Le paysage de la cybersécurité dans le Cloud a atteint un point d’inflexion.

Face à des environnements Cloud, de conteneurs, d'API et de charges de travail éphémères, la surface d'attaque a explosé. Cette complexité rend obsolètes les approches de sécurité traditionnelles , et la vitesse à laquelle ces environnements évoluent est trop rapide pour un suivi manuel des dépendances et des risques.

Pendant ce temps, les attaquants ne restent pas inactifs : ils exploitent déjà l'automatisation, les bots et l'IA pour intensifier la reconnaissance et exploiter les faiblesses. Les équipes de sécurité, en revanche, restent submergées par le flux continu d'alertes et de tableaux de bord, ainsi que par des flux de travail manuels et répétitifs. La vérité est claire : l'humain seul ne peut pas faire face à ce défi à cette échelle.

Le déséquilibre est réel – et il appelle une transformation radicale.

L’IA générative : utile, mais insuffisante

L’arrivée de l’IA générative (GenAI) a suscité beaucoup d’enthousiasme. Elle a permis de créer des assistants capables de résumer des alertes, incidents, de générer des rapports ou de structurer des données de sécurité, offrant un gain de temps aux analystes.  Cependant, la GenAI n'est pas la solution au problème le plus difficile : déterminer ce qui compte vraiment.

Décider si une vulnérabilité est exploitable dans un environnement de production ou si une activité anormale représente une attaque réelle nécessite un raisonnement intelligent et contextuel. La GenAI excelle à identifier des modèles et à produire de l'information, mais elle manque de l'autonomie et de l'orientation vers des objectifs nécessaires pour améliorer les résultats de sécurité

Vers une nouvelle ère : l’IA agentique

L'IA Agentique représente un changement d'étape majeur pour l'intelligence artificielle.. Contrairement à la GenAI, elle ne se limite pas à produire du contenu ou des suggestions sur demande. Elle agit de façon autonome, selon une logique orientée vers des objectifs. Concrètement, cela signifie qu’elle observe son environnement, comprend le contexte, prend des décisions, exécute des actions, et apprend de ses résultats.

Parmi ses caractéristiques principales, notons :

  • L’autonomie : elle peut initier et conduire des tâches sans supervision humaine.
  • Le raisonnement : Elle prend des décisions contextuelles plutôt que de suivre des scripts rigides.
  • L’objectif : elle décompose des problèmes complexes en étapes pour atteindre des résultats mesurables.
  • L’apprentissage : Elle apprend des résultats pour améliorer ses décisions futures.

En résumé, là où la GenAI produit de l'information, l'IA agentique passe à l'action. Elle observe son environnement, comprend le contexte, prend des décisions, exécute des actions et apprend de ses résultats. 

La cybersécurité du Cloud, un terrain de jeu idéal

Le domaine de la cybersécurité et plus particulièrement la cybersécurité du Cloud est particulièrement propice à l’adoption de l’IA agentique, pour plusieurs raisons :

  • Les environnements Cloud évoluent trop vite pour être suivis manuellement.
  • Les alertes de faible priorité saturent les analystes, alimentant la fatigue décisionnelle.
  • Les tâches répétitives (triage, ticketing, reporting) suivent souvent des schémas prévisibles.
  • Les cybercriminels utilisent déjà l’IA pour automatiser leurs offensives.

Face à cela, l’IA agentique offre un changement de paradigme : elle filtre les vulnérabilités non exploitables, priorise les menaces réelles, et réduit drastiquement le « bruit » opérationnel.

De la théorie à l’action : des cas d’usage concrets

L'IA agentique change l'équation en filtrant les problèmes non exploitables et en priorisant ce qui réduit réellement les risques.

Les bénéfices sont déjà mesurables sur le terrain :

  • Gestion des vulnérabilités : L'IA agentique peut éliminer 50 à 90 % des vulnérabilités non chargées en mémoire et déprioriser 30 à 90 % de celles nécessitant des conditions d’exécution irréalistes. Cette approche permet de supprimer plus de 95 % du bruit à faible risque. Des organisations ont pu éliminer 7 000 vulnérabilités d’un seul coup et réduire leur risque global de 20 % en corrigeant une seule image de conteneur.
  • Détection et réponse : Les agents  corrèlent les signaux pour séparer les incidents réels du bruit de fond, réduisant le temps de traitement des attaques de jours à minutes.
  • Posture Cloud : elle surveille en continu les configurations, en évalue la sensibilité, et applique des correctifs de manière proactive.
  • Gestion des identités : elle  signale les permissions anormales, valident la conformité aux politiques et appliquent automatiquement des actions correctives..

L'impact est puissant : les organisations qui exploitent l'IA agentique dans la gestion des vulnérabilités signalent des économies allant jusqu'à 80 heures par semaine en triage et remédiation manuels.

L'Impératif de transparence, explicabilité et confiance

Aucun responsable cybersécurité ne remettra les clés de sa défense à une IA qu’il ne comprend pas. C’est pourquoi la transparence est un élément fondamental du modèle agentique. Chaque décision – pourquoi une faille est ignorée, pourquoi une action est recommandée – doit être justifiée et traçable.

C’est cette explicabilité qui permet aux équipes de gagner en confiance, de valider les actions automatisées, et d’augmenter progressivement le niveau de délégation.

Une nouvelle génération de défense cloud-native

Les signaux sont clairs :

> 58 % des organisations ont déjà entamé des projets autour de l’IA générative.
> 41 % des professionnels en cybersécurité l’utilisent dans la détection et la modélisation des menaces.

Mais la simple expérimentation ne suffit plus. Pour avancer, il faut structurer des architectures IA agentique autour :

  • D’agents spécialisés
  • D’une compréhension sémantique des environnements
  • D’une intégration native aux plateformes de sécurité Cloud

C’est la combinaison autonomie + raisonnement + explicabilité qui diférenciera les solutions de cybersécurité les plus efficaces de demain.

L’ère de la sécurité réactive touche à sa fin

Les attaquants n’attendent pas. Ils utilisent déjà l’IA pour automatiser nombre de leurs actions, telles que la reconnaissance, l’exploitation et l’infiltration. Face à cela, rester dépendant d’un traitement manuel n’est plus viable.

Adopter l’IA agentique, c’est faire évoluer la cybersécurité d’un mode réactif à un mode proactif, intelligent et résilient. C’est passer d’une logique de défense après coup à une anticipation continue des menaces.

Les entreprises qui prendront ce virage ne feront pas que suivre la cadence des cyberattaques. Elles redéfiniront ce que signifie « avoir une longueur d’avance. »

Par Emanuela Zaccone, stratège produit IA & cybersécurité chez Sysdig

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