La récente étude de Slack montre qu’aux Etats-Unis, l’engouement vis-à-vis de l’IA par les salariés a chuté de 45 % à 36 % au cours des trois derniers mois. En France, la proportion du personnel enthousiaste sur l’intelligence artificielle est passée de 53 % à 41 %. Plusieurs facteurs expliquent cette déception.

La bulle autour de l’IA ralentit significativement dans le monde. Encore faut-il préciser que le type d’IA concernée est majoritairement l’IA générative (IAGen) depuis l’irruption de ChatGPT en novembre 2022. L’enquête Slack Workforce Index menée auprès de plus de 17.000 salariés dans le monde entier démonte le mythe d’une IA omnipotente et vendue comme une rupture technologique majeure. Entre septembre 2023 et mars 2024, l'adoption de l'IA avait régulièrement augmenté à l'échelle mondiale, passant de 20 % de la population mondiale des usagers en entreprise à 32 % en mars 2024, soit environ un salarié sur trois.

Mais brutalement, au cours des trois derniers mois, les taux d'utilisation de l'IA ont stagné dans certains pays. Dans l’hexagone, ces taux connaissent un plateau avec une croissance de deux points de pourcentage, passant de 31 % à 33 % des répondants essayant l'IA, et les États-Unis n'ont connu qu'une croissance d'un seul point de pourcentage,
passant de 32 % à 33 % des salariés au bureau.

Le graphique ci-dessous indique la stagnation de la croissance de l'utilisation de l'intelligence artificielle au fil du temps.

Les utilisateurs de l’IA appréhendent le jugement de leurs supérieurs

Ces signes initiaux de ralentissement démontrent, notamment, l'incertitude sur les usages de l'IA générative. Près de la moitié (48 %) des employés de bureau auraient des réticences à avouer à leur supérieur qu'ils utilisent l'IAGen pour des tâches professionnelles courantes (compte-rendus, analyse de données, etc.).

Trois principales raisons expliquent le malaise des utilisateurs de l’IA au bureau. D’abord, le sentiment que l'utilisation de ce type d’IA est une tricherie.

Ensuite, ils craignent d'être perçus comme moins compétents. Enfin, ils pensent être vus comme des paresseux s’ils ont recours à l’intelligence artificielle dans l’exercice de leurs tâches. La politique d’entreprise sur les interdictions ou restrictions d’usage de l’IA importe peu sur les réserves des salariés à révéler son utilisation à leur hiérarchie, cette raison n’étant citée que par 21 % des répondants à l’étude de Slack.

Christina Janzer, directrice du Slack Workforce Lab résume clairement le sentiment général des répondants en ces termes : « Notre étude montre que même si l'IA vous a aidé à accomplir une tâche plus rapidement et plus efficacement, de nombreuses personnes ne voudraient pas que leur patron sache qu'elles l'ont utilisée. »

Il est intéressant de noter que l’étude de Slack ne mentionne à aucun moment l’importance de l’empreinte énergétique d’une requête d’IAGen qui est près de dix fois supérieure à celle d’une recherche sur Google. Sans doute, parce que la plupart des salariés ne connaissent pas son énorme bilan carbone, reconnu par Sam Altman, fondateur d’OpenAI qui a développé ChatGPT.

La perception que l'IA n'est pas à ce jour à la hauteur de l'engouement qu'elle suscite,
au-delà même de la courbe de maturité typique des nouvelles technologies, appelée Hype Cycle par Gartner.