L’arrivée de la nouvelle administration aux États-Unis suscite de nombreuses interrogations sur la direction que prendront ses politiques économiques et commerciales. Menée au pas de charge, sans égard pour les plus vulnérables, les lois et même les usages, la politique de la nouvelle administration américaine, « à l’emporte-pièce », aura des répercussions sur tout l’environnement économique mondial, notamment sur l’Europe.
C’est ce que confirme une étude récente de Forrester Research, qui met en lumière les implications potentielles de ces changements sur l’industrie des technologies de l’information et des semiconducteurs en Europe. Entre hausse des tarifs douaniers, reconfiguration des chaînes d’approvisionnement et protectionnisme accru, les entreprises européennes du secteur doivent s’adapter à une nouvelle réalité. Elles devront absorber les répercussions directes sur leurs exportations, les chaînes d’approvisionnement et les investissements dans les nouvelles technologies, et lancer des initiatives pour minimiser les effets de la politique du gouvernement Trump.
Les États-Unis privilégient la production locale
L’une des premières mesures envisagées par la nouvelle administration américaine concerne une augmentation significative des tarifs douaniers sur les importations européennes. L’Union européenne, qui est l’un des plus grands exportateurs vers lesÉtats-Unis, pourrait être particulièrement touchée puisque 69 % de ses exportations vers les États-Unis concernent des secteurs clés comme les machines, l’équipement de transport et les produits chimiques. Ce protectionnisme renforcé risque d’affecter plusieurs industries stratégiques, notamment celle des semiconducteurs et des services IT.
Dans le domaine des semiconducteurs, les États-Unis ont amorcé un virage vers la production locale afin de réduire leur dépendance vis-à-vis des importations asiatiques. La nouvelle administration prévoit d’accentuer cette politique en imposant des barrières commerciales supplémentaires sur les puces électroniques. Cette orientation pénaliserait directement les fabricants européens comme Infineon en Allemagne et STMicroelectronics en France, qui exportent massivement vers les États-Unis. De plus, la réduction des subventions issues du Chips and Science Act et l’imposition de nouveaux tarifs douaniers sur les composants en provenance de Chine et d’Europe pourraient bouleverser la chaîne d’approvisionnement mondiale.
Les services IT et les logiciels pourraient être affectés
Par ailleurs, les entreprises européennes spécialisées dans les services IT et logiciels pourraient également être affectés par une préférence accrue pour les fournisseurs américains. Les restrictions potentielles sur l’accès aux contrats publics et aux marchés gouvernementaux pourraient limiter la croissance d’acteurs comme SAP, Capgemini et Atos, qui dépendent en partie de leur présence aux États-Unis. De plus, une réglementation plus stricte sur les données et l’intelligence artificielle pourrait contraindre les entreprises européennes à revoir leur positionnement sur le marché américain.Face à ces bouleversements, les entreprises européennes du secteur technologique doivent anticiper plusieurs inconnues. D’abord, elles risquent de subir un ralentissement des exportations vers les États-Unis, avec une augmentation des coûts liée aux taxes douanières. Ensuite, elles pourraient être amenées à reconfigurer leurs chaînes de production pour éviter les pénalités tarifaires. Par exemple, certains fabricants de semiconducteurs envisagent déjà de rapatrier une partie de leur production en Europe ou d’explorer de nouveaux débouchés en Asie et en Amérique latine.
L’industrie du cloud et des infrastructures numériques pourrait également être fragilisée. La nouvelle administration pourrait imposer des restrictions plus strictes sur les fournisseurs étrangers, notamment ceux opérant dans des secteurs sensibles comme l’intelligence artificielle et la cybersécurité. Cette politique risquerait de réduire la compétitivité des géants européens du cloud face à leurs homologues américains.
Construire un écosystème technologique européen
Cependant, ces défis peuvent se transformer en véritables opportunités pour construire un écosystème technologique européen. Ils pourraient lever les freins traditionnels et relancer les projets de souveraineté européenne. L’European Chips Act par exemple, qui vise à renforcer la production locale de semiconducteurs pour réduire la dépendance aux importations américaines et asiatiques, pourrait être une réponse stratégique. L’Union européenne pourrait également augmenter ses investissements dans le numérique et dans les technologies vertes, un secteur dans lequel les États-Unis semblent vouloirralentir leurs engagements.
L’Europe pourrait ainsi prendre l’initiative en matière d’innovation verte, en investissant dans des technologies propres, les réseaux intelligents (smart grids) et la mobilité durable. L’étude de Forrester Research met en évidence une transformation profonde de l’industrie IT et technologique européenne, contrainte de s’adapter aux nouvelles réalités du commerce international. Un environnement international qui se reconfigure sous les coups de boutoir des États-Unis. Ils pourraient aussi encourager une réindustrialisation du secteur technologique en Europe et favoriser l’émergence d’un marché numérique plus intégré. Dans ce contexte, les entreprises européennes devront diversifier leurs marchés, investir dans des solutions locales et innover afin de rester compétitives face aux mutations du paysage économique mondial.