Il est le dernier jeu qui résistait à la force de l'ordinateur… Le Go, un jeux asiatique vieux de plus de 2500 ans, a trouvé son maitre numérique. Et tout cela n'est qu'une histoire d'algorithmes, d'IA et de deep learning !
Il était le dernier à résister à l'envahisseur numérique et son intelligence artificielle (IA). Après les dames, le backgammon, et plus récemment les échecs (victoire de Deep Blue d'IBM en 1997), il aura fallu près de 20 ans pour que ce soit le tour du Go de trouver son maitre virtuel qui a battu l'un des plus grands experts.
Créé il y a plus de 2500 ans, en Chine, le Go consiste à disposer alternativement des 'pierres' blanches ou noires sur un plateau (tablier) appelé Goban, aux 361 intersections de 19 lignes verticales et horizontales. Toute la stratégie consiste à créer des 'territoires' et à y enfermer des pierres de la couleur opposée appelées 'prisonniers'. Tout en évitant bien entendu de retrouver ses propres pierres cernées.
10 puissance 600 combinaisons
C'est le plus ancien jeu de stratégie combinatoire connu, dont l'usage est répandu dans toute l'Asie, avant de conquérir plus récemment l'occident. Mais derrière son apparente simplicité se cache un arbre des possibilités de 10 puissance 600 combinaisons (!), auquel s'ajoute une capacité de placement de chaque pierre quasi illimitée. Les possibilités combinatoires sont telles – le nombre de mouvements possibles et l'absence de moyen simple de mesurer l'avantage matériel, à l'opposé des Echecs dont les systèmes informatiques reposent sur l'analyse des coups au travers d'une base de données de parties et de placement des pionts sur l'échiquier - que l'on considérait jusqu'à présent qu'elles dépassaient les possibilité de calcul des ordinateurs.
C'est pourquoi le développement d'une intelligence artificielle pour jouer au Go s'est révélé autrement plus complexe que celle qui a permis de vaincre les champions des Echecs. Suffisamment pour, en fonction des progrès réguliers de l'informatique, évaluer à encore 10 années le temps restant avant de disposer d'une solution informatique capable de battre les meilleurs joueurs. Maitriser Go et vaincre les meilleurs joueurs représentait donc un grand défi de l'IA, et cela depuis 2 décennies.
AlphaGo de Google
Il faut en effet parler au passé, car une équipe de Google a réalisé une application d'IA nommée AlphaGo qui, pour la première fois, a battu un champion par 5 jeux à 0, Fan Hui, champion d'Europe. En mars prochain, AlphaGo va s'attaquer à un autre champion, Lee Sedol, l'un des meilleurs joueurs au monde, lors d'un tournoi à Séoul.
Demi Hassabis, le responsable du projet AlaphaGo, s'est appuyé sur les projets de Google de développement d'une intelligence artificielle. Projet appelé DeepMind issu de l'acquisition en 2014 de la start-up britannique qui porte le même nom. Il a appliqué les règles de l'IA au jeu de Go. Ce qui signifie que l'IA générique de Google - qui repose sur une approche deep learning simulant un réseau neuronal combinée avec d'autres méthodes - disposera dans le temps des capacités de résoudre de nombreux problèmes, en particulier dans le diagnostique médical et la climatologie.
Son équipe travaille actuellement sur le développement d'une application pour les assistants personnels qui permettrait d'apprendre les préférences de l'utilisateur et d'anticiper ou de suggérer ses attentes en fonction de son comportement.
Pour AlphaGo, DeepMing a déployé deux réseaux neuronaux de deep learning en parallèle : le premier a appris à prévoir le prochain mouvement, le second a appris à prédire le résultat de divers territoires sur le tablier. Après combinaison des résultats de ces deux réseaux, la projection des coups possibles est assuré par un algorithme d'IA qualifié de 'classique'.
Une victoire qui soulève des questions…
La victoire d'AlphaGo sur le champion Fan Hui a été accueillie avec beaucoup d'étonnement, tant elle est inattendue. Certes, beaucoup d'entreprises travaillent sur la combinaison du deep learning avec d'autres méthodes, qui semble la plus prometteuse en matière d'IA. En particulier des start-ups et une équipe de chercheurs de Facebook, mais toutes sont à un stade de développement plus précoce.
En revanche, l'annonce soulève de nombreuses interrogations. En particulier sur le parallèle entre ces travaux et la richesse modulaire de l'esprit humain. La principale question porte sur les risques à long terme des système d'IA. Google y a répondu en évoquant l'existence d'un comité d'éthique interne et d'une collaboration avec les universités. Une réponse qui n'a pas calmé les esprits car l'interrogation demeure : et demain ?