Quand la réalité rejoint la science-fiction… Synthetic Genomics Inc. (SGI) a créé un téléporteur biologique, capable sans intervention humaine de créer automatiquement et à distance l’ADN d’un virus.
Le prototype du convertisseur numérique à biologique (digital-to-biological converter) est une banale machine qui n’a rien de sexy, assemblage de divers équipements et robots de laboratoire. Et pourtant, cette machine peut réaliser quelque chose sans précédent : transmettre un code génétique pour recréer la vie !
L’expérience a été réalisée par Synthetic Genomics Inc. (SGI) à San Diego. L’ADN du virus commun de la grippe a été numérisé, et puis transmis à la machine sous son format numérique, avant qu'elle ne fabrique automatiquement l’ADN pour recréer le virus. Autrement dit, SGI a transmis le code numérique pour imprimer le virus.
Reproduire l'ADN de la grippe aviaire
Si l’on décompose le processus, il n’a rien d’original. La numérisation de l’ADN est aujourd’hui un acte connu, de même que la construction d’un virus à partir de pièces d’ADN. A titre d’exemple, une imprimante ADN existe dans le commerce, la BioXP SGI 3200, qui utilise des produits chimiques pré-chargés. Par contre, l’ensemble du processus est une première, en particulier la conception automatique d’un virus sans intervention humaine. C’est même une véritable révolution ! Imaginez un fax des formes de vie…
Une première expérience a été réalisée fortuitement en mars dernier. Les autorités chinoises ont signalé des infections H7N9 de la grippe aviaire, et communiqué les données relatives à la séquence ADN du virus. SGI a pu recréer sur l’imprimante les gènes H et N des brins d’ADN du virus à partir de ces données, qui ont été transmis au laboratoire Novartis qui a pu ainsi utiliser l’information génétique pour créer un stock de virus qui a permis de produire un vaccin.
A la limite de la science-fiction
Bien sûr, nous sommes loin de la téléportation en mode Start Trek, décomposer un être vivant pour le transporter dans un lieu distant et le recréer avec sa conscience. Par contre, les premiers usages potentiels s’annoncent d’une grande richesse : par exemple pour diffuser un virus ou une molécule à des fabricants de vaccins, ou imprimer des médicaments personnalisés à la demande. Ou encore pour diffuser numériquement en continu dans les principaux hôpitaux du monde un anticorps pour produire un antidote à une épidémie.
L’opération serait également économique. La fabrication des vaccins nécessite de stocker des quantités importantes de virus affaiblis qui entrent dans leur conception. Dans le cas du virus commun de la grippe, la semence du virus est cultivée dans des œufs de poules, avec une planification sur l’année. S’il est difficile dans l’état d’imaginer l’industrialisation du processus, l’usage du convertisseur numérique à biologique peut par contre être envisagé sur des productions à la demande et en petites quantités.
Les dangers, de l'erreur à la mutation
Mais pas dans l’immédiat, l’expérience n’en est qu’au prototype. Elle comporte en effet des risques d’erreurs et de mutations aléatoires, inacceptables dans le cadre biomédical. Il faut également réduire la taille de la machine. Par ailleurs, SGI a créé une ‘cellule minimale’, une bactérie avec le plus petit génome existant, qui pourrait servir de support pour accepter de nouvelles instructions génétiques.
Il y en a un, en tout cas, qui semble intéressé par cette technologie : Elon Musk. Le créateur de SpaceX, qui envisage de coloniser Mars, pourrait exploiter la technologie pour transmettre des formes de vie entre des planètes ! Par exemple, une machine de séquençage sur Mars permettrait d’obtenir le code génétique de toute forme de vie ou de quasi-vie trouvée sur la planète rouge, transmis sur des imprimantes sur Terre pour reproduire et étudier ces formes de vies extraterrestres ! Ou à l’inverse le code numérique d’un vaccin pourrait être expédié et fabriqué sur Mars en cas d’épidémie chez les colons…
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