Annoncée par Bloomberg dans un premier temps, puis confirmée par les protagonistes, la nouvelle du rachat de VMware par Broadcom a secoué un secteur, pourtant habitué aux grosses opérations. Mais au regard des opérations de rachat de Broadcom ces dernières années, l’annonce n’étonne pas plus que cela. En effet, Broadcom s’est récemment lancé dans une stratégie de croissance externe hors de son périmètre d’activité traditionnelle de semiconducteurs, notamment les infrastructures et les logiciels d’entreprise. Celle-ci s’est concrétisée par plusieurs rachats : Brocade en 2016 pour 5,9 milliards de dollars, CA Technologies en 2018 pour 19 milliards de dollars, et Symantec en 2019 pour 10,7 milliards de dollars. Depuis, la croissance de la part du logiciel dans le CA de Broadcom n’a cessé de progresser.
Broadcom rachète donc toutes les actions en circulation de VMware dans le cadre d’une transaction en espèces et en actions qui valorise VMware à environ 61 milliards de dollars. En outre, Broadcom prendra en charge 8 milliards de dollars de dette nette de VMware. Ce dernier, dont la capitalisation boursière actuelle est de 50,3 milliards de dollars, est l’acquisition la plus coûteuse de Broadcom. Après la clôture de la transaction, VMware deviendra la plateforme logicielle et la marque de Broadcom, intégrant les solutions logicielles d’infrastructure et de sécurité existantes de Broadcom dans le portefeuille VMware. « Une fois l’opération conclue, les solutions combinées offriront à nos clients un plus grand choix et une plus grande flexibilité pour moderniser, construire, déployer, connecter et protéger les applications de manière cohérente, dans un monde multicloud ».
Les clients craignent une hausse des prix
Dans ses déclarations, Hock Tan, président et CEO de Broadcom, insiste sur les synergies entre les semiconducteurs et les infrastructures matérielles et logiciels dans le schéma d’évolution du cloud vers le multicloud et l’Edge computing. « S’appuyant sur notre expérience éprouvée en matière de fusions et acquisitions réussies, explique-t-il, cette transaction associe nos activités de pointe dans le domaine des semiconducteurs et des logiciels d’infrastructure à un pionnier et innovateur emblématique dans le domaine des logiciels d’entreprise, alors que nous réimaginons ce que nous pouvons offrir aux clients en tant que société leader dans le domaine des technologies d’infrastructure ».
Cependant, si la transaction peut ravir les actionnaires, elle soulève les craintes de clients. « Malgré la hausse de l’action, ce n’est pas une bonne nouvelle pour les clients de VMware, expliquent les analystes de Forrester dans un article. Pour les entreprises acquises, le rachat par Broadcom fait craindre des hausses de prix, une diminution de l’assistance et un frein à l’innovation. À un moment où les clients de VMware ont besoin de rétablir la confiance dans la stratégie et les plans d’innovation de l’entreprise après le départ de l’ex-PDG Pat Gelsinger, cette acquisition constituerait un écart notable par rapport à la ligne de conduite adoptée ».
Cette analyse s’appuie en partie sur l’expérience des rachats passés par Broadcom, s’il suit le même mode opératoire que celui utilisé pour les acquisitions de CA et Symantec. À la suite de ces acquisitions, les clients de CA et de Symantec ont subi« des hausses de prix massives, une détérioration du support et un blocage du développement ». La stratégie de Symetec a été réorientée vers ses plus gros revendeurs et clients. « La société a largement abandonné sa base de 100 000 clients pour donner la priorité à ses 2 000 premiers. Avec VMware, la grande question est de savoir si Broadcom peut tirer parti d’un portefeuille massif de logiciels d’entreprise et d’une base de clients pour construire une solution moderne compétente qui s’étend du mainframe à la périphérie », se demandent les experts de Forrester.