À l’occasion de l’Hitachi Forum Paris 2025 , Hitachi Vantara, par la voix d’Octavian Tanase, son chief product officer, précise sa feuille de route en matière d’intelligence artificielle et d’infrastructures de données. À travers cet entretien, l’entreprise détaille son approche de l’IA agentique, la place centrale de la gouvernance des données, son refus du verrouillage technologique et sa lecture des enjeux de souveraineté en Europe. Un positionnement qui fait du stockage et de la plateforme de données un socle opérationnel pour l’IA en entreprise.

Comment Hitachi Vantara définit-elle aujourd’hui son positionnement, au-delà du matériel ?

Hitachi Vantara se définit avant tout comme un fournisseur de systèmes de stockage. La précision est importante, car l’essentiel de notre propriété intellectuelle se situe dans le système d’exploitation de stockage. Ce logiciel constitue le cœur de notre proposition de valeur, qu’il s’exécute sur des infrastructures que nous concevons ou qu’il soit déployé dans des environnements cloud.

Notre stratégie consiste à rester concentrés sur le logiciel et la gestion des données, tout en travaillant étroitement avec des partenaires pour les composants matériels de bas niveau. Nos systèmes reposent sur des processeurs standards, des technologies de mémoire issues de plusieurs fournisseurs et des équipements réseau éprouvés. Cette approche nous permet de proposer des systèmes de stockage durables, ouverts et capables d’évoluer avec les besoins des entreprises.

Pourquoi la gouvernance des données devient-elle un enjeu structurant des projets IA ?

L’IA bénéficie aujourd’hui de conditions favorables. La puissance de calcul s’est généralisée, les algorithmes sont largement accessibles et les volumes de données ont explosé. Cette convergence rend l’IA particulièrement attractive, mais elle pose aussi des questions majeures de gouvernance.

Les pipelines IA manipulent fréquemment des données sensibles, notamment des informations personnelles. Il devient indispensable de savoir où se trouvent ces données, comment elles sont utilisées et dans quelles conditions elles peuvent être exploitées. Nous avons développé des services capables d’identifier les données à caractère personnel, de les masquer et de garantir leur conformité avec des cadres réglementaires comme le RGPD. Sans cette gouvernance, les projets IA ne sont pas viables à grande échelle.

Hitachi iQ Studio vise à accélérer l’industrialisation de l’IA. À quels blocages répond cette offre ?

De nombreuses entreprises peinent à transformer des expérimentations IA en solutions réellement opérationnelles. La complexité de l’infrastructure, le manque de compétences internes et les exigences de conformité ralentissent fortement les projets. Hitachi iQ Studio a été conçu pour répondre à ces obstacles.

Il s’agit d’un outil et d’un cadre qui permettent de concevoir, de déployer et de gouverner des agents IA tout en conservant les données et les modèles dans l’infrastructure de l’entreprise. Les organisations peuvent utiliser des modèles préentraînés, les adapter à leurs données grâce à des mécanismes comme le RAG, et conserver une traçabilité complète des informations utilisées. Cela répond directement aux exigences d’IA explicable et responsable.

L’IA agentique peut-elle réellement être utilisée par des équipes non techniques ?

L’un des objectifs de Hitachi iQ Studio est de rendre l’IA plus accessible sans renoncer au contrôle. Grâce à des interfaces visuelles et à des cadres préconfigurés, des équipes métiers peuvent concevoir des agents capables d’analyser des données internes et externes, de surveiller des évolutions de marché ou de produire des recommandations.

Cette approche modifie la diffusion de l’IA dans l’entreprise. Elle ne repose plus exclusivement sur des profils spécialisés, mais devient un levier opérationnel pour différents départements. Cette démocratisation s’accompagne néanmoins de mécanismes de gouvernance stricts afin de garantir la conformité, l’explicabilité et l’alignement avec les objectifs de l’organisation.

Comment répondre à la complexité croissante des chaînes techniques de l'IA ?

Les environnements modernes combinent des technologies issues de plusieurs fournisseurs ainsi que des composants open source. Il ne suffit plus de comprendre chaque brique isolément, il faut disposer d’une visibilité de bout en bout, du stockage jusqu’au calcul GPU.

Nous avons développé des outils d’observabilité couvrant le stockage, les réseaux, les hyperviseurs et les ressources de calcul. Ces capacités sont intégrées à VSP 360 et peuvent être utilisées seules ou en complément d’outils tiers grâce à des interfaces de programmation ouvertes. Les entreprises conservent ainsi la liberté d’opérer dans l’écosystème de leur choix.

Quelle est la position d’Hitachi Vantara face aux stratégies de verrouillage du marché ?

Nous avons une longue tradition de systèmes ouverts et nous ne cherchons pas à enfermer nos clients dans un écosystème propriétaire. L’innovation repose aujourd’hui sur la collaboration. Les hyperscalers ont apporté agilité, échelle et nouveaux modèles de consommation, et ces évolutions doivent être prises en compte.

Notre approche consiste à nous intégrer à ces environnements tout en laissant aux clients le choix de leurs outils et de leurs partenaires. Les entreprises sont devenues plus exigeantes et recherchent des solutions capables de s’adapter à des environnements hybrides et à des stratégies évolutives.

Comment Hitachi Vantara aborde-t-elle les enjeux de souveraineté en Europe ?

Hitachi est un groupe mondial, présent dans de nombreux secteurs. Cette diversité implique une compréhension fine des cadres réglementaires locaux. En Europe, des normes comme DORA ont fortement influencé la conception de nos offres, en particulier pour les institutions financières et les secteurs régulés.

La souveraineté ne se décrète pas. Elle repose sur l’anticipation des besoins spécifiques, le respect des contraintes locales et la conception d’architectures capables de soutenir des initiatives comme les clouds souverains, sans promesses simplificatrices.

Quel rôle joue aujourd’hui le stockage dans la structuration des futures usines IA ?

Les workloads IA exercent une pression considérable sur les infrastructures existantes. Le stockage doit offrir des performances élevées, une résilience renforcée et une capacité d’évolution importante. VSP One Block High End a été conçu pour répondre à ces exigences, tout en intégrant des mécanismes avancés de cybersécurité et de reprise après incident.

À mesure que les organisations entrent dans l’ère des usines IA, le stockage devient un socle unifié de données. Il soutient à la fois les charges critiques et analytiques, tout en contribuant à la productivité, à la fiabilité et à la pérennité des systèmes d’information.

La durabilité influence-t-elle les choix technologiques d’Hitachi Vantara ?

La durabilité relève à la fois d’une responsabilité environnementale et d’une logique économique. Des systèmes plus efficaces réduisent la consommation énergétique, les coûts d’exploitation et l’empreinte carbone des centres de données.

Nous concevons nos produits pour qu’ils soient plus sobres, plus efficaces et certifiés selon des standards reconnus. Cette approche permet aux entreprises d’opérer de manière plus durable tout en améliorant la performance globale de leurs infrastructures.

Quels sont les axes prioritaires de la feuille de route à court et moyen terme ?

La priorité reste l’innovation menée avec les clients et les partenaires. Le rythme du marché ne permet plus de développer des solutions en vase clos. L’IA représente une opportunité majeure, à condition d’être rendue plus simple, plus sécurisée et plus responsable.

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