La généralisation de l’IA générative transforme la gestion des services IT, mais l’écart entre adoption et déploiement stratégique met en lumière un risque d’inertie et de fragilisation des organisations. Un rapport Ivanti 2025 révèle que l’automatisation n’a de valeur que si elle s’accompagne d’une montée en compétences, d’une gouvernance rigoureuse et d’une sécurisation accrue des usages.

La vague d’adoption de l’IA générative dans les directions informatiques s’impose comme un marqueur du virage numérique des entreprises. Selon l’étude Ivanti, 84 % des professionnels IT utilisent déjà l’IA générative pour automatiser leur quotidien. Pourtant, la plupart de ces usages restent limités à des tâches élémentaires, tandis que la transformation des pratiques de gestion IT se heurte à la fois à la rareté des compétences et à des freins structurels persistants. Ce paradoxe nourrit un décalage entre les ambitions affichées et la réalité des organisations, au risque de transformer l’automatisation en simple effet d’aubaine, sans bénéfice durable.

Si l’engouement pour l’IA générative est indéniable, l’étude montre que 60 % des entreprises n’ont engagé aucun plan de formation spécifique pour leurs équipes IT. Ce déficit d’accompagnement structure l’émergence d’une automatisation « de surface », cantonnée à l’optimisation de processus simples, comme le routage automatisé des tickets (67 %) ou la réinitialisation de mots de passe (58 %). Loin de refléter une mutation stratégique, ces usages témoignent d’une volonté d’alléger la charge sans transformation en profondeur. La part des professionnels IT qui mobilisent l’IA pour l’analyse proactive des causes et la prévention des incidents reste limitée à 28 %. Pourtant, 85 % d’entre eux jugent ces technologies capables de détecter les anomalies avant qu’elles ne produisent des impacts majeurs sur les utilisateurs ou l’activité.

Automatisation ITSM : freins sécuritaires, techniques et humains

Ce décalage structurel traduit un paradoxe où l’automatisation se déploie massivement mais sans gouvernance ni montée en expertise, générant une illusion de modernisation tout en perpétuant les pratiques héritées. L’absence de formation dédiée, combinée à l’insuffisance de projets pilotes structurants, limite la capacité des organisations à exploiter l’IA générative pour transformer leur gestion des incidents, leur support et leur sécurisation des environnements numériques. La conséquence en est la création de poches d’inefficacité non résolues et une dépendance accrue à l’automatisation opportuniste.

Le rapport Ivanti met en lumière les principaux obstacles à la généralisation des usages avancés. En premier lieu, 42 % des professionnels IT citent les préoccupations de sécurité et de conformité comme des freins majeurs. L’IA générative, en intégrant des flux d’informations sensibles, questionne la sécurité des architectures existantes, la traçabilité des accès et la maîtrise du risque réglementaire. À cela s’ajoute la complexité technique : 38 % évoquent la difficulté d’intégrer l’IA dans des systèmes fragmentés, la multiplication des environnements cloud, et la nécessité d’orchestrer des flux de données en temps réel. Enfin, le manque de compétences internes est reconnu par un tiers des répondants, qui déplorent le déficit de profils capables de piloter, de gouverner et de sécuriser l’automatisation intelligente.

Les véritables enjeux de l’IA générative

Cette triple contrainte alimente un statu quo dans lequel l’ITSM reste largement piloté par des procédures manuelles ou des scripts d’automatisation partielle. L’absence d’une démarche globale de formation, de cartographie des risques et de mutualisation des expertises limite la capacité des DSI à fédérer l’ensemble des métiers autour d’un projet de transformation. Les projets restent morcelés, les investissements dispersés, et les équipes peinent à valoriser l’apport réel de l’IA générative dans la gestion des incidents et la sécurisation des services.

Malgré ces blocages, l’optimisme domine dans les intentions, car 83 % des professionnels IT anticipent une hausse rapide de leur productivité grâce à l’IA, et 70 % misent sur une amélioration de la satisfaction au travail. Les utilisateurs finaux, eux-mêmes, plébiscitent la réactivité des chatbots, passés de 31 % à 36 % d’avis positifs en un an pour la résolution de leurs incidents informatiques. Mais ces résultats sont fragiles. Les tâches répétitives restent citées comme le principal défi par 34 % des équipes, tandis que la multiplication des outils, la dispersion des workflows et l’absence d’intégration native freinent l’exploitation des synergies.

Ce constat appelle un changement de paradigme. La seule réduction des coûts ne suffit plus, il s’agit désormais de bâtir une automatisation capable d’absorber la complexité, d’anticiper les incidents, de renforcer la coordination entre métiers, et d’outiller les équipes pour gérer des crises d’ampleur. La résilience, condition de la compétitivité à long terme, dépend de la capacité à orchestrer l’ensemble des ressources humaines et technologiques, à mutualiser les savoirs et à sécuriser la donnée tout au long de son cycle de vie.

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