Le rapport Uptime Institute Global Data Center Survey 2023 éclaire les expériences et stratégies des propriétaires et exploitants de centres de données en termes de résilience, durabilité, efficacité, conformité réglementaire, gestion du personnel, technologie cloud et technologies innovantes. Dans cet article nous nous sommes concentrés sur la partie concernant le calcul de l’empreinte carbone et la résilience des centres de données.
L'édition 2023 de l'enquête de l'Uptime Institute révèle une industrie qui continue de croître en importance et en envergure, mais qui doit faire face à un éventail de défis de plus en plus divers. Les opérateurs sont confrontés à des réglementations plus strictes et à la nécessité de réduire la consommation d'énergie, parallèlement à des problèmes persistants de personnel et de chaîne d'approvisionnement. Les technologies émergentes offrent des solutions potentielles, mais elles sont coûteuses et le manque de standardisation et de mise à l’échelle sont des freins. Alors que de nombreuses organisations commencent à voir des retours sur leurs investissements en efficacité et résilience, les progrès restent lents face à une tendance croissante à l'externalisation des charges de travail.
L'enquête a été menée en ligne de février 2023 à avril 2023, recueillant les réponses de plus de 850 propriétaires et exploitants de centres de données, ainsi que près de 700 fournisseurs et consultants. Ce rapport se concentre principalement sur les propriétaires et exploitants d'infrastructure numérique, une analyse séparée des expériences et points de vue des fournisseurs et consultants sera publiée ultérieurement par Uptime Institute.
Durabilité, des métriques incohérentes
Les études précédentes d'Uptime ont révélé que la collecte de données liées à la durabilité et le calcul des métriques associées sont « au mieux incohérents ». L’enquête de 2023 confirme cette observation : de nombreux opérateurs trouvent difficile de se conformer aux nouvelles réglementations en matière de rapport de durabilité, ainsi qu'aux exigences de certains clients et même du grand public. Le rapport de durabilité de 2023 met principalement l'accent sur l'efficacité énergétique de l'infrastructure plutôt que sur la réduction du carbone.On pourrait interpréter cela comme si les opérateurs choisissaient de mesurer l’efficacité énergétique par quantité de travail (par exemple, les cycles de CPU) qui peut être extraite d'une ressource, telle qu'une unité d'énergie, plutôt que de minimiser l'empreinte carbone de cette ressource. En somme, concernant les CPU par exemple, il s’agit de mesurer l’efficacité énergétique par cycle d’horloge au lieu de la réduction de celle-ci afin de réduire l’empreinte carbone.
Mesurer l’efficacité énergétique plutôt que l’empreinte carbone
Cette difficulté démontre clairement l’impossibilité d’établir une formule définitive englobant simultanément l’efficacité énergétique et la réduction de l’empreinte carbone. Un principe d’incertitude à la Heisenberg et qui n’est pas étonnant pour des centres sensés fournir à tout moment le surcroît de puissance dont ont besoin les clients. Dans ce contexte, la réduction de la consommation (eau, électricité…), et par conséquent de l’empreinte carbone, est inenvisageable commercialement.Selon Uptime Institute, les données de l’étude, suggèrent une méthode plus simple : le suivi de la consommation d'énergie, du PUE et de l'utilisation de l'eau. Toute amélioration dans ces domaines permet souvent de réaliser des économies. En revanche, estime l’étude, « la réduction du carbone - qui peut être en partie réalisée par une bonne gestion de l'énergie - est une tâche beaucoup plus complexe avec moins d'incitations financières directes ».
Soutenir le temps de fonctionnement et gérer les pannes
Les données d'Uptime démontrent que les propriétaires et les exploitants de centres de données investissent progressivement dans la résilience, améliorant la redondance des système. Malgré ces investissements, les pannes restent problématiques. Les complexités liées à la surveillance des pannes dans l'infrastructure des centres de données, qui comprend à la fois l'IT et les réseaux, peuvent être ardues. Déterminer ce qui constitue une panne, sa gravité et identifier son origine sont devenus plus complexes dans le monde multicouche et interconnecté des services informatiques d'aujourd'hui.« Malgré l'engagement de l'industrie à fournir une infrastructure numérique hautement fiable et accessible, de nombreuses pannes et leurs analyses de cause première restent cachées au public, en raison d'une tendance commune parmi les opérateurs à s'abstenir de divulgation », affirme le rapport. Cette situation aboutit à des données de panne souvent peu claires et incomplètes, empêchant l'industrie d'apprendre des leçons potentielles sur la façon d'éviter ou de gérer des dysfonctionnements similaires. Malgré ces défis, les données de panne d'Uptime sont restées largement cohérentes au fil des années.
Dans l'ensemble, l'image qui émerge montre une diminution progressive de la fréquence et de la gravité des pannes dans les centres de données. Cela peut surprendre certains, compte tenu de la couverture médiatique accrue des pannes de centres de données ces dernières années. Cependant, « cette couverture est plus révélatrice de l'importance croissante des services numériques dans la vie quotidienne et de l'expansion du paysage mondial des centres de données », tempère le rapport. Les données n'indiquent aucune détérioration du nombre moyen d'incidents par site.
Les rapports de pannes perturbatrices sont en diminution
Malgré cela, depuis plusieurs années, Uptime a documenté une réduction constante du taux de pannes par site (ou par participant à l'enquête). Dans l'enquête 2023, 55% des opérateurs déclarent avoir connu une panne au cours des trois dernières années, contre 60% en 2022, 69% en 2021 et 78% en 2020, prolongeant ainsi la tendance à la baisse.Cependant, plusieurs mises en garde existent. L'une concerne la méthodologie statistique. Le questionnaire de cette année a été modifié pour augmenter la précision. Les répondants sont à présent interrogés sur les pannes au sein de l'installation qu'ils connaissent le mieux, plutôt qu'au sein du site le plus important de l'opérateur. Ce changement peut entraîner une légère modification des données, bien que nos questions de contrôle indiquent un effet mineur.
Une deuxième mise en garde est l'impact imprévisible de la pandémie et d'autres perturbations majeures sur les entreprises. La tendance à de légères améliorations annuelles a persisté pendant les années tumultueuses de la pandémie. Ils ont eu un impact important sur l'industrie des centres de données : les confinements imposés ont initialement diminué la demande sur la plupart des sites, mais cette demande a grimpé en flèche à mesure que le monde s'adaptait à une plus grande dépendance aux services en ligne.
Cela a entraîné des perturbations de la chaîne d'approvisionnement pendant la pandémie, car la pénurie continue de certains équipements clés des installations et des composants informatiques s’est alors installée. « Il est difficile d'évaluer l'effet cumulatif de tous ces facteurs », reconnaît l’Institut. Par exemple, la pandémie a entraîné une baisse des affaires et un avenir incertain pour de nombreuses entreprises, réduisant les budgets pour l'innovation et les mises à jour en raison d'une gestion prudente. De plus, les confinements et les mesures visant à prévenir les infections ont diminué le nombre de personnels disponibles sur site.