Inflation persistante, tensions géopolitiques, fragilité des chaînes d’approvisionnement, pénurie de compétences techniques… Le tableau dressé par les 5 594 décideurs interrogés dans le cadre du rapport « State of Design & Make » est sans équivoque : les vents contraires s’accumulent. Mais malgré ce contexte, les entreprises des secteurs architecture, ingénierie, construction, design et fabrication, et médias et divertissement ne cèdent pas au fatalisme. Elles poursuivent leurs efforts de modernisation, misant sur le numérique, la durabilité et les compétences liées à l’IA être plus agiles.
Selon le rapport, plus de la moitié des organisations ayant engagé leur transformation numérique ont constaté un retour sur investissement supérieur à 50 %, notamment en matière de productivité, d’innovation et de satisfaction client. Les entreprises qualifiées de « mûres numériquement » sont 41 % plus susceptibles de diversifier leur chaîne d’approvisionnement et 22 points plus efficaces dans l’attraction et la rétention des talents que leurs homologues moins avancées. Les rédacteurs de l’étude estiment qu’à ce titre, le numérique devient un levier de résilience, bien au-delà d’un simple projet technologique.
L’IA s’impose dans la conception, la simulation et la modélisation
Autre enseignement fort : la durabilité est passée du statut d’impératif réglementaire à celui de levier de performance. Ainsi, 72 % des dirigeants estiment que leurs initiatives environnementales pourraient générer plus de 5 % de revenus annuels. Ce virage stratégique s’explique aussi par les attentes et les aspirations des employés : dans les entreprises numériquement avancées, 75 % des responsables indiquent que les efforts en matière de durabilité favorisent l’attractivité employeur, contre 54 % dans les autres.Pour sa part, l’intelligence artificielle s’impose comme le premier levier technologique de durabilité, utilisée dans 39 % des organisations interrogées, contre 34 % en 2024. Applications concrètes : modélisation des impacts climatiques, optimisation énergétique des bâtiments, gestion du cycle de vie des produits ou encore simulation de conception dans l’industrie. Mais l’enthousiasme initial est en recul. La confiance envers l’IA a chuté de 14 points en un an, et 48 % des dirigeants redoutent qu’elle déstabilise leur secteur. En cause : la difficulté à industrialiser les usages, les préoccupations éthiques, le manque de compétences, mais aussi les incertitudes réglementaires.
Investissement dans les projets à fort potentiel
Interrogés sur leurs défis prioritaires, 33 % des dirigeants citent la maîtrise des coûts, 31 % les défis technologiques (dont l’IA), et 26 % la gestion des talents. Pas moins de 64 % des organisations admettent rencontrer un déficit de compétences critiques, tandis que nombre d’entre elles procèdent à des licenciements pour inadaptation aux nouvelles exigences techniques.Malgré un climat d’incertitude, 68 % des dirigeants prévoient d’augmenter leurs investissements dans l’IA d’ici trois ans. Le recul global des investissements n’empêche pas une poursuite ciblée des efforts technologiques, avec un accent sur les projets à fort potentiel de transformation.
En définitive, le rapport révèle un écart croissant entre les entreprises numériquement matures et les autres. Les premières bénéficient d’un triple avantage : elles sont plus agiles, plus attractives pour les talents, et plus efficaces dans l’intégration des technologies. Cette différence pourrait se traduire à terme par une concentration accrue des parts de marché dans les mains d’acteurs mieux équipés pour affronter l’instabilité et accélérer leur transition. Dans cette logique, les dirigeants sont appelés à intégrer pleinement le numérique, l’IA et la durabilité dans leur stratégie d’entreprise, non plus comme des projets parallèles, mais comme des piliers de leur modèle opérationnel.