C’est là l’objectif déclaré du plan quantique annoncé en 2021 par les ministres du gouvernement de l’époque : la ministre des Armées Florence Parly, la ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation Frédérique Vidal et le Secrétaire d’État chargé de la Transition numérique et des communications électroniques Cédric O. Cette stratégie consacre 1,8 milliard d’euros, dont 1 milliard financé par l’État, notamment via le Programme d’Investissements d’Avenir (PIA), au développement des technologies quantiques sur la période 2021-2025. Elle a pour objectif de créer
16 000 emplois dans le secteur d’ici 2030.
Réduire drastiquement le coût des ordinateurs quantiques
Comme le laisse voir la liste des ministres annonciateurs du plan quantique, l’informatique quantique est stratégique et scientifique. Elle s’impose progressivement comme une révolution imminente, capable d’accélérer exponentiellement certains calculs complexes, allant de l’optimisation logistique aux simulations moléculaires. Toutefois, l’un des principaux défis pour son adoption à grande échelle reste la tolérance aux fautes. Les systèmes quantiques sont extrêmement sensibles aux erreurs. Dans le cas des processeurs photoniques, il s’agit de décohérence ou de pertes de photons. Jusqu’ici, assurer la fiabilité des calculs nécessitait un matériel extrêmement coûteux et redondant, limitant considérablement l’accessibilité de cette technologie.Quandela, la startup française du quantique, vient d’apporter une contribution décisive à l’accélération de l’industrialisation des ordinateurs quantiques. Une avancée qui apporte une réponse à l’un des problèmes structurels de l’informatique quantique photonique : la sensibilité des photons à diverses perturbations, notamment électromagnétiques. Ses découvertes sont détaillées dans son article scientifique « Minimizing resource overhead in fusion-based quantum computation using hybrid spin-photon devices ». Quandela propose un modèle qui réduit drastiquement le coût de fabrication et d’exploitation des ordinateurs quantiques, tout en améliorant leur tolérance aux fautes.
Une nouvelle approche
L’informatique quantique basée sur la fusion (FBQC) repose sur l’utilisation de photons comme qubits, permettant une modularité et une évolutivité accrues par rapport aux circuits supraconducteurs traditionnels. Toutefois, cette approche souffre d’une forte vulnérabilité à la perte de photons, ce qui complique l’implémentation de mécanismes de correction d’erreur. Jusqu’à présent, l’utilisation de sources de photons probabilistes nécessitait de vastes infrastructures de multiplexion afin de compenser leur inefficacité, augmentant de manière exponentielle le nombre de composants optiques, et donc les coûts et la complexité du système.La nouvelle approche découverte par les chercheurs de Quandela repose sur des sources de photons dites déterministes, intégrant un qubit de spin qui permet une génération d’états quantiques de manière quasi certaine. En combinant cette technologie avec des modules
« Repeat-Until-Success (RUS) », il devient possible d’optimiser considérablement les opérations de fusion, réduisant ainsi le nombre d’essais nécessaires pour générer un état de ressources stable.
Cette avancée présente des implications majeures. En premier lieu, elle permet de réduire le nombre de sources nécessaires à un calcul quantique industriel de plusieurs ordres de grandeur. Alors que les architectures photoniques traditionnelles nécessitaient plusieurs millions de sources pour des applications pratiques, cette nouvelle approche réduit ce chiffre à quelques milliers seulement. Par ailleurs, la tolérance aux fautes s’en trouve significativement améliorée, car l’élimination des pertes massives de photons permet d’atteindre des seuils d’erreur bien plus faibles. En réduisant également le nombre de composants nécessaires, la fabrication des processeurs quantiques devient plus simple et moins coûteuse, facilitant leur industrialisation et leur intégration dans des infrastructures IT existantes.
Un avantage décisif ?
Pour les entreprises et les développeurs, cette avancée ouvre la voie à une adoption plus rapide de l’informatique quantique. Les domaines de la finance, de la logistique, de la cybersécurité et de la chimie computationnelle sont parmi les premiers concernés, avec la possibilité d’intégrer plus facilement des algorithmes quantiques dans leurs processus. Pour les développeurs, l’évolution des architectures implique la nécessité de concevoir des logiciels et des frameworks optimisés pour exploiter ces nouvelles capacités, en adaptant les algorithmes aux architectures hybrides et en assurant une meilleure interopérabilité avec les infrastructures cloud. En simplifiant la gestion des erreurs et en rendant l’informatique quantique plus accessible, cette innovation ouvre également la porte à des clusters quantiques plus faciles à déployer, que ce soit dans des centres de calcul spécialisés ou via des offres cloud.Pour Quandela, cette évolution est une opportunité décisive. Si l’entreprise réussit à finaliser ses prototypes à grande échelle et à industrialiser ses sources déterministes intégrables, elle pourrait disposer d’un avantage décisif, et s’imposer comme l’un des leaders mondiaux de la photonique quantique. Son rôle irait au-delà de la simple fourniture de composants, fédérant autour d’elle divers partenaires industriels et académiques, l’entreprise contribuerait au développement d’un véritable cluster quantique, apte à créer de la valeur dans toute la chaîne, de la recherche fondamentale jusqu’aux applications commercialisées.