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Bien que la quantification de l’agilité et de ses bénéfices reste un défi en raison de sa nature qualitative et évolutive, les entreprises cherchent toujours à évaluer leur niveau d’agilité et leurs performances. Une étude sur le secteur bancaire européen examine la relation entre l’agilité et la rentabilité.

Après trente ans d’existence, le concept d’agilité s’est mué en une philosophie de gestion moderne, basée sur des méthodes et des processus qui permettent aux entreprises de s’adapter au changement. L’un des principes clés de l’agilité est l’amélioration continue et l’adaptabilité. Par conséquent, les entreprises agiles sont en perpétuelle évolution, ajustant constamment leurs pratiques et processus. Cette nature dynamique complique la mise en place de mesures fixes et comparables dans le temps. Les indicateurs doivent également évoluer pour rester pertinents, ce qui ajoute une couche de complexité supplémentaire à la quantification de l’agilité.

Toutefois, quantifier l’agilité et ses bénéfices demeure un défi en raison de sa nature qualitative, de la diversité des pratiques, du contexte organisationnel et culturel, de la complexité des indicateurs, et du caractère évolutif de tous ces facteurs. Autant dire qu’obtenir un état, reproduisible et transposable, de l’agilité est presque impossible.

Cependant, malgré ces défis, les entreprises continuent de chercher des moyens d’évaluer leur agilité, souvent en combinant des mesures quantitatives avec des évaluations qualitatives et contextuelles. Comprendre et surmonter ces difficultés est crucial pour les organisations souhaitant maximiser les bénéfices de leurs initiatives agiles.

Cinq catégories d’expertise agile évaluées

Reacteev, la société de conseil spécialisée dans l’agilité des entreprises, a collaboré avec Darwin X, créateur de l’Agile Community Index, pour évaluer le niveau de pénétration de l’agilité au sein des entreprises, de banques européennes plus précisément. Les scores d’agilité des banques européennes ont été déterminés en fonction de cinq catégories d’expertise agile, à savoir le Product Owner, l’Agile, le Scrum, le DevOps et le SAfe ou Scaled Agile Framework. Ce dernier est un cadre de travail agile à grande échelle qui vise à aider les organisations à mettre en œuvre des pratiques agiles de manière structurée et coordonnée.

L’indice Agile des banques européennes est calculé sur une échelle de 0 à 100 en se basant sur le nombre d’experts en agilité rapporté à l’effectif total de chaque banque. Plus précisément, le score est déterminé en divisant le nombre de spécialistes dans chaque catégorie d’expertise agile par la taille totale de l’entreprise, ce qui permet d’obtenir le pourcentage de l’effectif consacré à cette spécialité. Ensuite, ce pourcentage est comparé à celui des autres acteurs du marché, attribuant ainsi un score relatif à chaque banque. Le meilleur acteur obtient un score de 100, tandis que le dernier acteur se voit attribuer un score de 0, avec les autres banques étant notées en fonction de leur performance relative.

L’agilité peut maximiser la rentabilité 

D’après les résultats de l’étude : la banque néerlandaise ING se distingue avec le meilleur taux d’agilité (100) et un ratio coût/revenu de 57 %. « Une corrélation qui confirme que l’agilité peut maximiser la rentabilité », affirme le rapport. ING est ainsi la banque européenne qui a, proportionnellement à sa taille, le plus d’experts agiles, très en avance sur le reste du marché. Au Royaume-Uni, Lloyds Bank se positionne en tête avec un score d’agilité de 37 et un ratio coût/revenu de 54 %. Elle est suivie de Natwest Group (24 pour l’agilité et 62 % pour le ratio coût/revenu), Standard Chartered (18 et 66 %) et Barclays (17 et 65 %).

En France, bien que la Société Générale (25), BNP (21) et BPCE (12) soient les plus agiles, elles présentent des ratios coût/revenu respectivement de 68 %, 67 % et 71 %. Cependant, des exceptions existent : Crédit Agricole et Crédit Mutuel, avec les meilleurs ratios coût/revenu, sont les moins agiles, une particularité du paysage bancaire français. En Espagne, BBVA affiche les meilleurs scores pour l’agilité (20) et la rentabilité (43 %). Banco Santander suit avec un score d’agilité de 10 et un ratio coût/revenu de 45 %. À l’opposé, CaixaBank, avec un score d’agilité de 9, présente le ratio coût/revenu le plus élevé (49 %).

Les banques françaises ne rentrent pas dans le modèle

En Espagne, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, il existe une corrélation significative entre l’agilité d’une banque et son ratio cost-to-income (CIR). Les banques ayant des scores élevés d’agilité affichent généralement des CIR plus bas, illustrant ainsi la relation positive entre l’adoption de pratiques agiles et l’efficacité opérationnelle. En revanche, cette corrélation n’est pas observée en France. Par exemple, la Société Générale, bien qu’ayant le score d’agilité le plus élevé en France avec 25, présente un CIR supérieur à celui du Crédit Mutuel, du Crédit Agricole et de BNP Paribas.

Hélas, le rapport n’aborde pas les causes de cette inadéquation entre l’agilité et le cost-to-income en France. Certes, les banques françaises ont historiquement été caractérisées par une culture organisationnelle plus traditionnelle et hiérarchique, ce qui peut rendre plus difficile l’adoption de pratiques agiles. Celles-ci nécessitent une plus grande flexibilité et une prise de décision plus décentralisée.