Dans une affaire jugée en décembre, Google a été condamné à déréférencer une page de son moteur de recherche au titre du respect du droit à l'oubli. L'affaire pourrait faire jurisprudence.

C'est une première en France : à la suite d'une procédure lancée par une internaute, Google a été condamné par la justice française à supprimer une page référtencée sur son moteur de recherche au titre du respect du droit à l'oubli.

Depuis mai 2014, et à la demande de la Cour de Justice de l'Union Européenne, Google se trouve dans l'obligation d'honorer le droit à l'oubli numérique et à la désindexation des internautes qui en font la demande. Sont concernés les liens qui peuvent nuire à l'image ou à la réputation de ces internautes.

Depuis que s'applique cette règle, Google aurait reçu plus 140.000 demandes qui concernent des personnes en lien avec la France, dont plus de 50.000 demandes provenant de France. Pays considéré comme le champion du droit à l'oubli, car celui où les internautes en usent le plus. Mais 48 % seulement des URL objets de demandes ont été supprimées.

La première condamnation française

Parmi les URL référencées par Google figurent deux liens vers une page du journal Le Parisien faisant état d'une condamnation d'une internaute pour escroquerie. Une affaire qui remonte à 2006. La personne a fait auprès de Google la demande de suppression de la page – au titre d'un préjudice dans sa recherche d'emploi - en complétant le formulaire de demande de droit à l'oubli. Le moteur a décliné la demande en déclarant que l'article cité est d'intérêt public.

L'affaire a été portée devant la justice. Le tribunal de grande instance de Paris a diligenté très rapidement son traitement. Le refus de Google date de septembre 2014, la décision du tribunal le 19 décembre. Il y est fait le constat que la condamnation ne figure pas sur le bulletin n°3 du casier judiciaire de la plaignante (auquel les employeurs ont accès). De plus, la justice a pris en compte le délai de 8 ans qui sépare la publication de l'article et le dépôt de la plainte.

L'ordonnance du tribunal de grande instance de Paris a constaté que la demande de déréférencement est fondée, et condamné Google à supprimer les liens incriminés, dans un délai de dix jours, sous peine d'une condamnation plus lourde. Le tribunal n'a en revanche pas donné suite à la demande de la plaignante de dommages et intérêts.

Vers une jurisprudence ?

Avec le nombre de demandes qui s'accumulent, dont plus de la moitié sont insatisfaites, il semble qu'il manque un cadre juridique plus précis qui accompagne la prise de décision des équipes en charge des dossiers de droit à l'oubli de Google. Equipes que l'on imagine bien chargées !

Rappelons que précédemment, les juges n'ont pas donné suite à deux demandes similaire d'internautes contre Google ! Peut-on dans ces conditions considérer que la décision du tribunal de grande instance de Paris apporte un axe de décision ? Et à ce titre, pourrait-il faire jurisprudence ? « L'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne soulève de nombreuses questions, dans ce cas particulier, le tribunal nous a demandé de retirer ce lien et nous l'avons fait », a déclaré Google à l'AFP.