Slack dévoile une nouvelle API de recherche en temps réel et un serveur de protocole contextuel pour les modèles (MCP), afin de permettre aux développeurs de créer des agents IA personnalisés à partir des échanges internes. Une évolution majeure qui positionne Slack comme plateforme de création d’agents, et non comme simple orchestrateur.

À l’heure où l’IA conversationnelle s’intègre dans les processus métiers, les éditeurs suivent deux trajectoires distinctes : orchestrer des agents IA tiers, ou permettre leur création contextuelle à partir des données internes. Slack choisit la seconde voie. En ouvrant l’accès à ses flux de conversations via des interfaces sécurisées et contextualisées, la filiale de Salesforce entend transformer chaque espace de travail en vivier d’intelligence exploitable.

Cette approche contraste avec celle des opérateurs d’orchestration comme Microsoft (Copilot Studio), Google (Agentspace) ou IBM (Watsonx Orchestrate), qui visent à piloter des agents existants. Slack, lui, mise sur la granularité des échanges internes pour faire émerger des agents spécifiques à chaque organisation, à chaque usage, à chaque équipe.

Une plateforme technique conçue pour les agents

Deux nouveautés structurent cette orientation : l’API Real-Time Search (RTS) et le serveur MCP (Model Context Protocol). La première permet à une application IA d’accéder en temps réel aux fichiers, aux messages et aux canaux pertinents, sans extraire ni dupliquer les données. Le second standardise les échanges entre les modèles de langage et les sources internes, en réduisant la complexité des intégrations spécifiques.

Grâce à ces composants, les partenaires peuvent bâtir des agents qui analysent un ticket de support, résument une réunion, ou mettent à jour une fiche client, le tout directement dans l’interface Slack. L’agent accède aux données à la volée, dans le respect des droits d’accès, ce qui limite les hallucinations et améliore la pertinence des réponses générées.

Anthropic, Perplexity, Dropbox, Notion, Writer ou encore Google participent déjà à l’écosystème. Tous développent des applications natives dans Slack, capables d’interagir avec les utilisateurs, de puiser dans les conversations passées et de proposer des actions directement dans le fil de discussion.

Une réponse au morcellement des outils SaaS

Slack capitalise sur un constat largement partagé dans les directions numériques : la fragmentation excessive des outils freine l’adoption réelle et la productivité. Selon l’éditeur, les entreprises utilisent en moyenne plus de 1 000 applications SaaS, dont près de la moitié restent inutilisées. En repositionnant Slack comme couche de dialogue, de recherche et d’action, l’entreprise promet de regrouper les interactions dans un point unique, intégré aux usages existants.

Les nouveaux objets de travail Slack (Slack Work Objects) permettent d’afficher, d’interagir et de modifier des contenus métier au sein même des conversations. L’utilisateur peut clôturer une tâche Asana, déclencher une analyse de campagne ou générer un plan de projet sans changer d’environnement. Pour les développeurs, Slack propose des outils préconfigurés, des bonnes pratiques IA, et une CLI enrichie pour accélérer le développement d’agents métiers.

En somme, Slack ne cherche plus seulement à connecter des applications existantes, mais à devenir un véritable atelier de fabrication d’agents, alignés sur les flux du travail quotidien.

Une gouvernance maîtrisée des données conversationnelles

Slack insiste sur un principe de base : les données appartiennent au client, et leur usage par les agents reste strictement encadré. Aucune réplication, aucun stockage externe, des permissions appliquées à la requête près. C’est sur cette promesse que repose la crédibilité de la plateforme auprès des grandes entreprises soucieuses de conformité et de sécurité.

Cette gouvernance maîtrisée permet aussi de concilier innovation et confidentialité dans les développements internes. Les clients peuvent créer leurs propres agents, sans passer par la marketplace publique, et en conservant le contrôle complet sur les données mobilisées. Une manière d’éviter les zones grises souvent associées à l’usage de l’IA dans les échanges professionnels.

La disponibilité générale des composants techniques est prévue pour 2026. Mais dès aujourd’hui, les premiers agents sont accessibles sur le Slack Marketplace, signe que la transition vers une logique agentique est déjà amorcée pour de nombreux éditeurs tiers.

Slack, vitrine d’une nouvelle chaîne de valeur IA

En misant sur la création d’agents IA contextualisés, Slack change de positionnement stratégique. L’entreprise ne cherche pas à s’imposer comme fournisseur de modèles, ni comme méta-orchestrateur, mais comme point d’ancrage des usages de l’IA au sein des flux de travail. Elle capte ainsi une valeur difficilement atteignable pour d’autres acteurs : celle de la contextualisation instantanée, issue du langage quotidien des équipes.

Reste à voir si ce modèle trouvera un écho au-delà de son écosystème actuel. L’enjeu sera moins de convaincre les entreprises que d’outiller les développeurs internes, les responsables produit et les directions fonctionnelles pour créer des agents utiles, ancrés dans les réalités du terrain. Si cette condition est remplie, Slack pourrait bien occuper la niche de fabrique d’agents de l’entreprise distribuée.