En l’espace de quelques semaines, Qlik a enchaîné les annonces produit autour de l’analytique prédictive, du lakehouse temps réel, de la gouvernance des données et de l’IA agentique. Derrière cette cadence soutenue, se dessine une inflexion stratégique claire : transformer la plateforme en un socle décisionnel capable d’agir directement sur les opérations, y compris dans des scénarios temps réel encore émergents.
La donnée ne manque pas dans les entreprises. Ce qui fait défaut, en revanche, reste la capacité à transformer rapidement une analyse en action mesurable, sans rupture d’outillage ni perte de contrôle. C’est précisément sur ce terrain, longtemps laissé aux développements spécifiques ou aux chaînes d’outils hétérogènes, que Qlik cherche désormais à se repositionner. Non pas en promettant une révolution immédiate des usages, mais en préparant l’infrastructure logicielle à une bascule progressive vers des décisions plus rapprochées du temps réel.
Cette trajectoire ne repose pas sur une annonce unique, mais sur une série de briques complémentaires qui, mises bout à bout, traduisent une vision plus opérationnelle de la donnée. Prévision explicable, ingestion en flux, gouvernance persistante et interfaces orientées action convergent vers un même objectif : réduire la distance entre ce que montrent les données et ce que font réellement les organisations.
Du pilotage analytique à l’action directe sur les opérations
Avec la disponibilité générale de la fonctionnalité Multivariate Time Series dans Qlik Predict, Qlik renforce sa capacité à modéliser des phénomènes complexes où plusieurs variables évoluent simultanément. Contrairement aux approches univariées classiques, cette modélisation multivariée permet de prendre en compte des facteurs interdépendants comme la demande, les promotions, les contraintes logistiques ou les effets saisonniers. L’enjeu n’est pas tant de prédire plus loin que de comprendre pourquoi une trajectoire évolue, grâce à une explicabilité intégrée au moteur analytique.
La nouveauté la plus structurante reste toutefois Write Table. En permettant de mettre à jour directement des tables opérationnelles à partir des résultats analytiques, Qlik introduit un chaînage explicite entre prévision et exécution. Les ajustements de commandes, de plannings ou de paramètres tarifaires ne nécessitent plus de sortie de la plateforme ni de retranscription manuelle. Cette capacité traduit un changement de posture : l’analytique n’est plus cantonnée à l’aide à la décision, elle devient un levier d’intervention gouverné au sein même des flux métiers.
Le temps réel comme horizon
Parallèlement, Qlik a enrichi sa plateforme Open Lakehouse avec des capacités d’ingestion et de transformation de données en streaming, fondées sur Apache Iceberg. Les flux issus de Kafka, Kinesis ou d’objets stockés sur Amazon S3 peuvent désormais être intégrés, transformés et gouvernés à mesure qu’ils arrivent, sans dépendre du calcul du data warehouse. Les données deviennent ainsi exploitables quasi immédiatement par les outils analytiques et les équipes de machine learning.
Pour autant, Qlik ne prétend pas répondre à une demande massive déjà exprimée. Dans de nombreux secteurs, les usages réellement temps réel restent limités à des périmètres précis, souvent industriels ou transactionnels. L’intérêt de cette évolution est ailleurs : elle prépare les architectures à des scénarios où la fraîcheur de la donnée devient un facteur de performance, sans imposer une refonte brutale des pratiques existantes. Le temps réel apparaît ici comme une option structurante, prête à être activée lorsque les organisations auront la maturité organisationnelle et métier pour l’exploiter.
Une plateforme orientée action, sans renoncer à la gouvernance
Cette préparation à l’action rapide s’accompagne d’un renforcement des mécanismes de gouvernance. L’ouverture d’API standardisées pour les produits de données, la documentation automatique des champs et l’assistance à la définition de règles de qualité dans Qlik Talend Cloud visent à rendre les données exploitables dans les outils métiers, tout en conservant leur traçabilité et leur fiabilité.
En pratique, cette approche répond à une tension bien connue des équipes data : multiplier les usages sans multiplier les copies ni diluer la responsabilité. En favorisant l’accès aux mêmes données gouvernées depuis des environnements analytiques, bureautiques ou applicatifs, Qlik cherche à éviter que la plateforme ne devienne un point de passage obligé, tout en restant la référence en matière de qualité et de conformité.
Préparer l’interface décisionnelle de demain
L’introduction d’une expérience agentique via Qlik Answers et l’annonce d’une ouverture à des assistants tiers grâce au Model Context Protocol prolongent cette logique. Il ne s’agit pas d’ajouter une couche conversationnelle décorative, mais de proposer un point d’entrée capable de relier données structurées, documents non structurés et raisonnement analytique, avec des citations et une explicabilité systématiques.
Là encore, la prudence domine le discours. Qlik positionne cette interface comme un moyen de structurer les interactions avec la donnée, non comme un substitut aux processus existants. L’agent devient un facilitateur de lecture et d’action, adossé à des moteurs analytiques éprouvés, dans une logique de continuité plutôt que de rupture.
Une trajectoire assumée vers la donnée agissante
Pris dans leur ensemble, ces annonces traduisent une évolution cohérente : Qlik prépare sa plateforme à un monde où la donnée ne se contente plus d’éclairer les décisions, mais participe directement à leur mise en œuvre. Le temps réel n’y est pas présenté comme une obligation immédiate, mais comme un horizon technique prêt à être mobilisé lorsque les usages le justifieront.
Pour les entreprises, l’enjeu n’est pas de courir après la vitesse, mais de réduire les frictions entre analyse, arbitrage et exécution. En articulant analytique prédictive, ingestion en flux, gouvernance persistante et interfaces orientées action, Qlik cherche à occuper cet espace encore largement ouvert : celui d’une plateforme de données capable d’agir, sans perdre la maîtrise.























