Après des mois de rumeurs, IBM a confirmé qu'il cèdera la fabrication des semi-conducteurs à GlobalFoundries. Une opération qui lui coûtera 4,7 milliards de dollars, mais qui lui permet de se recentrer définitivement vers les « nouveaux marchés », services, cloud et big data.

IBM poursuit sa mue et se désengage presque totalement du 'hardware'. Le géant historique de l'informatique va céder son activité de semi-conducteurs à GlobalFoundries, un groupe californien détenu par des investisseurs d'Abou Dhabi.

La transaction concerne en particulier le processeur PowerPC, qui équipe le mainframe d'IBM et les serveurs haut de gamme, héritier d'une longue lignée de processeurs qui ont fait en partie la brève histoire de l'informatique.

De AMD à GlobalFoundries

Le choix de GlobalFoundries n'est pas anodin. Malgré le succès de son mainframe, IBM n'a pas su endiguer la vague des processeurs au standard x86, qui a grignoté ses parts de marché par le bas, jusqu'à venir aujourd'hui le concurrencer avec des produits, les derniers processeurs Xeon d'Intel, particulièrement performants, et maitrisant en partie l'enveloppe thermique des serveurs.

IBM avait un temps tenté l'expérience du processeur dans notre quotidien numérique, en équipant par exemple la console PS3 de Sony puis la Xbox de Microsoft. Cette activité d'optimisation de composants pour des marchés spécifiques fait partie du lot qui sera cédé.

Mais IBM avait surtout, avec l'appui de sa R&D, tenté d'accompagner le malheureux challenger d'Intel, AMD. Mais ce dernier a jeté récemment l'éponge en revendant justement à GlobalFoundries ses fabs, les usines de fabrication des semi-conducteurs. Le rapprochement avec ce dernier, plutôt qu'avec des fondeurs asiatiques, s'explique donc à la fois par la nationalité américaine de GlobalFoundries, dont le siège est en Californie, et par le prolongement historique de la relation d'IBM avec l'écosystème concurrent du duo Intel et Microsoft. La cession concernera les fabs et autres installations dédiées à la fabrication des processeurs et situées au nord-est des Etats-Unis.

La tourmente IBM, que Wall Street n'apprécie pas

Si la cession des fabs d'IBM est à inscrire dans la stratégie de désengagement du géant des activités matérielles – elle fait suite à spin-off des imprimantes Lexmark, et à la cession des PC et plus récemment des serveurs x86 au chinois Lenovo – elle fait également suite aux difficultés de Big Blue à assurer sa mue.

Sur son troisième trimestre fiscal, IBM a enregistré une chute spectaculaire de 99,6 % de son bénéfice net, à 18 millions de dollars, pour un recul de son 4 % de son chiffre d'affaires à 22,4 milliards de dollars. Ce n'est pas bon du tout pour l'image du vétéran, dont les investisseurs ne cessent depuis de tousser à Wall Street !

Une opération à 5 milliards $

Voilà pourquoi IBM va payer le prix fort pour se désengager de la fabrication des semi-conducteurs. Les analystes estiment que l'activité semi-conducteurs ne représente qu'un chiffre d'affaires de 2,5 milliards de dollars. Mais IBM ne va pas vendre cette activité à GlobalFoundries, il va payer le fondeur pour qu'il prenne cette activité à sa charge, 1,5 milliard de dollars. Auxquels vont s'ajouter 3,2 milliards de dollars au titre d'une charge de dépréciation d'actif. Ce qui portera le coût de cession à 4,7 milliards de dollars.

En contre-partie, l'accord avec GlobalFoundries prévoit que le fondeur réservera sa production en priorité à IBM durant les 10 prochaines années...

Des composants pour le Big Data

Pour autant, IBM ne quittera pas définitivement son activité de conception de composants et processeurs. C'est d'ailleurs un domaine où la R&D d'IBM demeure forte, un plan d'investissement de 3 milliards de dollars sur 5 ans a été annoncé en juillet dernier pour dépasser (réduire) les limites de taille des transistors.

De même, la stratégie d'IBM porte depuis quelques années moins sur le processeur central que sur des composants annexes qui vont seconder l'architecture principale en disposant de fonctionnalités embarquées destinées à accélérer des modèles de traitement et les logiciels. On pense particulièrement au Big Data. Avantage pour Big Blue, intégrés dans une stratégie plus globale de services aux « nouveaux marchés », ces processeurs devraient pouvoir afficher une marge autrement plus haute que les processeurs industriels.

Il se murmure que chez IBM la marge brute du Big Data serait de l'ordre de 40 %, pour un chiffre d'affaires de 16 milliards de dollars. Investir sur ce marché naissant mérite bien quelques sacrifices...