Amazon, Apple, Facebook, Google, Microsoft... Les géants des IT sont à la tête de gigantesques, tant en volume qu'en valeur, portefeuilles de brevets. Et pourtant, les gouvernements encaissent très peu d'impôts issus des revenus de ces brevets ! Explication.
Un brevet stratégiquement bien placé sur une technologie sensible, et ce sont de confortables revenus assurés, parfois pour longtemps. Les géants de l'industrie l'ont bien compris. Au même titre d'ailleurs que certains trouble-fêtes qui ont construit un modèle économique basé sur l'acquisition de brevets stratégiques qui leur permettent de faire pression sur les éditeurs et constructeurs qui intègrent des composants qui peuvent entrer dans l'objet des brevets en question.
Mais les gestionnaires de ces portefeuilles vont plus loin... Les flux financiers mondiaux entre les sociétés et leurs filiales qui gèrent les brevets et qui encaissent les revenus leurs permettent pour partie d'échapper à l'impôt, ou tout du moins à profiter d'une imposition plus favorable. Cet article se termine par une infographie fort instructive sur ces flux...
Ces brevets qui rapportent
Les revenus générés par les brevets, et la propriété intellectuelle (IP) qui leur est associée, peuvent être considérables. Plus encore aux Etats-Unis où les brevets peuvent porter sur des concepts et du logiciel, ce qui n'est pas le cas en Europe. Ce que en revanche les américains aimeraient bien obtenir dans le cadre des négociations commerciales des deux cotés de l'Atlantique, mais c'est une autre histoire...
Le cas des brevets de Microsoft sur des technologies qui sont reprises dans Android est emblématique de cette situation. Avant l'acquisition de Nokia, les revenus des brevets reversés par Google et la communauté Android auraient été supérieurs à ceux de la division Windows Phone !
Ces brevets qui protègent
Par ailleurs, ces dernières années une part importante des acquisitions de brevets a visé la protection des technologies de constructeurs et d'éditeurs face à une concurrence féroce – à l'exemple du procès fleuve d'Apple contre Samsung ; de l'achat de Motorola Mobile par Google pour 12 milliards de dollars visant plus particulièrement à protéger Android ; ou à l'inverse du consortium Rockstar qui a réuni Apple, Blackberry, Ericsson, Microsoft, ou encore Sony, dans le but d'acquérir les brevets sur des technologies mobiles de l'équipementier canadien Nortel Networks pour 4,5 milliards de dollars, un prix exorbitant visant à bloquer Google et les fabricants asiatiques de terminaux Android, Asus, HTC, Huawei, LG Electronics, Pantech, Samsung et ZTE.
Ces brevets qui échappent en partie à l'impôt
Mais ce qui nous intéresse aujourd'hui, ce n'est pas cette guerre des brevets, ni même leur exploitation, à savoir les revenus qu'ils génèrent, mais plus directement comment les propriétaires de ces brevets arrivent à échapper à une partie de l'imposition ? Une question à laquelle l'excellent magazine Wired, dans sa version britannique du mois de mai dernier, a répondu au travers d'une infographie qui explique le phénomène. Et que nous avons souhaité partager avec vous.
Les flux financiers mondiaux qui affectent les revenus des brevets et permettent de réduire l'imposition y sont décrits. Ainsi apprend-t-on que Amazon, Apple, Facebook, Google, ou encore Microsoft savent jongler avec les sociétés/filiales qui sont propriétaires des portefeuilles de brevets et sont placées en des lieux à l'imposition favorable.
Ces brevets qui ne rapportent pas à l'administration américaine
Vous l'aurez remarqué, les entreprises visées par ces pratiques sont américaines. Nul doute, cependant, que des entreprises européennes affichent des pratiques équivalentes. En revanche, c'est principalement l'administration américaine qui affiche ici un déficit d'imposition ! Avec cependant pour les gouvernements concernés une petite revanche : dans leur montage alambiqué, les responsables financiers de ces sociétés ont fait preuve d'intelligence, mais ne savent pas encore comment en faire profiter directement les actionnaires des groupes. Car pour continuer de bénéficier de ces facilités fiscales les revenus concernés doivent demeurer dans ces paradis. Qu'ils migrent vers les Etats-Unis, et le gouvernement américain ne manquera pas de les rappeler à leurs devoirs...
Ces brevets qui contournent les pratiques des contribuables européens
La vision de la revente de la propriété intellectuelle vue par Wired UK est principalement européenne, avec un noeud en Irlande, et des ramifications vers Amsterdam et le Luxembourg, avant de s'étendre vers Puerto Rico, les Iles Cayman et les Bermudes, ainsi que Shenzhen et Singapour, avant de finalement revenir vers la Silicon Valley (Menlo Park, Mountain View, Cupertino), Redmond et Seattle.
Nous vous laissons apprécier l'infographie, sans autre commentaire, à chacun de se faire une opinion sur ces pratiques...