L’industrie de fabrication s’est longtemps appuyée sur la maîtrise statistique des procédés (MSP) pour optimiser ses processus de production. Cependant, ces méthodes présentent des limites : la collecte de données par échantillonnage ne reflète qu’une partie de la réalité et peut donner une image incomplète, voire inexacte, des processus de production.

A l’inverse, les systèmes de vision permettent d'identifier les tendances temporelles entre différents cycles de production. En associant ces données à des outils d’analyse avancée, les fabricants constatent déjà des bénéfices tangibles : ils mettent en lumière des corrélations entre les paramètres de production et les résultats en matière de qualité que les méthodes statistiques traditionnelles ne permettent pas toujours de révéler.

La capacité à capturer, stocker, interpréter et analyser les données de vision continuera de se renforcer au rythme des progrès de l’intelligence artificielle (IA), de l’Internet des objets industriels (IIoT) et des technologies cloud.

Volume, intégration, traitement

Aujourd’hui, plusieurs défis techniques limitent encore le plein potentiel de la vision industrielle associée à des outils d’analyse pour optimiser les cadences, les rendements et la qualité dans des environnements de production complexes, dynamiques ou distribués. Parmi ces défis clés, on compte :

     
  • Les volumes de données : une seule ligne de production peut générer plusieurs téraoctets de données de vision par jour, ce qui exige des capacités de stockage et de traitement considérables.
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  • Complexité d’intégration : l'intégration des données de vision avec celles provenant d'autres sources en temps réel, telles que les capteurs IIoT, les outils d'IA et les plateformes cloud, est difficile pour les logiciels de pilotage de la production (MES) et les progiciels de gestion intégrés (ERP) existants.
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  • Limitations de traitement : les besoins de traitement en temps réel des opérations industrielles entrent souvent en conflit avec la puissance de calcul nécessaire pour analyser de tels ensembles de données.

Bien que ces défis méritent d'être pris en considération, aucun d'entre eux ne constitue un obstacle insurmontable à une utilisation plus efficace des données de vision pour optimiser les processus. Les sections suivantes présentent les facteurs essentiels que les fabricants doivent prendre en compte et traiter pour réussir cette transition.

Considérations-clés dans l'agrégation des données

La mise en œuvre d'outils d'analyse basés sur la vision industrielle pour optimiser les processus nécessite une planification rigoureuse et une exécution maîtrisée. Les équipes d’ingénierie et qualité doivent évaluer l’infrastructure existante (capacité du réseau, stockage des données, puissance de traitement) pour s'assurer qu'elle peut gérer les charges actuelles et futures liées à ces outils d'analyse.

Exploiter les données issues de la vision industrielle pour l’analyse nécessite une expertise pluridisciplinaire, à la croisée de la vision industrielle, de l’analyse de données et des processus de fabrication.Les organisations peuvent former leurs collaborateurs ou faire appel à des partenaires spécialisés. De nombreuses études du secteur rappellent les difficultés auxquelles les fabricants sont confrontés pour recruter des talents qualifiés. Des programmes de montée en compétence et de reconversion sont donc nécessaires, mais ils exigent du temps et des investissements. Cependant, les solutions de vision industrielle les plus récentes proposent des interfaces plus intuitives et des modèles d'IA prêts à l'emploi, facilitant ainsi leur adoption.

Enfin, l’intégration de données issues de matériels et de logiciels variés peut être simplifiée lorsqu’elle s’appuie sur un fournisseur unique garantissant l’interopérabilité et la compatibilité entre les plateformes, tout en proposant un support unifié et une feuille de route commune. Dans un cas concret, un fournisseur de suivi d’emballages plastiques a opté pour une solution logicielle de vision industrielle, évolutive et compatible avec les équipements de vision déjà en place - permettant un taux de détection sans précédent de 100 % sur six sites.

Capture et ajustement des données issues de la vision industrielle

Plusieurs types de données de vision industrielle offrent des opportunités immédiates pour optimiser les processus. Les systèmes qui mesurent les dimensions des pièces, évaluent la qualité des surfaces ou suivent les données temporelles fournissent des informations sur les variations en amont des processus, l'usure des outils et de nombreuses autres variables.

Les données issues de l’imagerie 3D fournissent de nouvelles sources d’information aux outils d’analyse avancée, comme les études de forme et d’ajustement, les simulations d’assemblage ou la vérification des jeux et des affleurements. Dans l’industrie automobile, par exemple, l’imagerie 3D est utilisée pour garantir un alignement parfait des panneaux de carrosserie, ce qui permet de réduire à la fois le temps d’assemblage et la résistance aérodynamique. L’imagerie non visible, multispectrale ou hyperspectrale élargit encore davantage le champ des possibilités en révélant des variations de composition des matériaux, des zones de contrainte ou des pollutions de surface.

Transformer les données issues de la vision industrielle en leviers d’analyse exige de concilier besoins opérationnels immédiats et objectifs analytiques à long terme.

Les architectures de données doivent rester évolutives et alignées sur les capacités de l’entreprise, tandis que le choix d’une plateforme d’analyse doit anticiper les besoins futurs. Le lancement de projets pilotes ciblés permet d’en mesurer concrètement la valeur.

Enfin, le succès repose avant tout sur la collaboration entre les équipes qualité, production, IT et ingénierie, ainsi qu’avec les partenaires externes.

Par Ivar Keulers, directeur de l'ingénierie des applications terrain, Zebra Technologies

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