus fluide, réactive et orientée
usages métiers.
Un levier pour l’IA physique et les jumeaux numériques
Le partenariat permet aux partenaires de répondre aux besoins croissants des industriels en matière de simulation réaliste et de validation à grande échelle. En combinant la précision prédictive des solveurs Ansys avec les capacités immersives d’Omniverse, les ingénieurs peuvent désormais observer les phénomènes complexes (écoulements turbulents, interactions mécaniques, comportements autonomes) dans un cadre visuel fidèle à la réalité physique, tout en automatisant la génération et l’exploration de scénarios.Cette approche est particulièrement stratégique pour le développement de véhicules autonomes, la conception de composants électroniques avancés, la modélisation de dispositifs biomédicaux ou la planification des infrastructures télécoms. À terme, elle permettra d’entraîner des systèmes intelligents dans des environnements virtuels réalistes, tout en garantissant la traçabilité, la reproductibilité et la conformité des simulations.
Un jalon stratégique pour Synopsys après le rachat d’Ansys
L’annonce intervient dans un contexte de consolidation du marché des outils d’ingénierie. Synopsys, géant de la conception de semiconducteurs, a annoncé en janvier 2024 l’acquisition d’Ansys pour un montant avoisinant les 35 milliards de dollars. Cette opération, en cours de finalisation, lui permet de constituer une plateforme unifiée couvrant l’ensemble du cycle de vie du système, du silicium au logiciel, jusqu’aux environnements virtuels de validation.L’intégration d’Omniverse dans les outils Ansys renforce cette ambition, en dotant la nouvelle entité d’un levier de différenciation fort sur les marchés industriels complexes, notamment dans l’automobile, l’aérospatial, la santé ou la défense. Elle permet également d’adresser les nouveaux besoins liés à l’orchestration de systèmes intelligents, connectés et autonomes, dans un cadre virtuel contrôlé et réplicable.
Vers un écosystème de simulation ouvert et distribué
Du côté de Nvidia, cette annonce conforte le positionnement voulu d’Omniverse comme infrastructure de référence pour la simulation distribuée et collaborative. Déployé à l’origine pour les mondes virtuels 3D et les environnements industriels en temps réel, Omniverse est désormais proposé sous licence à des éditeurs partenaires pour s’intégrer dans leurs chaînes de valeur spécifiques. Après Siemens ou Bentley Systems, Ansys devient un partenaire de poids, dont les solutions renforcent la légitimité scientifique de la plateforme.« Pour relever la complexité des défis d’ingénierie actuels, les industries ont besoin de modèles d’IA physique précis, de jumeaux numériques haute fidélité et d’environnements virtuels conformes à la physique, souligne Rev Lebaredian, vice-président Omniverse et simulation chez Nvidia. La combinaison de la puissance prédictive des solveurs d’Ansys avec les bibliothèques de simulation de Nvidia marque un tournant pour les entreprises cherchant à simuler la réalité avec précision. »
L’un des apports notables de cette collaboration réside dans la mise à disposition de la suite PyAnsys, qui permet aux ingénieurs de personnaliser, d’automatiser et d’intégrer les simulations dans leurs propres applications Python. Cela ouvre la voie à des cas d’usage avancés, y compris pour des utilisateurs non experts en simulation. Un exemple cité par les partenaires est PyAnsys-Heart, un jumeau numérique du cœur humain piloté par reconnaissance vocale, conçu pour démocratiser l’exploration biomédicale à haute fidélité.
Dans cette logique, la démocratisation des environnements de simulation immersifs constitue l’un des prochains défis : leur adoption au sein des PME industrielles, leur intégration dans les processus d’ingénierie existants et leur compatibilité avec les contraintes de souveraineté numérique, notamment en Europe, seront autant de facteurs de différenciation dans les années à venir.