Microsoft tente de solder une enquête antitrust ouverte depuis 2020 en proposant à la Commission européenne de vendre ses suites Office 365 et Microsoft 365 sans Teams, à un tarif réduit, et de garantir une interopérabilité accrue avec les outils concurrents. Bruxelles consulte désormais les acteurs du marché avant de décider si ces engagements sont suffisants pour clore l’affaire.

Depuis plusieurs années, les suites bureautiques de Microsoft sont au cœur d’un litige avec l’Europe. L’éditeur est accusé d’avoir abusé de sa position dominante en intégrant Teams à Office, sans option de désengagement claire pour les clients. Une pratique dénoncée d’abord par Slack, propriété de Salesforce, dès 2020, puis par la plateforme de visioconférence Alfaview en 2023. L’exécutif européen soupçonne ainsi une entrave à la concurrence sur le marché des communications collaboratives.

En mai 2025, Microsoft a transmis à la Commission une série d’engagements pour éteindre la procédure. L’éditeur s’engage à proposer une version de ses suites de productivité (Microsoft 365 et Office 2021 et 2024) sans Teams, vendue moins cher que l’offre actuelle intégrant l’outil collaboratif. Il promet aussi de renforcer l’interopérabilité avec ses concurrents, notamment en ouvrant l’accès aux applications web Office (Word, Excel, PowerPoint) pour les intégrer dans des plateformes tierces. Par ailleurs, les clients de Teams pourront exporter leurs données vers d’autres solutions, réduisant ainsi le verrouillage technique.

La durée de ces engagements est fixée à sept ans pour la tarification et dix ans pour les obligations liées à la portabilité et à l’interopérabilité. L’objectif est de garantir une concurrence équitable sur un marché où les alternatives comme Zoom ou Slack peinent encore à percer face à l’emprise de Microsoft. La Commission a lancé une consultation publique d’un mois pour recueillir les avis des entreprises et des éditeurs concurrents avant de statuer.

Une sanction de 10 % du CA mondial de Microsoft

Si l’offre est jugée satisfaisante, l’enquête pourrait être clôturée sans amende. Microsoft échapperait ainsi à une sanction pouvant atteindre 10 % de son chiffre d’affaires mondial. L’éditeur a par ailleurs annoncé que, dans ce cas, ces mesures seraient étendues au niveau mondial, uniformisant son approche sur tous les marchés. Une décision qui entraînerait des répercussions au-delà de l’Europe et fixerait un précédent dans les relations entre les géants technologiques et les régulateurs.

Salesforce, maison mère de Slack, a indiqué examiner attentivement la proposition. D’autres acteurs devraient se prononcer dans les prochaines semaines. Pour les entreprises utilisatrices, l’enjeu est d’obtenir plus de choix, des coûts potentiellement réduits et des solutions réellement interopérables. Pour la Commission, il s’agit de vérifier que l’équilibre concurrentiel est effectivement rétabli et qu’aucune nouvelle dépendance ne se substitue à l’ancienne.

Vers un marché plus ouvert et des bénéfices mesurables

Au-delà du cas Teams, ce dossier illustre la volonté croissante de Bruxelles d’imposer des garde-fous aux grandes plateformes. Les engagements de Microsoft, s’ils sont validés, devraient permettre une meilleure fluidité du marché, avec des bénéfices concrets pour les entreprises : une réduction des coûts de licence, une simplification des migrations entre outils collaboratifs et une sécurité juridique renforcée. L’affaire pourrait ainsi servir de référence pour les futures négociations entre l’Union européenne et les autres géants du numérique.

En définitive, l’épisode montre que l’intégration des outils collaboratifs dans les suites bureautiques ne peut plus s’imposer comme une évidence. Les régulateurs entendent peser sur les conditions de concurrence et ouvrir le jeu à d’autres acteurs, dans l’intérêt des entreprises clientes.