À l’occasion de son événement annuel Refresh 2025, Freshworks a présenté une refonte majeure de sa plateforme d’intelligence artificielle, désormais baptisée Freddy Agentic AI. Cette nouvelle version incarne une inflexion nette vers une IA opérationnelle, conçue non seulement pour assister, mais pour agir concrètement dans les processus métier.
L’IA générative peine encore à tenir ses promesses en matière de ROI, mais cela n’arrête pas les fournisseurs. Freshworks tente un pari audacieux : transformer les assistants conversationnels en agents autonomes capables de traiter, d’exécuter et d’apprendre, sans recours à des intégrations complexes. En misant sur une architecture interconnectée, en apprentissage continu, et articulée autour d’agents capables d’exécuter des actions de bout en bout, Freshworks se positionne au cœur des flux de travail, dans une logique d’orchestration plutôt que d’intégration verticale. Ce repositionnement répond à une attente croissante des entreprises : dépasser une IA de confort ou d’appoint, cantonnée à l’assistance conversationnelle, pour intégrer une IA véritablement agissante, capable de transformer les processus métier.
Lors de son allocution à Londres, Dennis Woodside, CEO de Freshworks, a résumé cette ambition en des termes tranchés : « Nous créons des logiciels puissants, conçus pour simplifier — pas complexifier — le quotidien des équipes IT et service client. Ce que veulent les entreprises aujourd’hui, c’est de la vitesse, de la clarté et de la confiance. » Ce positionnement marque un contraste assumé avec les approches des grands éditeurs historiques, souvent perçues comme trop complexes, longues à déployer, et nécessitant un appui systématique de consultants ou d’intégrateurs externes. Pour Freshworks, l’IA doit générer un impact tangible en quelques jours, non en quelques mois.
Une boîte à outils pour les besoins quotidiens des équipes
Freddy Agentic AI se distingue ainsi par une orientation résolument pragmatique. L’objectif n’est pas de construire une plateforme d’IA générique, mais de proposer une boîte à outils pensée pour les besoins quotidiens des équipes. Avec Freddy AI Agent Studio, un module no-code accessible sans expertise technique, les entreprises peuvent créer en quelques minutes des agents capables de réaliser des tâches précises dans leurs applications métiers, comme l’émission de remboursements, la mise à jour de dossiers clients ou la résolution automatisée de tickets.
Cette simplicité d’implémentation est renforcée par une bibliothèque de compétences prêtes à l’emploi, un environnement visuel de configuration, et des intégrations natives avec des outils tels que Slack, Microsoft Teams, SharePoint ou encore Shopify. La plateforme repose sur une architecture multi-modèle, capable de mobiliser différents LLM selon les contextes et les besoins, ce qui permet d’éviter les effets de verrouillage liés à un modèle unique.
Un accélérateur de cas d’usage de l’IA
Mais au-delà des fonctionnalités, c’est bien la place stratégique de Freshworks dans la chaîne de valeur de l’IA qui se redessine. Contrairement à Microsoft, qui maîtrise l’ensemble du spectre, de l’infrastructure cloud à l’expérience utilisateur, ou à Salesforce, dont l’IA s’adosse au Data Cloud interne, Freshworks choisit une approche médiane. L’entreprise ne cherche pas à s’imposer comme un fournisseur de modèles de fondation, ni comme une plateforme cloud, mais comme un accélérateur opérationnel, apte à activer rapidement des cas d’usage concrets. Cette stratégie est adaptée à un segment souvent négligé : les entreprises intermédiaires, qui ne disposent pas d’équipes IA dédiées mais ont un fort besoin de rationalisation des opérations.
Les résultats clients évoqués lors de l’événement témoignent de la pertinence de ce positionnement. Freddy Agentic AI serait déjà déployé dans plus de 3 000 entreprises, avec des gains mesurés tels qu’une réduction jusqu’à 70 % des tickets traités manuellement, une hausse de 50 % de la productivité des agents, ou encore l’automatisation de plus de 30 % des demandes dans certains cas. Des groupes comme Amazon North America, Hobbycraft ou iPostal1 utilisent la plateforme pour automatiser massivement les interactions entrantes, réduire les temps de réponse et mieux rediriger les efforts humains vers des tâches à forte valeur ajoutée. Freshworks revendique aussi une contribution croissante à l’amélioration des produits, via les données structurées générées automatiquement par les agents Freddy à chaque interaction.
Un plaidoyer contre la complexité héritée
Ce discours d’efficacité se double d’un plaidoyer contre la complexité héritée. Dennis Woodside n’a pas hésité à critiquer frontalement les solutions historiques. Il a notamment raconté l’histoire d’un DSI, client depuis dix ans d’un grand éditeur concurrent, et qui devait mobiliser dix personnes à plein temps pour maintenir son environnement applicatif à jour. « Il était excédé par les hausses de prix, la lourdeur des mises à jour et les délais de déploiement, a raconté le dirigeant. C’est exactement ce que nous voulons éviter avec Freddy ». Ce rejet des « usines à gaz logicielles » s’accompagne d’une promesse de simplicité à tous les étages, depuis l’interface utilisateur jusqu’au modèle économique, en passant par l’activation métier.
L’éditeur a également étendu la portée de sa plateforme avec le lancement de Freddy AI Insights, une fonctionnalité d’analyse proactive conçue pour aider les responsables IT à identifier les causes des incidents, anticiper les dysfonctionnements et prendre des décisions en temps réel, sans requêtes complexes ni compétences en data. Cette capacité annonce l’avènement d’une logique d’industrialisation raisonnée de l’IA dans les environnements de production, où l’objectif n’est plus simplement d’automatiser, mais de mieux piloter les ressources à partir d’indicateurs fiables.
Une formation pour les partenaires
D’autres nouveautés ont été dévoilées : une version MSP de Freshservice, un module RH pour la gestion des parcours des collaborateurs, une initiative de formation pour les partenaires, et une infrastructure de confiance baptisée Freddy AI Trust, qui garantit la sécurité, la traçabilité et la confidentialité des données, avec un traitement différencié selon les usages (génératif ou discriminatif).
À travers cette stratégie, Freshworks parvient à occuper une position originale dans le paysage concurrentiel. Ni hyperscaleur, ni spécialiste de niche, l’éditeur se définit comme un fournisseur de solutions IA immédiatement mobilisables, conçues pour répondre aux contraintes du quotidien dans les départements IT, RH ou service client. Ce positionnement, renforcé par un discours de sobriété technologique et de transparence, répond à une réalité de marché souvent ignorée : celle des entreprises qui veulent faire plus, avec moins, et surtout accélérer l’adoption.
En revendiquant une IA agissante, frugale et centrée sur l’utilisateur final, Freshworks trace une voie intermédiaire entre les empilements technologiques des géants du cloud et les promesses encore incertaines des jeunes pousses de l’IA.