Les résultats de l'enquête de 2024 du BCG sont sans équivoque et corroborent d’autres travaux sur ce sujet épineux. Près de la moitié des personnes interrogées ont déclaré que plus de 30 % des projets de développement technologique étaient affectés de retards ou de dépassements budgétaires. Et près d'une personne sur cinq déclare que les résultats ne répondaient pas aux attentes dans plus de 50 % des cas. C'est considérable.
Les méthodes agiles, souvent présentés comme un remède crédible aux échecs des grands projets informatiques, ne sont pas nécessairement gage de succès selon le BCG. Ces méthodes très tendance peuvent cependant être utiles, ne serait-ce que par l’obligation de s’assurer régulièrement de l’avancement du projet pour prendre les mesures correctives nécessaires en temps utile.
Trois causes expliquent les fréquents dépassements de délais et de budget. D’une part, le manque d'alignement entre les aspects technologiques et commerciaux du projet. D’autre part, des délais trop couts et irréalistes. Enfin, des ressources financières et humaines insuffisantes.
Le langage des DSI n'est pas celui des dirigeants ou des commerciaux, d'où des incompréhensions très pénalisantes à terme. Le fait de disposer de chefs de produit possédant des compétences diverses et complémentaires augmenterait le taux de réussite des projets de 30 % d'après le BCG.
Les estimations de coût reposent sur les fonctions visibles du logiciel ou des services. Mais souvent sans prendre en compte les exceptions et les cas particuliers. Tout cela génère une sous-estimation importante des coûts. Le BCG avance que l'IA générative est une voie indispensable vers la réussite des grands projets IT. Cela reste à démontrer.
Le fiasco des projets mastodontes IT institutionnels
Dans le domaine des grands projets institutionnels et régaliens, la liste des projets avortés ou dysfonctionnels est édifiante. Pour ne citer qu’eux, il s’agit des débuts chaotiques d’Antares, logiciel de gestion des amendes, de l’échec retentissant de Louvois, le logiciel de paie des militaires ou encore de Sirhen, le système RH de l’Éducation nationale. Pour rappel, chacun de ces projets coûte des centaines de millions d’euros d’argent public.Les causes des dysfonctionnements majeurs de l‘ANTS, le site de traitement des permis de conduire et des cartes grises, sont multiples et emblématiques de ce qu’il ne faut pas faire. La principale raison reste la décision politique d’imposer des délais irréalistes de mise en ligne des services à l'usager. Et cela, en supprimant toute possibilité de contact réel en préfecture, par e-mail ou par téléphone
D’autre part, le DSI de la direction interministérielle du numérique (Dinum) était manifestement dépassé par l’ampleur et la complexité du projet. L’énorme taux d’externalisation du projet de 90 % selon le DSI de transition appelé à la rescousse a rendu intenable la coordination efficace des équipes. Les tests utilisateurs UX ont été réduits à leur plus simple expression. Conséquence, un site doté d’une ergonomie médiocre.
Cela dit, l’État sait parfaitement engager des projets IT complexes réussis tels impots.gouv.fr. Il est vrai qu’il s’agissait ici d’un enjeu essentiel, celui de la collecte des impôts nationaux.