L’IA est devenue un exosquelette du dirigeant. Elle décuple notre force mais ne remplace ni l’intuition, ni l’émotion, ni le raisonnement, ni la responsabilité. Elle augmente, mais ne remplace pas. Dans un monde où l’IA est partout – souvent invisible mais toujours active – le rôle du dirigeant est de rester au centre, lucide, humain, objectif.
Réalisée auprès d’une cinquantaine de dirigeants d’entreprises de tous secteurs, l’enquête de Circle Strategy, cabinet de conseil en stratégie, révèle comment l’IA s’installe dans leurs usages, bien au-delà des discours techniques. Les dirigeants refusent toute substitution et défendent une IA d’appoint, non décisionnaire. L’étude esquisse enfin les contours d’un leadership renouvelé: celui d’un guide éclairé, capable d’articuler intelligence humaine et puissance algorithmique avec responsabilité et lucidité.
Aujourd’hui, plus de la moitié des dirigeants (53 %) ont intégré l’IA générative dans leur routine quotidienne. L’outil phare ? ChatGPT ou Mistral massivement utilisés pour synthétiser l’information, organiser des déplacements ou produire des contenus.
Des bénéfices réels… mais une prudence assumée
Cette adoption, encore silencieuse dans l’espace public, transforme déjà en profondeur les pratiques managériales. Près d’un dirigeant sur deux (48 %) estime que l’IA est devenue incontournable dans son métier, et 30 % déclarent qu’elle influence leur prise de décision, en apportant une vision élargie, en accélérant la collecte d’informations ou en bousculant les intuitions premières.Loin d’être réservée à des usages techniques, l’IA générative est devenue un compagnon du quotidien : soutien à l’administratif, outil de stimulation intellectuelle, ou encore assistant familial pour certains. Elle permet un « rebond intellectuel », selon les mots d’un dirigeant interrogé, et joue souvent le rôle de premier déclencheur d’idées, de “sparring partner” qui éclaire sans jamais décider à la place.
Si les bénéfices perçus sont tangibles – gain de temps (46 %), stimulation intellectuelle (28 %), apport de connaissances (21 %)– l’adoption de l’IA ne se fait pas sans réserve. Si une vaste majorité des dirigeants se disent enthousiastes, 40 % d’entre eux ajoutent à cet enthousiasme la prudence.
Cette double posture s’explique autant par des considérations éthiques que structurelles. Beaucoup redoutent les dérives : atteintes à la confidentialité (31 %), biais et désinformation (31 %), érosion de l’esprit critique (31 %). Certains dirigeants, s’interrogent sur la capacité de leurs équipes – et de leurs enfants – à conserver un esprit critique dans un monde du « prémâché » généré par l’IA.
D’autres pointent les risques pour la formation des jeunes talents, si les postes juniors sont directement confiés à des modèles génératifs. La prudence se double d’une exigence : refuser la facilité, conserver sa capacité à penser par soi-même et faire preuve de discernement. L’IA est perçue comme un outil d’augmentation, pas un substitut à la décision humaine.