En réduisant la dette technique et en accélérant les projets, l’IA agentique change la donne économique des systèmes d’information. Selon l’étude McKinsey The new economics of enterprise technology in an AI world, ce saut technologique dépasse la logique des gains incrémentaux et impose une transformation profonde des modèles de talents et des modes d’organisation.

L’agentification marque une rupture nette avec l’automatisation classique. Là où les outils numériques se limitaient à optimiser des processus existants, McKinsey observe que les premiers programmes d’IA agentique permettent une réduction de 40 % des coûts liés à la dette technique et une accélération de 50 % des projets de modernisation. Ces gains dépassent largement les bénéfices incrémentaux observés jusqu’ici.

En pratique, les agents ne se contentent pas d’automatiser des tâches isolées : ils orchestrent la refonte d’ensembles applicatifs entiers, gèrent la correction de dette technique en continu et fluidifient les cycles de développement. L’impact se joue donc à trois niveaux : architecture extensible, processus réorganisés autour de boucles courtes et supervision intégrée. La productivité ne résulte plus du simple renfort d’effectifs ou de budgets, mais de la capacité à mobiliser des agents capables de travailler en parallèle et de manière autonome.

Du modèle hiérarchisé au modèle fluide des talents

Une telle mutation ne peut pas être absorbée par les structures RH traditionnelles. Les rôles figés, les parcours linéaires et les compétences cloisonnées ne suffisent plus dans un environnement où l’IA prend en charge une partie des fonctions opérationnelles.

Comme le soulignent les auteurs de l’étude, l’agentification ouvre la voie à « un modèle de talents suralimenté, capable de traiter des cas d’usage auparavant insolubles ou prohibitifs, et de reconfigurer en profondeur la manière dont l’informatique développe de nouvelles applications, réduit les coûts d’exploitation et crée de nouveaux flux de revenus. Cette fluidité impose aux DRH de revoir leurs référentiels de compétences et d’introduire des trajectoires de carrière moins standardisées, mais mieux adaptées à des organisations en mouvement permanent.

La logique de projets ponctuels montre ici ses limites. L’agentification ne déploie tout son potentiel que dans le cadre d’équipes pluridisciplinaires, responsables de bout en bout d’un produit ou d’un service numérique. Cette organisation permet de mesurer et de piloter la performance sur la durée, en intégrant les coûts directs, la dette technique et les gains générés. Les équipes deviennent comptables de la valeur produite et non plus uniquement de la livraison. Dans ce schéma, les agents IA ne sont pas des substituts, mais des accélérateurs, capables d’assumer les tâches répétitives et d’amplifier la capacité d’analyse. L’impact est double : plus de rigueur financière et davantage de continuité dans la création de valeur.

Un nouvel équilibre entre humains et agents intelligents

L’adoption de l’IA agentique impose un ajustement stratégique. À court terme, les collaborateurs délèguent une partie de leur charge de travail aux agents. Mais à moyen terme, leur rôle se redéfinit : ils deviennent orchestrateurs, garants de la cohérence des décisions et de l’intégration des agents dans les processus métiers. La valeur de l’humain se déplace vers la supervision, la coordination et l’innovation, tandis que les agents exécutent une part croissante de l’activité courante. < :p>

Cette redistribution exige un accompagnement fort : formation continue, mobilité interne, et gouvernance des talents adaptée à des trajectoires moins linéaires. Les organisations qui parviendront à articuler cette complémentarité entre humains et agents auront un avantage déterminant, en transformant la productivité en levier de compétitivité durable.