Plus d’un million de pieds carrés d’ateliers et de laboratoires — soit près de 93 000 m² — sont déjà réservés : TSMC grave les puces Blackwell à Phoenix (Arizona), tandis que Foxconn à Houston et Wistron à Dallas monteront les châssis des futurs « AI factories ».
La société promet de livrer pour quelque 500 milliards de dollars d’infrastructures IA sur quatre ans et d’engendrer « des centaines de milliers d’emplois », selon Jensen Huang.
La décision intervient alors que Washington impose de nouvelles licences d’exportation pour les GPU H20 destinés au marché chinois. Nvidia a annoncé qu’il allait provisionner
5,5 milliards de dollars de charges liées à l’arrêt forcé de ces ventes. Malgré ce coup de frein, l’appétit du marché ne faiblit pas. Sur l’exercice fiscal 2025, le groupe a publié un chiffre d’affaires record de 130,5 milliards de dollars, en progression de 114 % sur un an, dont 35,6 milliards pour le seul segment Data Center lors du quatrième trimestre.
Une stratégie de relocalisation et de résilience
Ce repositionnement industriel s’accompagne d’une stratégie de résilience : en multipliant les sites de production, Nvidia réduit sa dépendance à Taïwan et anticipe les retards de la deuxième méga-fab de TSMC en Arizona, désormais repoussée à 2027-2028. De son côté, le Département du Commerce vise 20 % de la production mondiale de puces sur le sol américain d’ici 2030, objectif auquel les lignes Blackwell contribueront directement.Sur le volet financier, l’entreprise pourra compter sur les incitations du CHIPS and Science Act, doté de 52,7 milliards de dollars de subventions. Intel vient par exemple de se voir attribuer 7,86 milliards ; Nvidia et ses partenaires devraient pouvoir présenter des dossiers analogues dès que leurs plans seront finalisés.
Pour les entreprises utilisatrices, la relocalisation promise devrait raccourcir les délais de livraison, actuellement supérieurs à six mois pour certaines baies DGX-H100, et répondre aux exigences de souveraineté des secteurs régulés. Elle ne règlera toutefois ni la flambée des coûts énergétiques et de refroidissement ni la pénurie de talents spécialisés dans l’IA.
En définitive, Nvidia transforme une contrainte réglementaire en opportunité : ancrer sa feuille de route technologique sur le territoire qui concentre déjà plus de la moitié de la demande mondiale en infrastructures IA, tout en sécurisant une chaîne d’approvisionnement devenue un enjeu stratégique autant qu’économique.