Une étude met en évidence un manque de clarté dans la gestion de l’IA en entreprise, avec à la clé des risques pour la sécurité et une cohérence des pratiques parfois mise à mal. 

Deux ans et demi après le lancement de ChatGPT, Ipsos, pour le compte de l’entreprise Jedha, a mené une enquête afin d’évaluer l’usage, la perception et les attentes des actifs français vis-à-vis de l’intelligence artificielle (IA). Cette étude révèle une société partagée entre enthousiasme, désorientation et besoin de formation.

Tout d’abord, les Français ne rejettent pas massivement l’IA. Néanmoins, un fossé apparaît entre les « early adopters » — utilisateurs précoces — et les autres. Environ 11 % des actifs français utilisent régulièrement l’IA, tandis que 30 % s’en servent ponctuellement. Parmi eux, 94 % des utilisateurs réguliers et 62 % des 18-34 ans estiment que ces outils améliorent leur efficacité. Ce groupe fait partie des 26 % des actifs se disant totalement à l’aise avec l’IA.

En revanche, 28 % des actifs — particulièrement parmi les plus âgés et les employés — se sentent dépassés par les bouleversements qu’impose l’IA dans le monde professionnel. Ces chiffres traduisent une montée en puissance de l’IA qui ne s’accompagne pas d’un accompagnement suffisant, laissant une partie des travailleurs en difficulté.

Mieux maîtriser ces outils

Malgré ces inégalités d’appropriation, une majorité de salariés (70 %) exprime le souhait de mieux comprendre l’IA. Ce désir est encore plus fort chez les cadres supérieurs (78 %) et les personnes travaillant sur ordinateur (74 %). Cette curiosité est alimentée par l’impact déjà tangible de l’IA sur les métiers : près de la moitié des actifs (49 %) estime que l’IA transforme ou va transformer leur travail dans un avenir proche.

Cependant, la formation ne suit pas. Seuls 25 % des répondants ont reçu une formation à l’IA. De plus, un phénomène de « shadow IT » — usage d’outils technologiques sans validation de l’entreprise — se développe : 30 % des actifs indiquent pouvoir utiliser les outils de leur choix, et 28 % utilisent leurs propres outils sans en informer leur employeur. Cette situation engendre des risques en matière de sécurité et de cohérence des pratiques, selon le CEO de Jedha.

Face à ces lacunes, l’envie de formation est forte : 60 % des actifs souhaitent se former à l’IA. Une large majorité (81 %) est convaincue qu’il est possible d’apprendre à mieux maîtriser ces outils, et 67 % jugent urgente une formation institutionnelle à l’échelle des entreprises. Les cadres supérieurs sont particulièrement moteurs, avec 87 % d’entre eux persuadés du potentiel d’apprentissage.

Toutefois, la demande reste freinée par un manque d’offres adaptées. Les actifs privilégient des formats courts (en moyenne 3 h 20 par mois), en ligne, intégrés au temps de travail et flexibles. 34 % souhaitent pouvoir progresser à leur rythme. Peu sont prêts à interrompre leur activité professionnelle pour se former (27 %), sauf les 18-34 ans, plus ouverts aux évolutions du marché du travail (34 %).

Cette étude souligne donc une attente claire : les salariés sont motivés, mais attendent des employeurs qu’ils prennent la mesure des enjeux en proposant des formations accessibles, concrètes et bien intégrées à l’environnement de travail.