En analysant plus de 1,2 milliard d’interactions de recherche, Yext identifie six profils types d’utilisateurs face à l’IA générative. Ce rapport éclaire la diversité des comportements, loin d’un usage unifié de la recherche conversationnelle. Pour les entreprises, comprendre ces archétypes devient une clé stratégique pour rester visible dans un paysage informationnel profondément remanié.
Le développement accéléré des interfaces conversationnelles et des moteurs IA marque une rupture dans les comportements de recherche en ligne. Contrairement à l’idée d’unification ou de simplification, le rapport publié par Yext en octobre 2025 révèle une fragmentation croissante des usages. En s’appuyant sur plus d’un milliard d’interactions anonymisées, analysées à travers sa plateforme de Search-as-a-Service, Yext met en évidence six archétypes d’utilisateurs face à la recherche augmentée par l’IA. Ce travail constitue l’une des premières tentatives structurées pour classifier les profils selon leur relation cognitive, émotionnelle et stratégique à l’acte de recherche.
Parmi ces archétypes figurent par exemple « l’Explorateur », en quête d’idées ou d’inspiration sans but fixe ; « le Chercheur pragmatique », orienté vers des réponses précises à des besoins fonctionnels ; ou encore « l’Évaluateur », qui compare plusieurs options avant de prendre une décision. Cette typologie ne repose pas uniquement sur les mots-clés ou les pages vues, mais sur les intentions implicites, les parcours de navigation et les points de friction. Elle traduit un changement profond dans l’architecture cognitive de la recherche numérique, à l’heure où les moteurs sont capables de synthèse, de raisonnement et d’adaptation contextuelle.
La complexité grandissante de la découverte d’information
Alors que la recherche semblait s’orienter vers la rapidité et la simplification, l’étude de Yext révèle au contraire une complexification des parcours. L’IA permet certes des réponses plus riches et personnalisées, mais elle modifie les attentes des utilisateurs, qui deviennent plus exigeants, plus variables, et parfois plus critiques face aux résultats fournis. Chaque archétype correspond ainsi à une logique propre : quête d’assurance, vérification croisée, sérendipité guidée ou recherche rationnelle.
Ce phénomène oblige les marques et les fournisseurs de contenu à repenser leur manière d’apparaître dans les résultats IA. Là où le SEO traditionnel s’efforçait de répondre à des requêtes précises, la recherche IA impose de structurer ses données pour satisfaire des besoins implicites, souvent non formulés. L’enjeu n’est plus seulement d’être vu, mais d’être choisi comme source fiable, alignée avec le profil cognitif de l’utilisateur en interaction avec un agent IA. La visibilité devient conditionnée par la pertinence sémantique, la cohérence narrative et la capacité à produire des contenus adaptables aux différents scénarios d’usage.
Vers une reconfiguration de la stratégie de contenu
Pour les entreprises, l’émergence de ces archétypes n’est pas une simple curiosité analytique. Elle appelle une refonte des stratégies de publication, de modélisation de données et de cartographie des parcours utilisateurs. L’étude recommande de ne plus concevoir le contenu comme un flux linéaire ou universel, mais comme un ensemble modulaire, capable de s’adapter à des contextes d’intention distincts. Il s’agit de segmenter non plus par audience démographique, mais par posture cognitive face à la recherche.
Certaines entreprises s’y attellent déjà : banques, compagnies d’assurance ou opérateurs télécoms développent des assistants capables de reconnaître ces profils et de moduler la manière dont l’information est délivrée. Une fiche produit pourra ainsi être résumée, comparée ou étayée différemment selon qu’elle s’adresse à un « Décideur analytique » ou à un « Délégateur pressé ». Cette logique de contenu adaptatif préfigure une nouvelle ère du marketing conversationnel, où la performance ne dépend plus du taux de clic, mais de la capacité à répondre au bon niveau de granularité, au bon moment, dans le bon registre.
Un enjeu stratégique pour les DSI et les équipes marketing
La montée en puissance des agents conversationnels et des moteurs IA en entreprise repositionne les outils de recherche comme éléments critiques de l’expérience numérique. Pour les DSI, il ne s’agit plus seulement de déployer des moteurs internes ou de référencer des contenus : il faut orchestrer l’ensemble des points de contact selon les logiques d’intention détectées. Les plateformes de Search-as-a-Service telles que Yext, Coveo ou Algolia deviennent alors des briques clés dans l’infrastructure de relation client et d’automatisation.
Du côté des équipes marketing, cette segmentation redonne une place stratégique à l’analyse des parcours, à la structuration des bases de connaissances et à l’alignement entre expérience utilisateur et promesse de marque. Le contenu ne peut plus être figé ni générique. Il doit être instrumenté, scénarisé, voire contextualisé dynamiquement. Cette évolution implique de nouvelles compétences, à l’interface de la science des données, du design conversationnel et de la stratégie éditoriale. Elle pousse également à repenser les indicateurs de performance : engagement, taux de conversion ou fidélité ne peuvent plus être mesurés sans tenir compte des archétypes qui les conditionnent.
Vers une IA de la recherche centrée sur la compréhension fine des usages
L’étude de Yext ne prétend pas figer une typologie définitive, mais ouvrir un espace d’exploration. Les six archétypes identifiés constituent une grille de lecture évolutive, appelée à s’enrichir au fil des innovations en matière de recherche IA. Elle permet néanmoins de structurer une réflexion stratégique : comment capter l’attention quand l’utilisateur ne sait pas toujours formuler ce qu’il cherche ? Comment se rendre visible quand les moteurs eux-mêmes synthétisent l’information en quelques lignes ? Comment rester crédible quand la source n’est plus lue mais évoquée par un agent ?
À l’heure où les interfaces IA deviennent le point d’entrée privilégié vers l’information — que ce soit dans les environnements métiers, les outils de messagerie ou les plateformes d’assistance —, cette compréhension fine des comportements devient un levier de différenciation. Elle appelle à une collaboration renforcée entre les directions métiers, les responsables data, les architectes IA et les équipes marketing. Anticiper ces mutations permet de bâtir une présence numérique qui ne se contente pas d’exister, mais qui reste trouvable, interprétable et préférée, quelles que soient les transformations de l’interface ou les fluctuations des comportements.