Les directions informatiques ne manquent ni de solutions technologiques ni d’intention stratégique, mais peinent à transformer ces ressources en agilité concrète. Le rapport « De fragile à agile », publié par SolarWinds en collaboration avec UserEvidence, montre que les principaux freins à la résilience ne relèvent pas du manque d’outillage, mais de causes organisationnelles plus profondes. Interrogés dans neuf pays, dont la France, les 600 décideurs IT sondés décrivent un environnement complexe où les processus inefficaces, la pénurie de compétences et l’absence de métriques de pilotage limitent la capacité de réaction face aux perturbations numériques.
Neuf responsables informatiques sur dix estiment que leur entreprise est globalement résiliente. Pourtant, moins de la moitié d’entre eux se disent réellement préparés à affronter les défis posés par les architectures distribuées, les cybermenaces ou les attentes des utilisateurs. À titre d’exemple, seuls 26 % se sentent armés pour gérer les politiques de type BYOD, 36 % pour encadrer les exigences croissantes des utilisateurs internes, et 38 % pour intégrer l’intelligence artificielle dans leurs processus.
Ce décalage s’explique en grande partie par des limites structurelles que les outils ne suffisent pas à compenser. Ainsi, 53 % des répondants pointent des flux de travail inefficaces comme principal facteur de retard dans la gestion des incidents. Pour 36 %, c’est le manque de personnel qui constitue un frein majeur. À l’inverse, seuls 13 % évoquent un déficit d’outils techniques. Ce résultat confirme un phénomène souvent
sous-estimé dans les stratégies de transformation : la résilience ne se décrète pas via l’acquisition de nouvelles solutions, mais se construit grâce à la capacité à opérer efficacement, avec des équipes alignées et des processus maîtrisés.
Des métriques souvent absentes ou sous-utilisées
La gouvernance des incidents repose sur des indicateurs clés comme le temps moyen de détection, d’identification ou de résolution. Or, de nombreuses entreprises ne suivent pas systématiquement ces métriques, ce qui limite leur capacité à évaluer les performances réelles ou à capitaliser sur les retours d’expérience. Chez celles qui le font, la majorité reconnaît que la performance dépend d’abord de l’efficacité des outils (73 %), de la fluidité des flux de travail (67 %) et de la structuration des équipes (44 %). Là encore, la dimension organisationnelle prime sur la simple dimension technologique.Lorsque la résilience fait défaut, ce sont les utilisateurs, les revenus et la réputation qui en pâtissent. Selon les données de l’étude, 71 % des professionnels IT placent l’expérience utilisateur au premier rang de leurs préoccupations en cas d’incident majeur. Un tiers des répondants observe des pertes de revenus liées à ces interruptions, et 28 % indiquent que la perception de la fiabilité par les clients affecte directement la marque et ses performances commerciales. Ces chiffres traduisent une réalité bien connue des DSI : dans un monde interconnecté, la résilience n’est pas seulement une affaire d’IT, elle devient un facteur de compétitivité à part entière.
Cartographier, corriger, réévaluer : une stratégie en trois temps
Plutôt que de préconiser des investissements massifs dans de nouveaux outils, le rapport SolarWinds invite à structurer une approche globale de la résilience, fondée sur trois étapes. La première consiste à cartographier les interdépendances entre systèmes, équipes et processus, pour mieux comprendre les points de friction. La seconde vise à identifier les lacunes dans les processus, notamment les doublons, les goulots d’étranglement et les pertes d’information. Enfin, la troisième étape recommande de réévaluer les outils existants pour privilégier ceux qui renforcent la visibilité, la collaboration et la capacitéd’intervention rapide.
Cette méthodologie rejoint les constats formulés par d’autres études en 2025, notamment celles du MIT Sloan et de l’Uptime Institute, qui appellent à une meilleure intégration entre fonctions ITSM, observabilité, sécurité et automatisation. L’objectif n’est plus seulement de limiter les pannes, mais de rendre les environnements numériques plus adaptatifs, plus lisibles et plus réactifs.
Vers une résilience mesurable et pilotée
Le rapport 2025 de SolarWinds rappelle que la résilience informatique ne peut plus être abordée comme un supplément de robustesse. Elle s’impose comme une composante stratégique à part entière, structurée autour d’axes tangibles : la lisibilité des flux, la mobilisation des compétences, la gouvernance des indicateurs et l’adéquation des outils. En ce sens, elle devient un révélateur de maturité organisationnelle.L’enjeu n’est pas seulement de mieux réagir aux incidents, mais d’apprendre à les anticiper, à les absorber et à en tirer parti dans une logique d’amélioration continue. La résilience n’est plus une posture défensive : elle devient une capacité dynamique, facteur de différenciation dans l’économie numérique.